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Document France 2 Révélations sur l'opération Sirli en Egypte : l'ex-directeur du renseignement militaire français confirme l'existence d'une mission secrète

Depuis les révélations, par le site d'investigation Disclose, d'une opération secrète de la France en Egypte, les autorités françaises se murent dans le silence. Du ministère de la Défense à l'Elysée en passant par le Quai d'Orsay, tous invoquent le secret défense. Mais un homme-clé confirme l'existence de cette mission, dans une interview exclusive accordée la semaine dernière à "Complément d'enquête".

Article rédigé par franceinfo - Hugo Plagnard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Dans une interview exclusive accordée à "Complément d'enquête", diffusé le 25 novembre 2021, le général Gomart, ex-patron des services secrets de l'armée française, confirme l'existence d'une mission secrète en Egypte.  (FRANCE 2)

Juillet 2015. Le général Christophe Gomart accompagne Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, en visite officielle au Caire (Egypte). Sur fond de ventes d'armes, la France accepte alors discrètement d'aider l'Egypte à surveiller sa frontière avec la Libye, un pays en plein chaos depuis la chute du colonel Kadhafi. 

>> Les dessous d'une mission secrète entre la France et l'Egypte : regardez les révélations de "Complément d'enquête", jeudi à partir de 23 heures

Interrogé par le magazine de France 2 "Complément d'enquête" (en partenariat avec le site d'investigation Disclose), l'ancien patron de la direction du renseignement militaire (DRM), les services secrets de l'armée française, confirme au cours d'une interview organisée la semaine dernière l'existence de cette coopération militaire avec les Egyptiens : "Ils voulaient s'assurer qu'il n'y ait pas de groupes jihadistes (…) qui arrivent de Libye en particulier. C'est quand même une région qui est bien déstabilisée", se souvient-il.

Une mission secrète détournée de son objectif initial

Selon le général Gomart, les deux pays signent alors un accord de coopération pour traquer les terroristes. Et la direction du renseignement militaire se voit confier une mission secrète. Nom de code "Sirli". "En termes de renseignement, (les Egyptiens) n'ont pas d'imagerie satellitaire et pas forcément les mêmes moyens que l'armée française", nous explique-t-il.

seq sonore gomart

Début 2016, à bord d'un avion équipé de matériel d'interception de communications et d'une puissante caméra, les soldats de la DRM survolent l'Ouest égyptien à la recherche de pick-up suspects et de terroristes. Les soldats français partagent ensuite leurs écoutes et leurs images avec les Egyptiens. Mais très vite, les hommes de la mission Sirli se rendent compte que leurs partenaires ne s'intéressent qu'aux trafiquants et autres contrebandiers qui traversent cette frontière qui court en plein désert sur plus de 1 200 km. Jamais à d'éventuels terroristes, selon les documents confidentiels que nous avons pu consulter.

Des inquiétudes des soldats français

Surtout, les Français s'inquiètent dès les premiers mois de leur mission. Selon eux, leurs informations pourraient être utilisées pour guider des bombardements au sol, contrairement à ce que prévoit l'accord signé avec l'Egypte. En septembre 2016, l'équipe de la DRM constate ainsi la destruction d'un véhicule quelques minutes après l'avoir signalé aux Egyptiens. Dans une note confidentielle que nous nous sommes procurée, les soldats français alertent : "La frappe a très probablement été perpétrée" par un avion repéré dans le secteur, et dont "la présence atteste de la volonté de l'armée de l'air égyptienne d'utiliser les informations (de Sirli) à des fins répressives contre le trafic local", écrivent-ils. 

Interrogé sur ces bombardements, l'ancien patron de la DRM est formel : "A ma connaissance on n'a jamais donné de renseignement qui a ensuite permis d'exécuter des gens." Mais il tempère aussitôt : "Que du renseignement qu'on a fourni ait ensuite eu des conséquences potentiellement sur des terroristes, je l'espère, ou sur des trafiquants d'armes ou d'êtres humains : c'étaient des gens qui étaient des combattants potentiels pour les jihadistes et les autres c'étaient des gens qui étaient des 'bad guys'."

Christophe Gomart a quitté l'armée et pris sa retraite à l'été 2017. Mais l'opération Sirli s'est poursuivie sous le quinquennat d'Emmanuel Macron.

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