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Témoignage "On monte les brebis plus tôt" : quand les transhumances font les frais du réchauffement climatique

Le dérèglement climatique a des conséquences sur la biodiversité de la montagne et donc des impacts indirects sur les transhumances. Les éleveurs sont contraints de s'adapter.

Article rédigé par franceinfo - Hugo Charpentier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les brebis de Paul Delatour dans son exploitation de Saverdun (Ariège), en juin 2022. (HUGO CHARPENTIER / RADIO FRANCE)

Dans cette élevage de brebis à Saverdun (Ariège), 1 200 animaux attendent de monter dans les Pyrénées en profitant d'une vue imprenable sur la montagne, mercredi 1er juin. La montée à l'estive est en effet pour bientôt puisque les premières transhumances se déroulent en ce week-end de Pentecôte. Cette activité ancestrale attire chaque année des dizaines de milliers de curieux. 

Avant de monter vers les pâturages, il faut d'abord préparer le troupeau. "On met des cloches sur les brebis, ce qui nous permet de les retrouver notamment à la descente de l'estive", décrit Théo Roussillon, salarié agricole de l'exploitation. Au total, il doit poser 80 cloches. "J'attrape la brebis, je la tiens et je lui mets le collier en essayant de faire en sorte que ça ne la serre pas trop", décrit-il. En effet, il faut anticiper : "Pour l'instant, elle n'a pas beaucoup de laine mais quand elle va monter en estive, la laine va pousser au fur et à mesure. Il faut donc éviter de trop serrer le collier pour que la brebis ne s'étouffe pas ou qu'elle n'ait pas d'échauffements au niveau du cou." L'homme de 21 ans en est déjà à sa cinquième transhumance. 

"C'est un savoir-faire qui se fait depuis des années. Aujourd'hui, reproduire ça sur un grand troupeau, c'est génial."

Théo Roussillon, salarié agricole dans un élevage de brebis

à franceinfo

Le grand départ est en cours de préparation. "Des camions viennent chercher les bêtes sur l'exploitation et les amènent au pied de la montagne", décrit Paul Delatour, qui dirige cette exploitation. "Ensuite, on a une petite journée de marche pour arriver sur les hauts sommets pyrénéens."

Sécheresse, températures élevées...

Son père faisait la même chose que lui : emmener les brebis rejoindre les verts pâturages. Mais la tradition change un peu car, justement, les pâturages ne sont pas toujours aussi verts. Les effets du réchauffement climatique se font sentir : "On monte les brebis plus tôt. Avant, on les montait fin juin. Maintenant, on monte début juin parce que la neige fond plus vite. Il y a aussi des problèmes d'eau, liés en particulier à l'abreuvement des bêtes, plus tôt dans la saison". 

À partir du 1er août, on peut parfois avoir des soucis avec des ruisseaux qui sont à sec alors que ce n'était pas le cas les années précédentes."

Paul Delatour, propriétaire d'un élevage de brebis en Ariège

à franceinfo

La perspective d'un été chaud et sec inquiète cet éleveur. "On s'attend toujours à des étés plus chauds, avec des pics de température plus élevées. C'est un problème car, malheureusement, on n'a aucune prise." Ce sont surtout les pics de chaleur qui sont problématiques. "Ils font souffrir les animaux." Paul Delatour s'interroge : "La question c'est jusqu'à quand ? Pour combien de temps ? Et à quel moment ça va casser ? Ça ne crée pas vraiment de sérénité. On est anxieux par rapport à ça mais pas en tant que paysans, en tant que citoyens." Afin de s'adapter à cette nouvelle donne climatique, certains éleveurs envisagent de réduire la taille de leur troupeaux et donc leur activité.

"On monte les brebis plus tôt" : quand les transhumances font les frais du réchauffement climatique. Le reportage d'Hugo Charpentier.

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