"On est considérés comme des vieux torchons" : l'amertume des salariés des grands hôtels parisiens, menacés de licenciements
Des plans sociaux sont annoncés les uns après les autres dans les grands établissements hôteliers parisiens, actuellement désertés pour cause de Covid-19. Entre stress et inquiétude, certains estiment que la crise sanitaire actuelle ne peut pas à elle seule tout expliquer.
Une vague de licenciements est redoutée en 2021 dans des grands hôtels parisiens. Ils sont quasiment vides à cause de l'épidémie. Le ministère de l'Économie prévoit pourtant de relever le plafond d'aide pour les hôtels et restaurants, notamment via le fond de solidarité - probablement à trois millions d'euros par an - mais l'avenir reste sombre pour le monde hôtelier.
Rendre le badge, le tablier, Salvatore Cotonné s'y prépare. Cuisinier depuis 18 ans au Méridien de la Porte Maillot à Paris, un hôtel 4 étoiles de 1 000 chambres, il redoute de recevoir sa lettre de licenciement. "En ce moment, c'est beaucoup de stress, beaucoup d'anxiété, beaucoup de questions aussi. On se demande qui va partir. C'est vrai que l'attente est très, très pesante depuis l'annonce du PSE [Plan de sauvegarde de l’emploi]." Depuis l'annonce en novembre par la direction du Méridien de la suppression de plus de 200 postes sur 500, Salvatore, qui est aussi délégué CGT du personnel, rumine. "C'est de la colère, c'est le manque de considération."
"On sort par la petite porte. C'est rageant, on se dit que c'est juste pour faire des économies et pour anéantir un petit peu cette famille-là. Cette bonne entente."
Salvatore Cotonné, délégué CGT du personnelà franceinfo
Il rajoute : "Les sacrifices, je les ai faits. Maintenant on est considérés comme des vieux torchons."
Son hôtel n'est pas le seul concerné. Les plans sociaux tombent les uns après les autres dans les plus grands établissements de la capitale : le Westin de la place Vendôme ou encore les Hyatt du Louvre et des Champs-Élysées. Des établissements désertés, d’après les directions, à cause de l'épidémie. Un prétexte, estime Didier Del Rey, secrétaire Union CGT- commerce de Paris. "Il se servent aussi [du contexte] pour baisser la masse salariale et quand ça ira mieux reprendre du personnel payé au plus bas, c’est-à-dire au SMIC hôtelier. Ce que je trouve aberrant, c'est qu’on fait une procédure de licenciement économique, sachant que l'on a tout pour pouvoir faire garder ses salariés tout en étant en activité partielle."
Un secteur pourtant soutenu
Il y a le chômage partiel, le prêt garanti par l'État, le fonds de solidarité mais ça ne suffit pas pour faire face d'après Emmanuel Sauvage, vice-président du Groupement national des indépendants de l'hôtellerie restauration en Ile-de-France, lui-même patron de plusieurs hôtels. "On est depuis bientôt un an à pratiquement zéro chiffre d'affaires, à payer les charges fixes, les loyers, bien évidemment, les échéances d'emprunt. L'hôtellerie souffre énormément. On ne sait pas pour combien de temps donc ça va être très, très long."
"Le risque actuel, ce n'est pas de perdre des emplois, c’est de perdre la société et de perdre tous les emplois."
Emmanuel Sauvage, vice-président du Groupement national des indépendants de l'hôtellerie restauration en Ile-de-Franceà franceinfo
Donc, il faut prendre parfois des décisions douloureuses pour pouvoir sauver un maximum d'emplois." Il réclame à l'État de prolonger les aides même après la crise, le temps de retrouver toute la clientèle étrangère.
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