Usine Bridgestone de Béthune : comment l'Italie a empêché la fermeture de son site à Bari il y a sept ans
La région et la commune se sont mobilisées à l'époque auprès du constructeur. Les effectifs ont été réduits mais l'usine a pu être sauvée.
Alors que la première réunion du Comité social et économique de Bridgestone à Béthune se tient jeudi 1er octobre, les 863 employés français sont toujours plongés dans l'incertitude après l'annonce de la fermeture de leur usine. Les salariés inquiets peuvent regarder avec attention ce qu'il s'est passé en Italie il y a sept ans. En 2013, Bridgestone a déjà tenté de fermer son site à Bari, dans les Pouilles. Finalement, grâce à la mobilisation, l’usine n’a pas fermé. Elle a même recruté depuis.
Une mobilisation sous forme de boycott
Devant les grilles de l'usine Bridgestone dans la zone industrielle de la banlieue de Bari, à Modugno, les équipes du matin quittent leur poste. Paolo travaille ici depuis dix-huit ans. Il se remémore le 4 mars 2013, quand la fermeture de l'usine a été annoncée. "Le lendemain on est venu travailler, on a continué alors qu’on était détruit à tous les points de vue, psychologiquement et mentalement. On ne voulait pas que l’histoire se termine là ! On a lutté comme jamais mais sans action coup de poing", explique-t-il à franceinfo.
A l'époque, les salariés n'ont pas fait un seul jour de grève. L’action coup de poing a été menée par les institutions. La commune et la région ont lancé une campagne pour boycotter les pneus Bridgestone avec une affiche où l'on pouvait voir un sabre de samouraï enfoncé dans un pneu ensanglanté. L'image était accompagnée de cette légende : "Harakiri is not a good business."
Des négociations difficiles
A l'époque, les Japonais entament des négociations qui vont durer sept mois pour aboutir à un accord dur : 377 départs volontaires sur 935 salariés, 25 à 30% de réduction de salaire et pratiquement tous les avantages sociaux rognés. En revanche, l'usine reste ouverte et investit 40 millions d’euros avec la région et l'Etat. Avec le recul, le professeur Federico Pirro, qui conseillait alors la cellule de crise de la région, estime qu’aujourd’hui l’accord négocié a porté ses fruits. "L’entreprise a vu son chiffre d’affaires augmenter depuis plusieurs années déjà, elle est rentable et elle a même embauché", explique-t-il.
Ce qu’il faut noter c’est qu’une bonne partie de ce qu’ont sacrifié les employés est maintenant récupérée
Federico Pirroà franceinfo
Selon plusieurs salariés rencontrés devant l'usine, cela valait la peine de faire autant de sacrifices. Le très exubérant président de gauche de la région des Pouilles, Michele Emiliano, a même un conseil pour son homologue Xavier Bertrand : "Il faut être du côté des travailleurs et donc devenir un président de gauche parce que si tu es de droite c’est difficile de mener ce genre de bataille." Après ce bras de fer gagné à Bari il y a sept ans, l’usine a quasiment retrouvé le même nombre de salariés qu’à l'époque.
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