Soupçon de pollution chez ArcelorMittal : "une histoire malheureusement banale dans la sidérurgie", selon une association environnementale
Un ancien chauffeur de camion qui travaillait pour ArcelorMittal à Florange (Moselle) affirme avoir volontairement déversé de l'acide dans la nature. Ce n'est pas un phénomène nouveau, d'après le porte-parole de l'association Robin des Bois.
Un homme qui travaillait comme chauffeur intérimaire pour un sous-traitant d'ArcelorMittal à Florange (Moselle), s'est filmé déversant des centaines de mètres cubes d'acide dans la nature, plus précisément dans un crassier qui sert de dépotoir de l'usine sidérurgique de l'entreprise. Il affirme dans un témoignage anonyme avoir agi de décembre 2016 à février 2017 avec la complicité de salariés de l'usine sidérurgique. Sa direction l'a licencié pour rupture de discrétion commerciale. Jacky Bonnemains, porte-parole de l'association Robin des Bois, une association de défense de l'environnement à l'origine entre autres d'un "Atlas de la France toxique", assure que ce témoignage n'est "malheureusement" pas nouveau.
franceinfo : Est-ce que cette histoire vous étonne ?
Jacky Bonnemains : Non, elle ne nous étonne pas. Nous recevons de temps en temps des témoignages, en direct, de chauffeurs à qui on demande d'envoyer dans des décharges de déchets non-dangereux des déchets qu'ils savent dangereux. Le dernier appel qu'on a reçu il y a quelques semaines, c'était une chauffeuse de camion à qui on demandait d'envoyer des broyats de tubes cathodiques de téléviseurs contenant du plomb dans une décharge banale, alors qu'elle savait que ces déchets devaient aller dans un centre de stockage de classe 1. Le détenteur souhaitait économiser de l'argent. Dans une décharge banale, la tonne est facturée 30 euros et dans une décharge de classe 1, elle est facturée 200 euros. Cette histoire de décharge interne chez ArcelorMittal est, malheureusement, une histoire banale dans la sidérurgie. Le site fait presque 1 km2. Il est considéré comme une décharge interne, y compris par l'administration. Les services de l'Etat n'ont pas les moyens humains et techniques, alors qu'il suffirait de mettre des caméras sur site, comme dans les forêts en Inde pour repérer les passages des braconniers, afin de détecter les mouvements incontrôlés et les combines des industriels.
Est-ce le sous-traitant qui est en cause ?
Oui, plusieurs sous-traitants. On a reçu un témoignage l'année dernière d'un chauffeur originaire du Maghreb qui s'est fait licencier de [l'un de ces sous-traitants] parce qu'on lui avait donné l'ordre de mettre dans le fossé des déchets relativement toxiques. Il nous a alertés. On a essayé de l'aider. La Dreal [direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement] a dressé un procès-verbal à l'encontre de cette entreprise qui est l'un des sous-traitants cités dans la nouvelle affaire d'Arcelor. Il y a donc certains sous-traitants plus habitués à ce genre de pratique.
Les sanctions sont-elles rares dans ces dossiers ?
Oui, elles sont rares. Ce sont de simples procès-verbaux, de vagues mises en demeure. Il n'y a pas de sanctions financières dissuasives. Les services de l'Etat sont plus ou moins au courant et complices de ce genre de pratiques, surtout quand il s'agit de sauver des grands sites créateurs d'emplois et en difficulté financière, comme celui de Florange.
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