"Il y a 300 postes vacants" et "une centaine de collectes annulées" : pourquoi les syndicats de l'Etablissement français du sang appellent-ils à la grève ?
Depuis lundi soir et jusqu'à samedi matin, les syndicats majoritaires de l'EFS, chargé de la collecte et de la distribution des produits sanguins dans toute la France, ont appelé les salariés à faire grève.
Situation de crise chez les professionnels du don du sang. Depuis un an, l'Etablissement français du sang (EFS) alerte sur les conditions de travail appliquées dans les centres et les répercussions sur la distribution des poches de sang. Après la mobilisation du 21 octobre, les trois syndicats majoritaires (CFDT, FO et SNTS CFE-CGC) sont à l'origine d'un appel à la grève depuis lundi 1er novembre à 19 heures et jusqu'à samedi matin 8 heures. Interrogée par franceinfo, Carole Foratier, déléguée centrale CFDT à l'EFS, explique les raisons de cette grève.
Franceinfo : Comment faites-vous grève ? Interrompez-vous les collectes de sang ?
Carole Foratier : Nous appelons à la grève depuis lundi soir de manière à inclure les services de nuit, mais il n'y a pas d'interruption de notre travail. Comme lors d'une grève à l'hôpital, la continuité du service est assurée. Des membres du personnel se déclarent donc grévistes et se trouvent assignés à leur poste pour assurer la collecte. Ils pourront par exemple porter un brassard pour signifier leur statut "en grève". Les activités support, comme les services administratifs, peuvent quant à elles arrêter totalement le travail.
Nous ne sommes pas souvent en grève à l'EFS donc c'est un mouvement qui devrait être assez suivi. Pour les modes d'action, on a également lancé une pétition en ligne en octobre qu'on relaie partout et on a interpellé le ministre de la Santé Olivier Véran le 9 septembre pour une demande de rencontre, actuellement toujours sans réponse.
Quelles sont vos revendications ?
Cela fait dix ans que l'EFS supprime des effectifs, que nos conditions de travail se dégradent et que la direction ne parle que d'efficience. On voudrait la fin de la suppression d'effectifs et la mise en adéquation des moyens avec nos besoins pour une bonne prise en charge des donneurs et des patients.
De plus, on a fait un bilan social et 65% du personnel se dit non satisfait de sa rémunération. Et pour cause, les grilles de salaires ne sont plus révisées depuis 2008. On va donc entrer dans la négociation de la classification. On demande également que les revalorisations salariales prévues par le Ségur de la santé s'appliquent pour tout le monde. Nous avons eu une enveloppe qui a permis d'augmenter un peu les infirmiers, les techniciens de laboratoire, mais par exemple les biologistes, indispensables à l'EFS, n'ont pas été concernés par le Ségur.
Pour l'instant, on va essayer de négocier auprès de la direction des revalorisations salariales, mais cela se fera sans enveloppe définie. A charge pour la direction de décrocher une enveloppe auprès des ministères de la Santé et du Budget.
"On demande aussi le respect de nos conditions de travail et une meilleure conciliation avec la vie privée."
Carole Foratier, déléguée centrale CFDT à l'EFSà franceinfo
On souhaite pour cela se mettre autour de la table et discuter de nos conditions de travail, de nos salaires, de ce dont on a besoin pour faire fonctionner l'EFS. Nous voulons sauver le don du sang à la française.
Quelles sont les conséquences de ces dysfonctionnements sur la collecte de sang ?
Personne ne postule pour travailler à l'EFS et ceux qui sont à l'EFS partent. Les intérimaires refusent d'être titularisés, ils sont mieux payés ailleurs. Même avec la revalorisation du Ségur, nous n'obtenons toujours pas les mêmes salaires que ce qui se fait à l'hôpital ou dans le privé. Résultat, il y a 300 postes vacants et c'est ça le problème. Le manque de personnel concerne les infirmiers, les médecins, les techniciens de laboratoire, mais ça commence à toucher d'autres professions puisqu'on a également du mal à recruter des chauffeurs qui acheminent les poches de sang par exemple. Sans ces recrutements, on ne peut plus assurer le bon fonctionnement de l'EFS.
"On a une centaine de collectes qui sont annulées actuellement."
Carole Foratier, déléguée centrale CFDT à l'EFSà franceinfo
En septembre et en octobre, on a été obligés de fermer des sites fixes de l'EFS. Le site de Châteauroux (Indre) est ainsi fermé la nuit depuis fin août à cause du manque de personnel. C'est un exemple qui se retrouve un peu partout en région.
Au niveau des stocks de sang, la situation s'améliore, mais durant le mois d'octobre, il y avait des manques. On va se retrouver dans un creux et avoir les mêmes problèmes juste avant Noël. A cause de tous ces dysfonctionnements, on a du mal à collecter le sang actuellement, on craint que, comme à l'étranger, des collecteurs privés viennent faire notre travail. Quelle éthique sera-t-elle appliquée à ce moment-là ? L'EFS a pour l'instant toujours réussi à assurer l'autosuffisance nationale et nous espérons que cela dure.
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