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Hygiène dans les restaurants : "Aux yeux des inspecteurs, rien n'est jamais parfait", réagit un restaurateur épinglé

Le site internet Alim'confiance a publié, lundi, les résultats des contrôles sanitaires menés dans 400 000 établissements alimentaires (restaurants, cantines, boucheries...). Franceinfo s'est rendu dans une brasserie parisienne où "l'hygiène doit être améliorée".

Article rédigé par franceinfo - Licia Meysenq
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Onze restaurants parisiens sont visés par le site Alim'confiance pour insuffisance en matière d'hygiène. (JEAN HARIXCALDE / ONLY FRANCE)

"J'ai peur de perdre ma clientèle." Bernard* a beau tenter de garder son sourire et son air professionnel, il peine à masquer son inquiétude. Son troquet parisien s'est fait épingler pour des problèmes d'hygiène, lundi 3 avril, par le site internet Alim'confiance, qui révèle au public le résultat des enquêtes menées dans la restauration par des inspecteurs de l'hygiène de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). A Paris, onze établissements sont visés par le site pour insuffisance en matière d'hygiène. Beaucoup d'établissements concernés ont refusé de recevoir franceinfo, coupant court, parfois violemment, à la conversation.

>> Ce qu'il faut savoir sur le site qui vous informe du niveau d'hygiène de votre restaurant préféré

Bernard, lui, comprend la démarche d'Alim'confiance. "C'est une bonne chose que tout le monde ait accès à ce classement, surtout quand on voit ce qui se fait dans certains endroits", assure-t-il. Pourtant, sa brasserie a récolté une mention "hygiène à améliorer". Si un restaurant est classé dans cette catégorie, cela n'induit pas, en théorie, de risque pour la santé des consommateurs. Mais cette note indique qu'il est classé parmi les 10% des pires établissements français.

Fuite au plafond et carrelage décollé 

Le quinquagénaire ne remet pas en cause ce classement, devenu public : "Il y a quelques petits détails à corriger, mais aux yeux des inspecteurs, rien n'est jamais parfait", déplore-t-il. Dans son restaurant, la cuisine est loin d'être immaculée. Une tache d'humidité, réminiscence d'une fuite d'eau, est visible au plafond. Au sol, les carreaux de carrelage, sur lesquels on distingue des traces de boue, sont décollés. "Tout devrait être réglé dans la semaine", promet le quinquagénaire. Avec vingt-cinq ans d'ancienneté, il veille au grain. Le restaurant, inspecté le 6 mars, a obtenu un délai de trois mois pour se mettre en conformité. La bonne nouvelle : les inspecteurs n'ont relevé aucun risque sanitaire. "Je ne veux pas avoir le risque de rendre des gens malades sur la conscience", pointe le restaurateur. 

Bernard veut montrer qu'il applique "à la lettre" les recommandations des experts. Non sans rouspéter : "Elles sont de plus en plus nombreuses chaque année." Il montre un réfrigérateur flambant neuf où sont stockés les produits laitiers. "Il faut les séparer de la viande maintenant", grince-t-il. La chambre froide est luisante, les équipements dernier cri. "Il faut aussi prendre la température de chaque produit qui est livré le matin, détaille-t-il en rappelant qu'il n'avait pas à se conformer à ces exigences il y a dix ans. La France est l'un des pays les plus procéduriers en matière de protocole." 

"Tout est en ordre, sinon le restaurant serait fermé"

A l'étage, la salle est quasiment vide. Les nappes rouges contrastent avec les énormes ardoises qui annoncent des plats typiquement français. On vient ici pour manger des œufs mayonnaise, une douzaine d'escargots ou encore du poulet aux champignons. "Les frites étaient bonnes", reconnaît un couple de vacanciers entré dans l'établissement par hasard. "C'était tout à fait correct, sauf le vin, peut-être", confient-ils. Les rares autres clients ont tous choisi cet établissement au dernier moment, en déambulant dans le Quartier latin, l'un des plus touristiques de la capitale.

"Ici, c'est le centre du monde", sourit Bernard. Il reconnaît que la clientèle est principalement composée de touristes, "même s'il y a quelques habitués". Il montre fièrement les ouvrages dédicacés par certains auteurs de la maison d'édition Actes Sud, toute proche.

Je suis confiant, j'espère que les gens ne s'arrêteront pas à cet avis négatif.

Bernard, restaurateur épinglé par le site Alim'confiance

à franceinfo

Pourtant, le couple de clients que nous avons rencontré est catégorique : "Si nous avions su pour les conditions d'hygiène, nous aurions choisi un autre restaurant." 

Sur le site Alim'confiance, le client n'a pas accès au rapport complet des services d'hygiène, mais seulement à une mention, graduée de "très satisfaisant" à "à corriger de manière urgente". "Sans le détail de ce qui ne va pas, il est difficile de ne pas faire d'amalgame, ça prête à confusion", reprend Bernard. Il a peur que son établissement soit considéré comme insalubre alors que, selon lui, les problèmes d'hygiène concernent seulement de petits détails. "Je respecte la chaîne du froid, je suis très à cheval sur la propreté des trois cuisiniers : tout est en ordre, sinon le restaurant serait fermé". La qualité de la nourriture n'est pas mise en cause par l'enquête. "La preuve : le ministère de l'Agriculture, à l'origine des enquêtes sanitaire, a réservé chez nous une table pour 27 personnes dans quelques mois", s'amuse Bernard, avant de glisser : "J'ai deux mots à leur dire."

* Le prénom a été modifié.

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