"J'ai découvert la joie d'être à la maison le soir" : avec le Covid-19, le secteur de la restauration craint un manque de main-d'œuvre
Avec les fermetures prolongées, des salariés de la restauration ont pris conscience de la difficulté du métier. Des restaurateurs s'inquiètent de ne pas revoir une partie du personnel lors de la reprise.
Cela fait 20 ans que Romuald travaille en cuisine. Un "métier passion" dit ce chef parisien également père de famille. Il a connu trois mois de chômage partiel au printemps dernier, puis quatre mois depuis l'automne en raison de l'épidémie de Covid-19. De longues pauses qui lui ont fait prendre un peu de recul. "J'ai découvert mes enfants, explique Romuald. J'ai découvert la joie d'être à la maison le soir, de prendre soin de ma famille, de cuisiner pour elle. Cette crise m'a permis de remettre en question le métier. C'est un métier qui nous donne beaucoup mais qui nous prend beaucoup, et on se demande : 'Est-ce qu'on va continuer ?'"
Romuald envisage notamment de se reconvertir dans le vin. Avec les fermetures prolongées, une partie des salariés serait en train de quitter le secteur et ne souhaiterait plus y revenir. Des restaurateurs, déjà confrontés à des difficultés de recrutement, craignent que cela complique la reprise. C'est l'un des arguments mis en avant pour demander une réouverture partielle des restaurants fin mars. Une demande formulée dans une tribune dans le Journal du Dimanche par une quarantaine de députés de tous bords.
"Des activités quand même difficiles"
Du personnel qui ne reviendrait pas, c'est une vraie crainte pour Franck Meunier, propriétaire d'une douzaine de restaurants et bars dans l'est de la France : "On a des gens qui sont des véritables bosseurs et des gens qui ont eu vraiment du mal à s'arrêter, qui, en parallèle bien souvent, ont trouvé un autre travail pour ne pas s'arrêter parce qu'ils sont rentrés dans des formes de dépression. Le risque est que leur nouveau travail leur plaise et qu'ils ne reviennent pas dans nos activités. Des activités qui sont quand même difficiles."
Des salariés de la restauration qui se tournent vers la grande distribution ou l'intérim explique Jacques Chomentowski, patron de restaurants et président délégué de l'Umih 67, groupement d'hôtelliers restaurateurs du Bah-Rhin. Le restaurateur redoute que cela n'accroisse les habituelles difficultés de recrutement dans le secteur : "J'ai déjà des collègues qui essayent de faire travailler leurs gens pour de la vente à emporter. Quand ils leur demandent de venir le week-end, ils répondent que ça ne va pas, parce qu'ils sont en famille. On a habitué des gens à être trois ou quatre mois à la maison, à toucher des salaires et à ne rien faire."
"La solution pour moi, c'est de rouvrir le plus vite possible."
Jacques Chomentowskià franceinfo
Un constat partagé par le GNI, l'autre fédération professionnelle du secteur. Son président Didier Chenet pointe un "risque de manque" de main-d'œuvre à la réouverture. Il demande au gouvernement un "plan spécial de formation" des personnels pour la reprise.
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