Pourquoi le gouvernement surveille de près la hausse des prix du gaz, de l'électricité et des carburants
Jean Castex doit annoncer, jeudi 30 septembre, de nouvelles mesures pour aider les Français à faire face à la flambée des prix de l'énergie.
L'exécutif monte au créneau sur la question de l'envolée de la facture énergétique. Alors qu'une nouvelle hausse des tarifs réglementés du gaz doit avoir lieu le 1er octobre et que les prix de l'électricité et du pétrole ne cessent de flamber, Jean Castex va prendre la parole, jeudi 30 septembre. Le Premier ministre pourrait y annoncer de nouvelles mesures pour aider les ménages comme les entreprises face à ces augmentations.
Après une chute des prix de l'énergie en 2020, liée à la récession due à l'épidémie de Covid-19, ces tarifs connaissent en effet un fort rebond depuis l'été. Le tarif réglementé du gaz pourrait connaître une nouvelle augmentation en novembre, après des hausses de 7,9 % en septembre et de 12,6% en octobre. Côté électricité, le tarif réglementé d'EDF devrait grimper d'environ 12% début 2022, a annoncé la ministre de la Transition écologique jeudi.
Le prix du carburant flambe aussi
Et c'est sans compter les prix du carburant, qui ont retrouvé en septembre leur niveau d'avant la pandémie de Covid-19. Depuis le 1er janvier 2021, le litre de sans-plomb 95 a augmenté de 15,8% et celui de gazole de 13,1%, rapporte ainsi France Bleu. Le litre de sans-plomb a même passé la barre des 2 euros dans une station-service de Paris, mercredi 29 septembre.
Ces hausses se conjuguent et amputent le budget de nombreux ménages français, en particulier les plus modestes. "Le cumul des carburants pour la voiture et du gaz ou du fioul pour le chauffage va vraiment se ressentir à partir de novembre ou décembre", alerte François Carlier, délégué général de l'association d'usagers Consommation logement cadre de vie, dans les colonnes du Monde.
Du point de vue des économistes, cette accélération de la hausse des prix à la consommation depuis l'été n'est pas inquiétante en soi, rapporte le quotidien dans un autre article. Selon un spécialiste interrogé par Le Monde, le taux d'inflation revient "aux alentours de 2%" depuis la sortie de la crise sanitaire, soit "l'objectif de la BCE". "Mais, pour les personnes qui avaient des revenus constants, comme les retraités, l’inflation se traduit bien par une amputation du pouvoir d’achat", nuance Alain Trannoy, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales.
La peur d'un nouveau mouvement des "gilets jaunes"
A quelques mois de l'élection présidentielle, ce phénomène inquiète particulièrement la majorité, pour qui le pouvoir d'achat est un indicateur très scruté. Malgré la crise sanitaire, cet indicateur est resté stable en 2020, en hausse de 0,4% selon l'Insee. En 2021, le pouvoir d'achat "va augmenter de 1,5% à 2%. Donnons-nous rendez-vous [en fin d'année] pour vérifier", a encore promis Jean Castex à Midi Libre, jeudi 30 septembre.
Mais en cas d'échec sur cette question, le gouvernement redoute de devoir faire face à une nouvelle crise sociale à l'approche du scrutin. "Malgré le contexte qui devrait placer le chômage en tête des préoccupations [des Français] à la rentrée, c’est le pouvoir d’achat qui apparaît comme un sujet prioritaire", relève Frédéric Dabi, directeur général de l’institut Ifop, dans Le Monde.
L'exécutif n'a pas oublié que c'est la hausse des prix du carburant qui avait déclenché le mouvement des "gilets jaunes" en 2018, ébranlant le pays durant plusieurs mois. "Cette flambée du prix de l'énergie et de l'essence est une bombe sociale à retardement qui va venir très rapidement, comme les 'gilets jaunes'", a d'ailleurs mis en garde l'ex-ministre socialiste Ségolène Royal, invitée des "Quatre Vérités" de France 2, mardi 28 septembre.
"Compte tenu de notre expérience avec les prix du carburant, c’est un vrai point de vigilance pour nous", a confirmé le député LREM Sacha Houlié au Monde. L'élu de la Vienne a ainsi regretté de voir "toute la marge gagnée sur le pouvoir d’achat avec la prime d’activité, la suppression de la taxe d’habitation, les baisses d’impôts, grignotée par la hausse du prix de l’essence, du gaz ou de l’eau".
L'opposition mobilisée sur la question
Face à ce risque de nouvelle colère sociale, l'exécutif veut se montrer réactif. Et pour cause : à sept mois de l'élection présidentielle, impossible pour la majorité de laisser l'opposition occuper seule le terrain sur les questions de l'énergie et du pouvoir d'achat. Les autres partis ont été prompts à s'exprimer sur le sujet ces dernières semaines. Le député socialiste Boris Vallaud a réclamé "des réponses conjoncturelles immédiates", quand l'eurodéputé Manuel Bompard (La France insoumise) a appelé le gouvernement à "bloquer les prix du gaz et de l'électricité".
De son côté, le sénateur Bruno Retailleau (Les Républicains) a suggéré de "relancer le programme nucléaire" français. Marine Le Pen s'en est, elle, directement pris à l'exécutif, accusant l'Etat de s'enrichir "grâce aux taxes et à la TVA sur les taxes", pendant que "les Français étouffent".
Ce qu'il y a de plus scandaleux dans les augmentations folles des prix de l'essence, du gaz, de l'électricité, c'est que grâce aux taxes et à la TVA sur les taxes, plus les français étouffent, plus l'État s'enrichit.
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) September 28, 2021
MLP https://t.co/lGWQ0CMkCF
"D'un point de vue politique, il faut faire très attention" à la question du pouvoir d'achat car "dans une élection présidentielle, les gens votent avec le porte-monnaie", a décrypté le politologue Pascal Perrineau, jeudi, sur BFMTV. Mi-septembre, le gouvernement avait d'ailleurs pris les devants et annoncé un versement de 100 euros en décembre pour les 5,8 millions de ménages bénéficiant du chèque énergie.
Quinze jours plus tard, c'est le Premier ministre lui-même qui présente les solutions du gouvernement, jeudi 30 septembre. Avec un objectif en tête, résumé par son ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, plus tôt dans la journée : "Nous assurerons notre rôle de protection des Français face à la flambée des prix de l'énergie."
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