Pourquoi les anciens salariés d'Ecopla bloquent-ils leur usine dans l'Isère ?
Les anciens salariés de l'usine d'emballage en aluminium se mobilisent pour reprendre eux-mêmes la gestion de leur entreprise, liquidée il y a plus de huit mois.
Ils tentent le tout pour le tout. Jeudi 22 décembre, c'est le président de la République en personne qu'ils espèrent interpeller. Huit anciens salariés de l'usine Ecopla, placée en liquidation judiciaire depuis mars 2016, ont sollicité une rencontre avec François Hollande. Ils veulent lui demander d'agir pour sauver leur petite entreprise, située à Saint-Vincent-de-Mercuze (Isère).
Alors que le chef de l'Etat est en déplacement à Chambéry (Savoie), à 30 kilomètres de là, un comité de volontaires bloque toujours l'usine de barquettes en aluminium. Leur objectif ? Réussir à reprendre, sous forme de Scop, leur entreprise et conserver une partie des emplois. Mais la justice en a décidé autrement en confiant la reprise de l'entreprise à son concurrent italien Cuki Cofresco en mars, qui n'a pas prévu de plan de sauvegarde de l'emploi.
Où en est la situation ?
"Une chaîne humaine s'est formée pour protéger les machines", explique Annie David, la sénatrice PCF de l'Isère qui défend le projet de Scop. Le blocage de l'usine a été mis en place mardi, lorsque des camions de l'entreprise italienne Cuki sont arrivés sur place pour récupérer le matériel de l'usine : des presses et des outils. "Ils l'ont fait en catimini, heureusement c'est un petit village. Des voisins ont donné l'alerte", indique l'élue. Depuis, un monticule de pneus empêche l'accès au site.
"Ce blocage sera effectif tant que Cuki Cofresco ne signe pas un document qui atteste qu'elle ne déménagera pas nos outils de travail avant le 11 janvier", explique Karine Salaün, une ancienne salariée très investie dans la reprise du site. Cette date n'est pas choisie au hasard : la veille, une réunion est prévue entre les anciens salariés et le repreneur italien au ministère de l'Economie et des Finances. Malgré la météo peu clémente et les allées et venues des gendarmes, les anciens salariés l'assurent : ils tiendront bon.
Pourquoi en est-on arrivé là ?
"L'ancien propriétaire de l'usine est parti avec la caisse", soupire Annie David qui va régulièrement sur les lieux occupés. L'entreprise est placée en liquidation judiciaire en mars dernier alors qu'elle réalisait 20 millions d'euros de chiffre d'affaire en 2013. En 2014-2015, la perte sur l'exercice était de moins 3,6 millions d'euros. Les 77 salariés sont licenciés dans la foulée.
Deux offres de reprise voient le jour : celle d'une quinzaine de licenciés d'Ecopla qui décident de se lancer dans une Scop, où chaque salarié serait actionnaire. "Nous voulons maintenir des emplois, 20 la première année, 50 ensuite", précise Karine Salaün. Leur proposition, appuyée par une levée de fond de 2,3 millions d'euros auprès de banquiers et d'investisseurs, ne sera pas retenue face à celle de Cuki Cofresco.
Le concurrent du leader français proposait un million d'euros pour récupérer les machines et solder les salaires. Le tribunal de commerce a décidé d'opter pour cette solution. L'offre des salariés était moindre, "seulement" 100 000 euros en plus des emplois sauvegardés.
Quelles sont les chances d'aboutir pour les anciens salariés ?
Pourtant, ils n'abandonnent pas. "Notre projet n'a pas été pris au sérieux, ni sur le fond ni sur la forme. On a laissé cette entreprise mourir", soupire Karine Salaün. Les anciens salariés assurent qu'ils bénéficient d'un large soutien local : "Tout le monde est derrière nous." Qu'il s'agisse du maire de la commune Philippe Baudain, de la sénatrice Annie David ou même du candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon.
Ils espèrent que François Hollande pourra rencontrer la délégation et intervenir dans le processus. Sinon, le rendez-vous à Bercy est bien noté. "Il faut que l'on réussisse à conserver nos outils d'ici là. Sans ça il sera impossible de nous constituer en Scop", conclut Karine Salaün.
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