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Encadrement des enfants placés : "Nous allons demander aux parlementaires de ne pas voter les amendements"

"Si les amendements du gouvernement étaient votés, la situation pourrait même empirer pour certains jeunes" estime Lyes Louffok, auteur du livre "Dans l'enfer des foyers".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Lyes Louffok, membre du conseil national de la protection de l'enfance, le 12 février 2019. (DANIEL FOURAY / MAXPPP)

L'Assemblée nationale doit adopter, mardi 7 mai, une proposition de loi LREM destinée à renforcer l'accompagnement de des "jeunes majeurs vulnérables" vers l'autonomie, notamment en augmentant le budget alloué de 12 à 60 millions d'euros. Pourtant, Lyes Louffok, membre du conseil national de la protection de l'enfance, lui-même enfant placé, critique sur franceinfo les amendements du gouvernement, qui pourraient avoir comme conséquence "d'empirer" la situation de certains jeunes.

franceinfo : Est-ce que ce texte vous satisfait ?

Lyes Louffok : On a pris une grosse claque en regardant les amendements du gouvernement sur cette proposition de loi. Ce texte ne nous satisfait absolument pas. La loi initiale prévoyait quelque chose de très intéressant, et qui aurait pu être une avancée majeure : l'obligation pour tous les jeunes d'obtenir un contrat jeune majeur, c'est-à-dire une protection après 18 ans et jusqu'à 21 ans avec la possibilité d'être accompagné par un professionnel dans une association. On s'est rendu compte que l'article qui garantissait cette obligation a été transformé pour créer un contrat d'accès à l'autonomie qui ne correspond pas au contrat jeune majeur, puisqu'il n'y a aucune aide sociale obligatoire. Le gouvernement a conditionné l'obtention de ce contrat à un placement effectif d'au moins 18 mois avant les 18 ans. Cela nous paraît être une mesure extrêmement dramatique puisque dans notre pays beaucoup de jeunes mineurs étrangers arrivent sur notre sol à 16 ans et nous pourront pas bénéficier de ce contrat.

Que comptez-vous faire ?

Nous allons demander aux parlementaires de ne pas voter les amendements du gouvernement. Pour nous, si les amendements du gouvernement étaient votés la situation pourrait même empirer pour certains jeunes. Il faudra s'en justifier devant eux si la loi est définitivement votée et appliquée.

Vous dites qu'en France un SDF sur quatre est un ancien enfant placé. Vous l'avez été, que vous est-il arrivé ?

Je n'ai pas pu bénéficier de contrat jeune majeur puisque j'ai été placé dans le département des Yvelines qui n'en propose quasi plus. Mais j'ai eu la chance d'être dans une dernière famille d'accueil qui m'a apporté énormément d'amour et qui dès le départ m'a dit que j'étais chez elle comme chez moi et que j'avais la possibilité d'y rester même si elle n'était plus payée pour cela. Cela a été d'une aide immense parce que sans cela j'aurais certainement rejoint les statistiques tragiques que l'on connaît. 40% des jeunes sans domicile fixe de 18 à 25 ans sont des anciens de l'aide social à l'enfance.

Est-ce qu'il y a des départements où les enfants placés s'en sortent mieux que d'autres ?

Il y a des départements où on s'en sort mieux que d'autres et c'est le problème du dispositif de la protection à l'enfance parce que c'est un peu la roulette russe en fonction du département où on est. On n'aura pas le même accompagnement puisque les départements sont souverains de la façon dont ils proposent cette aide. On assiste depuis quelques années à ce renvoi de balle entre l'Etat et les départements.

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