Cet article date de plus d'onze ans.

Fonctionnaires : les raisons de la grève

Trois syndicats de la fonction publique appellent à la grève jeudi, alors que des négociations salariales doivent s'ouvrir le 7 février.

Article rédigé par Simon Gourmellet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Plusieurs milliers de fonctionnaires avaient manifesté contre les réformes dans la fonction publique, le 21 janvier 2010. Photo prise ici dans le cortège parisien.  (JACQUES DEMARTHON / AFP)

Pour la première fois depuis son élection, François Hollande doit faire face à la grogne des 5,2 millions de fonctionnaires, un noyau dur de son électorat. Ils sont appelés par trois syndicats à cesser le travail, jeudi 31 janvier, afin de faire part au gouvernement de leur impatience, notamment en matière de pouvoir d'achat. La CGT, FSU et Solidaires, qui totalisent 40% des voix chez les agents, ont déposé des préavis de grève pour les trois versants de la fonction publique (Etat, territoriale et hospitalière).

Discrets jusqu'à présent, les syndicats de la fonction publique comptent bien se faire entendre car selon eux, il n'y a "aucun signe tangible, concret, qui nous permette de penser que les choses vont s'améliorer", estime ainsi Denis Turbet-Delof (Solidaires). Francetv info détaille leurs revendications ainsi que les (faibles) marges de manœuvre de Marilyse Lebranchu, la ministre de la Fonction publique.

Que réclament-ils ?

Salaire et pouvoir d'achat. Les syndicats réclament une revalorisation du point d'indice qui sert de base au calcul des salaires et qui est gelé depuis 2010. "Une situation catastrophique et sans précédent", déplore Jean-Marc Canon de l'UGFF-CGT, contacté par francetv info, qui réclame des mesures fortes pour redonner du pouvoir d'achat aux fonctionnaires. Selon ses chiffres, "un cadre de la fonction publique il y a vingt-cinq ans, recruté à bac +3, était payé 75% de plus que le smic", assure-t-il. "Aujourd'hui à poste équivalent, il faut un bac +5 et la rémunération est tombée à 12,5% de plus que le smic." 

Effectifs. François Hollande s'était engagé à créer 60 000 postes d'ici cinq ans dans l'Education nationale, ainsi qu'a maintenir les effectifs au sein des ministères de la Justice, et de l'Intérieur (police et gendarmerie). Des créations qui entraînent une réduction drastique dans les autres ministères, parfois au-delà du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite. Au total, 12 298 postes devraient ainsi disparaître, note Le Parisien. Résultat, entre les créations et les suppressions, il devrait y avoir 2 317 fonctionnaires d'Etat de moins en 2013. Les syndicats demandent l'arrêt de cette hémorragie. "Dans certaines administrations, comme à la direction des finances publiques, les conditions de travail sont insupportables", tempête Jean-Marc Canon.

Congés maladie. Depuis le 1er janvier 2012, le premier jour de congé maladie d'un fonctionnaire n'est plus indemnisé. Les syndicats veulent l'abrogation de cette mesure instaurée par le gouvernement Fillon. Les syndicats rappellent qu'à l'époque, le parti socialiste s'y était vigoureusement opposé.

Quelles marges de manœuvres pour le gouvernement ? 

Budget serré. La ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, a admis mardi 29 janvier "une situation difficile pour les fonctionnaires", mais a aussitôt rappelé "les contraintes budgétaires". Sa marge de manœuvre budgétaire est en effet pratiquement nulle, puisque le budget prévoit 10 milliards d'euros d'économies sur les dépenses de l'État. Or une hausse de 1% du point d'indice augmenterait de 800 millions d'euros cette masse salariale et de 1,8 milliard celle des administrations publiques, selon la Cour des comptes. Mais selon Les Echos (article payant), une hausse de 0,5% du point d'indice serait tout de même envisagée en cas de reprise de la croissance.

Sur la suppression du jour de carence sur les arrêts maladie, la ministre a plus d'espoir et pousse depuis des mois auprès de Matignon, comme le notent encore Les Echos (article payant). Mais la mesure a elle aussi un coût : 200 millions d'euros selon Le Parisien

Dialogue : jusque-là tout va bien... Si l'augmentation générale des salaires est exclue quelle que soit l'ampleur de la mobilisation de ce jeudi, des mesures symboliques ont déjà été prises ou devraient bientôt l'être. Ainsi, Marylise Lebranchu a décidé d'assouplir le recours aux heures de travail dédiées à l'activité syndicale, restreint par son prédécesseur François Sauvadet, indiquent Les Echos, et de supprimer les possibilités de renvoi pour refus de mobilité. Selon Les Echos, elle prépare également une refonte des primes de performance instaurées par Nicolas Sarkozy, que Le Parisien détaillait en 2011.

Jean-Marc Canon reconnaît de bons rapports avec le gouvernement, mais il prévient, "la fin des primes au mérite est une bonne chose, mais elle ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt". Puisque certains syndicats ont choisi d'attendre la réunion du 7 février pour se mobiliser, il n'exclut pas une mobilisation beaucoup plus large si les choses restent en l'état.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.