Ils se passent la patate chaude. Le gouvernement a annoncé une baisse des aides personnalisées au logement (APL) de 5 euros par mois et par foyer à partir du mois d'octobre. La nouvelle, confirmée par par le ministère de la Cohésion des Territoires, a pour objectif de mettre fin à un "système pervers" responsable d'une inflation des loyers, selon Jacques Mézard.Cette mesure, dont le gouvernement indique qu'elle pourrait rapporter 140 millions d'euros d'économies, a provoqué un tollé. Ce qui a poussé l'executif a expliqué qu'elle avait déjà été envisagée sous le précédent gouvernement. Une affirmation niée par les intéressés. Franceinfo revient, en quatre actes, sur cet imbroglio.1L'annonce du gouvernement provoque un tollé Samedi 22 juillet, Matignon annonce à France 2 que l'aide personnalisée au logement (APL) va diminuer de 5 euros pour tous les bénéficiaires dès le 1er octobre prochain. Une décision qui provoque rapidement un tollé. La Fage, premier syndicat étudiant français, estime qu'il s'agit une menace pour "la poursuite d'études" car environ 800 000 étudiants bénéficient des APL. "Cinq euros pour des budgets importants, c’est de l’argent de poche, mais pour des publics qui gagnent moins de 1 000 euros par mois (...) ça représente par exemple le pain pendant une semaine", s'emporte sur RTL Olivier Faure, le patron socialiste du groupe Nouvelle gauche à l’Assemblée.2L'executif pointe le précédent gouvernement du doigtAlors que la polémique enfle, l'exécutif renvoie la balle au gouvernement précédent. "C'est une mesure qui découle du fait que le projet de loi de finances 2017 avait été sous-doté, car le précédent gouvernement avait prévu, sans l'annoncer, une baisse du montant de ces aides de 140 millions d'euros. Sauf qu'ils nous ont laissés la faire", explique Jacques Mézard, le ministre de la Cohésion des territoires, le 22 juillet. Une ligne de défense avancée dès le 12 juillet par Gérald Darmanin lors de son audition devant la commission des finances de l’Assemblée nationale : "La baisse des APL a été votée par la précédente majorité mais n’a jamais été mise en place. Nous prendrons les mesures votées par le Parlement." 3Des anciens ministres dénoncent "un mensonge"Cet argument provoque l'ire d'Emmanuelle Cosse, ancienne ministre du Logement. "Il raconte n’importe quoi et Monsieur Darmanin essaie toujours de trouver des cache-sexes pour défendre des mesures d’économie, fulmine-t-elle sur LCI le 23 juillet. Il y a eu des mesures d’économies qui ont été prises par le gouvernement dans lequel j’étais et qui concernaient des personnes avec des patrimoines très élevés, mais en aucun cas il ne s’agissait d’une baisse massive des APL. Maintenant, ça suffit !"En juillet 2016, le gouvernement de Manuel Valls a pris un décret pour instaurer un seuil de 30 000 euros de patrimoine dans le versement des APL. Une autre mesure, qui faisait partie de la loi de finances de 2016 et n'a jamais été appliquée, prévoyait de rendre inéligibles aux APL les personnes dont les parents paient l'impôt sur la fortune (ISF). Elle n'est pas la seule à réfuter cette baisse. "Nous ne l'avons jamais envisagée [la baisse des APL]. Jamais. Je suis formel. Elle ne nous semblait pas juste", martèle de son côté l'ex-ministre du Budget de François Hollande, Christian Eckert, dans un entretien publié dans Le Parisien le 23 juillet. Le Gouvernement ment ! Baisser les APL de 60 Euros par an pour tous les allocataires, c'est leur décision, pas celle du Gouvernement d'avant— Christian ECKERT (@CECKERT56) 23 juillet 20174Un document de travail qui sème la discordeUne déclaration qui étonne Christophe Castaner, le porte-parole du gouvernement, qui maintient la version de l'exécutif, le lundi 24 juillet. "Il y a la lettre de cadrage qui a été envoyée par Manuel Valls au ministre du Logement et qui a été préparée par Monsieur Eckert qui prévoyait cela", assure-t-il en évoquant la baisse des APL. Une lettre datée du 25 juillet 2016, que BFMTV a pu se procurer. Dans ce courrier, adressé à Emmanuelle Cosse, alors ministre du Logement, il est demandé de réaliser des économies afin de ramener le déficit public en dessous de la barre des 3%."Il est écrit noir sur blanc qu’il s’agit de trouver une baisse de cette dépense d’APL d’un montant de 156 millions sans remise en cause des conditions d’attribution. Et ça veut dire qu’en fait, Matignon demande au ministère du Logement de baisser de façon globale ces APL", analyse Damien Fleurot, le rédacteur en chef adjoint de BFMTV. L'hebdomadaire Marianne explique aussi que le gouvernement de Manuel Valls a baissé les dotations du Fonds national d'aide au logement (Fnal), organisme qui gère les APL. Il avait supprimé, en 2016, la taxe sur les bureaux en Ile-de-France, une contribution du Fnal. Sur son blog, Christian Eckert déplore la fuite de ce document. Il rappelle que cette lettre est "un document de travail", qui ne mentionne pas "les montants d'APL prévus pour le Fnal et inscrits dans une annexe : 18,317 milliards en 2017, contre 17,933 milliards en 2016 soit une augmentation de près de 400 millions ! Donc sûrement pas une baisse en volume des prestations."