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Harcèlement de rue, âge du consentement... Ce que prévoit le projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes

Franceinfo revient sur les quatre principales mesures de ce projet de loi, présenté en Conseil des ministre, mercredi, par Marlène Schiappa et Nicole Belloubet. 

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La secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, le 21 novembre 2017 à l'Assemblée nationale, à Paris.  (BERTRAND GUAY / AFP)

"Notre société toute entière est malade du sexisme." C'est ce qu'affirmait Emmanuel Macron, en novembre dernier, alors que la France prenait conscience de l'ampleur du phénomène grâce au mouvement #BalanceTonPorc. Cinq mois après cette onde de choc, le gouvernement présente son arsenal législatif pour lutter contre les violences sexuelles et sexistes. La secrétaire d'Etat à l'égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, et la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, doivent présenter, mercredi 21 mars, un projet de loi allant dans ce sens lors du Conseil des ministres. Franceinfo fait le point sur les principales mesures du texte.

Une infraction d'"outrage sexiste" va être créée

C'est la mesure phare du projet de loi. Pour lutter contre les insultes sexistes ou les agressions sexuelles qui visent de nombreuses femmes dans l'espace public, le gouvernement prévoit de sanctionner le harcèlement de rue en créant une nouvelle infraction d'"outrage sexiste". Elle pourrait être punie d'une contravention allant de 90 à 750 euros, infligée par la police uniquement en cas de flagrant délit. 

"Ce sont tous les actes qui créent des situations malaisantes, humiliantes ou intimidantes pour les hommes et les femmes dans l’espace public, a expliqué Marlène Schiappa en février. Comme par exemple vous suivre dans la rue, vous demander à dix reprises votre numéro de téléphone, s’approcher de vous et entrer dans votre espace intime, ou encore vous intimider."

Certains observateurs doutent de l'applicabilité de la mesure, notamment parce que les amendes ne peuvent être mises qu'en cas de flagrant délit. Interrogée sur ce point par Ouest-France, la secrétaire d'Etat assure que "10 000 policières et policiers, recrutés dans le cadre de la police de proximité, seront formés pour sanctionner ce délit". "Avec l'amende (...), il y a un stage de prévu pour que les harceleurs fassent à leurs frais un stage contre le harcèlement et les violences sexistes et sexuelles", a également affirmé Marlène Schiappa, sur Europe 1

L'âge du consentement sexuel sera de 15 ans

C'est la mesure qui suscite le plus de débats. Elle intervient après la plainte pour viol des parents d'une jeune fille de 11 ans ayant eu des relations sexuelles avec un homme de 28 ans. Estimant que la collégienne était consentante, le parquet avait dans un premier temps renvoyé l'homme pour "atteinte sexuelle" devant le tribunal correctionnel de Pontoise (Oise) qui s'est finalement déclaré incompétent.

Cette affaire a suscité une très grande émotion et plusieurs associations ont appelé a fixer une limite d’âge en dessous de laquelle un enfant est jugé trop immature pour consentir à une relation sexuelle avec un adulte. Une limite fixée à 13 ans a d'abord été pressentie, mais Emmanuel Macron et Marlène Schiappa ont finalement décidé de l'établir à 15 ans dans le projet de loi. Un problème pour certains magistrats et associations, craignant de voir des jeunes adultes condamnés automatiquement parce qu'ils auraient des relations – même consenties – avec des mineurs, par exemple âgés de 14 ans.

Finalement, le 13 mars, le Conseil d'Etat a modifié la mesure pour que, dans ce type d'affaire, les faits ne soient pas automatiquement qualifiés de viol par l'institution judiciaire. "Lorsque les faits seront commis sur un mineur de [moins de] 15 ans, la contrainte morale ou la surprise peuvent résulter de l’abus de l’ignorance de la victime ne disposant pas de la maturité ou du discernement nécessaire pour consentir à ces actes", énonce désormais le projet de loi, comme le révèle Le Monde. "L’objectif, en insistant sur l’immaturité des mineurs de moins de 15 ans, est de faciliter la condamnation pour viol par un majeur, tout en écartant de possibles condamnations 'automatiques'", précise le journal.

La prescription sera allongée pour les crimes sexuels sur mineurs

Le projet de loi doit aussi allonger le délai de prescription des crimes sexuels commis à l'encontre des mineurs. Actuellement fixé à 20 ans après la majorité de la victime, celui-ci doit passer à 30 ans. Une femme ou un homme violé pendant son enfance aura donc jusqu'à la veille de ses 48 ans pour porter plainte. Cet allongement avait été recommandé début 2017 par une mission co-présidée par un magistrat et par l'animatrice Flavie Flament, qui avait révélé avoir été violée dans son adolescence.

Les sanctions en cas de cyberharcèlement seront renforcées

Marlène Schiappa a récemment annoncé un quatrième volet dans le projet de loi, visant à "renforcer les condamnations" en matière de cyberharcèlement, dont sont particulièrement victimes les femmes. D'après Le Monde, le texte prévoit que le harcèlement soit constitué "lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime de manière concertée par plusieurs personnes, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée".

L'idée : lutter contre les "raids numériques" en permettant de poursuivre les personnes qui participent à des campagnes de harcèlement en groupe sur les réseaux sociaux, même s'ils n'ont pas agi de manière répétée. Aujourd'hui, si une personne envoie un seul message violent lors d'une campagne de lynchage numérique, elle ne peut être poursuivie pour harcèlement, car il n'y a pas eu de répétition. La loi devrait changer cela.

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