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Info franceinfo Moyens alloués, besoins des citoyens, concurrence du privé... Ce que révèle un rapport sur l'état des services publics en France

Le collectif Nos services publics a analysé deux décennies de politiques publiques et les a comparées à l'évolution des besoins, dans l'éducation, la santé, la justice, la sécurité ou encore les transports.
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Un homme brandit une pancarte "DU FRIC POUR L'HÔPITAL PUBLIC" lors d'une manifestation à Marseille, en novembre 2020. Image d'illustration. (JEROME GILLES / NURPHOTO)

"Les moyens des services publics augmentent depuis vingt ans moins rapidement que les besoins sociaux", c'est-à-dire que les besoins des citoyens, alerte un rapport publié jeudi 14 septembre par le collectif Nos services publics, et rédigé par une centaine d'agents du service public, de chercheurs et de citoyens. 

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Selon les auteurs, les politiques publiques n'ont pas su s'adapter aussi rapidement à l'évolution de la société. "Les besoins de la société évoluent, la société se transforme et les moyens des services publics ne suivent pas, explique sur franceinfo Arnaud Bontemps, fonctionnaire et porte-parole du collectif. Depuis quinze ans, on a une contrainte croissante sur les moyens, sur les dépenses des services publics, moins de fonctionnaires, moins d'impôts, qui créent un décalage croissant, un fossé." Le secteur privé en profite donc pour se développer, en proposant une réponse à ces besoins non assouvis. "C'est dans cet écart que s'ouvre un espace pour le secteur privé, poursuit Arnaud Bontemps. Et en retour, ce développement du secteur privé vient déstabiliser le service public."

Pour arriver à ce constat, le rapport s'appuie sur l'analyse de deux décennies de politiques publiques, en comparaison à l'évolution des besoins dans l'éducation, la santé, la justice, la sécurité ou encore les transports. Tour d'horizon des grands axes de l'étude.

Santé : "Un contournement du public par le privé"

Le nombre annuel de passages aux urgences est passé de 17 millions en 2010 à 21 millions en 2019, soit une hausse de "plus de 20% en moins de dix ans". Le vieillissement de la population et la "croissance massive" des maladies chroniques pèsent sur le système de santé, alertent les auteurs du rapport. Cela "nécessite une meilleure coordination et répartition des soins". Dans les dix dernières années, dix départements déjà en surdensité médicale relative ont vu leur nombre de médecins par habitant augmenter, quand 48 départements en dessous de la moyenne nationale voyaient leur nombre de médecins par habitant diminuer.

Dans le même temps, les cliniques privées "augmentent leur place". Selon Arnaud Bontemps, on assiste ainsi à "un contournement du secteur public par le secteur privé". "Le secteur privé, notamment les cliniques à but lucratif, se concentre, sur la chirurgie, c'est-à-dire les actes qui sont très programmables et très rentables. On laisse à l'hôpital public les patients les plus précaires, les urgences et les soins les plus lourds, par exemple la réanimation." Se développe ainsi un système avec deux modèles différents "selon qu'on a les moyens ou non d'aller contourner le service public".

Justice et sécurité : la "sécurité du quotidien" délaissée

Concernant la justice et la sécurité, le "sentiment d'insécurité ressenti par la population demeure élevé". Mais malgré l'augmentation des moyens alloués, les auteurs notent une "dégradation de la qualité et de l'efficacité de la réponse judiciaire". Le délai de jugement d’une affaire civile devant le tribunal de grande instance, par exemple, est passé de sept mois en 2005 à 14 mois en 2019.

Les effectifs des forces de sécurité ont augmenté de manière importante entre 2010 et 2020, en particulier dans la lutte contre l’immigration illégale (+31%) et dans le maintien de l’ordre public (+10%), alors qu’ils ont baissé de 10% dans la sécurité et la paix publiques, ce qui est la sécurité du quotidien. D'où ce paradoxe pointé par le rapport : malgré une décrue continue des faits de violence et l’augmentation des effectifs, le sentiment d'insécurité persiste chez les Français.

Éducation : le public transformé en "service minimum et dégradé"

Le rapport décrit une "massification" de l'éducation : il y a de plus en plus de bacheliers et d'étudiants. Le taux de bacheliers pour une génération a été multiplié par quatre depuis les années 1980, et la proportion de diplômés du supérieur a été multipliée par deux en 25 ans chez les 25-34 ans. Les augmentations de moyens ponctuelles n’ont pas suffi à compenser l’accumulation de lacunes structurelles, ce qui a significativement pesé sur l’attractivité du métier d’enseignant et, partant, la qualité du système éducatif. Les politiques publiques en matière d'éducation ne "parviennent pas à se renouveler" pour prendre en compte ces inégalités et le bien-être des élèves, insiste le rapport. 

Dans ce contexte, de plus en plus de parents se rabattent sur les écoles privées et les cours particuliers, mais il s'agit majoritairement des "familles favorisées". La "part des enfants à fort capital culturel" dans les écoles privées sous contrat est passée de "29% en 2003 à 40% en 2021".  Or, la dépense publique est la même pour les élèves de l’enseignement privé et ceux de l’école publique.

D'après les auteurs du rapport, les services privés sont plus coûteux pour l'État, et ils ne permettent pas un "accueil inconditionnel", contrairement au service public. Les inégalités ont donc encore tendance à se creuser. "Ce développement d'un service privé entraîne progressivement la transformation du service public en un service minimum et dégradé, et, donc, la perte progressive de sa vocation universelle", alerte le collectif. 

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