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Insécurité alimentaire : sans une "réponse diplomatique internationale, la situation va empirer", alerte l'association CCFD-Terre Solidaire

Alors que l'Organisation des Nations unies a alerté jeudi sur l'augmentation des prix mondiaux des denrées alimentaires, "il n'y a aucune coordination internationale de réponse à cette crise", a déploré sur franceinfo l'association CCFD-Terre solidaire.

Article rédigé par franceinfo
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Un agriculteur palestinien montre sa récole de blé le 7 juin 2020 près de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. (SAID KHATIB / AFP)

L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a alerté jeudi 4 novembre sur la nouvelle augmentation des prix mondiaux des denrées alimentaires en octobre. Ceux-ci ont atteint leur plus haut niveau depuis juillet 2011. "Il est urgent qu'il y ait une réponse diplomatique internationale", a plaidé jeudi sur franceinfo Valentin Brochard, chargé de plaidoyer souveraineté alimentaire chez CCFD-Terre Solidaire. Il attend que la France "porte cette coordination interétatique". En cas de politique protectionniste de certains Etats, Valentin Brochard estime que "la situation va malheureusement empirer"

franceinfo : Pourquoi les prix des produits de base, comme le lait ou les huiles végétales, ont-ils autant augmenté ces dernières semaines ?

Valentin Brochard : Les prix ont augmenté de près de 30% depuis un an. Avec le mois d'octobre, c'est la troisième hausse consécutive en trois mois. Ils augmentent principalement parce que les pays exportateurs de céréales ont eu de mauvaises récoltes, comme le blé aux Etats-Unis. Cette baisse des récoltes est principalement liée aux impacts des dérèglements climatiques. Généralement, le climat est la première cause de pertes agricoles. Cette année, les impacts des dérèglements climatiques se sont faits particulièrement ressentir sur les récoltes. Etant donné que la grande majorité des prix des céréales au niveau international est basée sur la capacité de ces États exportateurs à produire correctement et durablement à un prix bas, cela provoque actuellement une hausse des prix par répercussion.

Faut-il encore s'attendre à des hausses au mois de novembre ou un peu plus tard ?

C'est un peu trop tôt pour le dire. En revanche, cette hausse était prévisible et ce n'est absolument pas nouveau. Cela fait près de vingt ans que les marchés internationaux ne sont absolument pas régulés, avec des prix des denrées alimentaires qui font un peu le yoyo. On a une tendance à la hausse depuis le début du siècle. C'était déjà la cause des émeutes de la faim de la dernière crise alimentaire, il y a dix ans. Depuis, rien n'a vraiment été fait pour cadrer ces évolutions.

Quelles sont les parties du monde qui souffrent le plus de cette hausse des prix des produits de base ?

Dans la grande majorité, ce sont les pays émergents. L'insécurité alimentaire et la faim ne correspondent plus à l'image d'Epinal traditionnelle des famines des années 1980, avec quelques pays d'Afrique qui souffrent de famine. On est dans une insécurité alimentaire qui est plus généralisée. Cela fait six ans que la faim augmente et 70% des nouvelles personnes touchées vivent dans des pays émergents, qui dépendent directement des marchés internationaux de matières premières, que ce soit pour l'importation ou l'exportation. Ces prix et l'évolution de ces prix vont donc avoir un impact direct sur des pays comme le Brésil,qui est totalement dépendante des marchés internationaux de matières premières, notamment de matières premières agricoles.

Cela va-t-il avoir un impact direct sur notre porte-monnaie en France ?

Cela va dépendre de la réponse mise en place par les Etats, notamment la France. Cela va également dépendre de la coordination internationale mise en place autour de cette crise alimentaire à venir. On est déjà dans une situation de crise alimentaire dans un grand nombre de pays du globe, à la suite des impacts de la pandémie de Covid-19. Malheureusement, les signaux sont un peu au rouge car il n'y a aucune coordination internationale de réponse à cette crise alimentaire en cours. A cela s'ajoute l'envolée des prix. Il est urgent qu'il y ait une réponse diplomatique internationale et que la France la porte, avec une coordination interétatique. S'il n'y a pas cette coordination interétatique et s'il y a, au niveau des Etats, des politiques un peu protectionnistes comme ce que fait la Chine, cela va avoir des percussions un peu partout sur le globe, y compris en France. La situation va alors malheureusement empirer.

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