"Fixer l'âge du consentement à 15 ans risque de limiter la liberté sexuelle des jeunes", s'inquiète le Planning familial
Le gouvernement a annoncé qu'il proposera l'âge de 15 ans comme seuil de non-consentement à une relation sexuelle. Le Planning familial s'inquiète de cette disposition.
La secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa a annoncé, lundi 5 mars, que le gouvernement proposerait l'âge de 15 ans comme seuil de non-consentement à une relation sexuelle. Cette limite, en deçà de laquelle un mineur ne pourra pas être considéré comme consentant, figurera dans le projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes qui sera présenté à la fin du mois. Le Planning familial s'inquiète toutefois de cette mesure, qui pourrait entraver la liberté sexuelle des jeunes. Franceinfo a interrogé la coprésidente de l'association, Véronique Séhier.
Franceinfo : Pourquoi le Planning familial s'inquiète-t-il de la proposition du gouvernement de fixer le seuil du non-consentement à l'âge de 15 ans ?
Véronique Séhier : Fixer un âge de consentement risque de limiter les libertés sexuelles des jeunes. Prenons l'exemple d'une mineure de 14 ans et 9 mois qui aurait des rapports consentis avec son copain, âgé de 18 ans et un mois. Si les parents de la jeune fille le découvraient et portaient plainte pour viol, cette nouvelle disposition mettrait en grande difficulté ces deux jeunes. Ces relations sexuelles seraient illégales, même en étant consenties.
Il est très difficile de fixer un seuil arbitraire à partir duquel on considère que les jeunes peuvent ou non avoir des relations sexuelles.
Véronique Séhier, coprésidente du Planning familialà franceinfo
Plutôt que de parler d'âge du consentement, il faudrait s'interroger sur le discernement. Certains jeunes n'ont pas vraiment conscience de ce qu'ils font alors qu'ils ont dépassé les 15 ans, et d'autres ont des rapports consentis et responsables à 14 ans.
Les conséquences seraient-elles uniquement juridiques ?
Non. Les centres de planning familial accueillent régulièrement des mineurs de moins de 15 ans, seuls ou en couple, qui viennent se renseigner parce qu'ils se sentent prêts à avoir des relations sexuelles. Aujourd'hui, la loi leur garantit d'avoir accès à la contraception et aux protections contre les infections sexuellement transmissibles (IST), sans que leurs parents soient au courant.
En fixant un âge limite de non-consentement, on risque de décourager ces jeunes dans leur démarche de responsabilisation. Cela peut être un véritable frein à la prévention des IST et des grossesses non désirées.
En poussant ces jeunes à avoir une vie sexuelle cachée, on risque de créer des situations de danger et de violences.
Véronique Séhier, coprésidente du Planning familialà franceinfo
Comment peut-on mieux protéger les mineurs ?
Actuellement, il faut prouver que la victime d'un viol ou d'une agression sexuelle n'était pas consentante pour que son agresseur soit condamné. Nous proposons de renverser la charge de la preuve, afin que les victimes de moins de 18 ans qui entament des poursuites soient présumées non consentantes et que ce soit à l'agresseur présumé de prouver qu'elles l'étaient. Aucune victime d'agression sexuelle ne devrait avoir à prouver qu'elle a bien été agressée, parce qu'elle n'est pas responsable. Cela permettrait en outre de protéger les jeunes jusqu'à 18 ans et pas seulement les moins de 15 ans.
Nous préconisons aussi de renforcer l'éducation à la vie sexuelle et affective. Pour l'instant, cela n'apparaît pas dans le projet du gouvernement, alors qu'il est primordial d'évoquer ces questions dès le plus jeune âge pour accompagner ces mineurs et leur permettre d'intégrer, notamment, la notion de consentement.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.