Dans le Beaujolais, des vignerons veulent produire le premier cru d’appellation 100% en bio
Le beaujolais nouveau est débouché jeudi. À Lantignié, les vignerons de l'appellation ambitionnent de réussir une transition exigeante vers le bio.
Le beaujolais nouveau arrive jeudi 15 novembre. Cette opération commerciale est un vrai succès économique, mais elle écorne parfois l'image de la région et de ses vins. À Lantignié (Rhône), on préfère souligner la très bonne qualité de son appellation. En arrivant dans ce village près de Beaujeu, par la route qui serpente à travers les vignes, impossible de rater cette énorme pancarte qui proclame : "Terroir de Lantignié, meilleur gamay du monde 2018."
Laurent Jambon travaille au domaine de Thulon. C'est sa cuvée Opale qui a décroché ce titre de meilleur gamay : "C'était génial d'avoir cette distinction. On a récupéré l'exploitation de nos parents. On est exploitant depuis 20 ans. Une reconnaissance comme ça, c'est très sympa... C'est une parcelle sur Lantignié, travaillée de façon conventionnelle, à l'ancienne."
Dans ce petit village, il y a 360 hectares de vignes sur les 15 000 que compte la région. À Lantignié, certains vignerons ont d’autres ambitions, celle de rejoindre les crus d'appellation, l’élite des vins de la région aux côtés de moulin-à-vent, fleurie ou encore morgon.
Pour y parvenir, Frédéric Berne, 33 ans, a rassemblé 30 des 35 vignerons de Lantignié autour d'un projet très exigeant de transition vers le bio : "Le point fort c'est qu'on bannit les pesticides de synthèse de notre appellation. C'est la première fois en Europe qu'une équipe de vignerons essaie d'aller plus loin dans le cahier des charges traditionnel. L'Inao [Institut national de l'origine et de la qualité], la police des appellations, y est de plus en plus sensible, dit-il. Pour nous, c'était important que l'on ait un cahier des charges nouvelle génération qui corresponde à l'attente des consommateurs aujourd'hui."
Une demande de classement dans les cartons
La fin des pesticides est prévue pour 2023. Cela va venir vite, sans doute trop vite, estime Laurent Jambon. "Tout le monde ne peut pas aller dans cette transition aussi rapidement. Concrètement, si on veut renouveler une vigne c'est environ 25 000 euros et trois ou quatre ans de non production. C'est un gros effort, il va falloir du temps."
Mais d'ici là, beaucoup de choses peuvent se passer, estime Dominique Piorn, président d’Inter Beaujolais, l'interprofession : "Cela va dans le bons sens mais leur cahier des charges n'est pas très réaliste. L'Inao ne va pas créer une appellation simplement parce qu'on lave plus blanc que le voisin. Je pense qu'il leur faudra dix ans pour monter l'appellation. Et d'ici dix ans, on aura tous l'obligation de produire propre. Pas forcément bio, mais on aura tous cette obligation."
Aujourd'hui, la demande de classement en cru n'est pas encore déposée. L'Inao précise qu'il faut compter ensuite quatre à cinq ans pour instruire le dossier. Selon l'organisme, ce qui fera la différence, ce ne sera pas tant la dimension environnementale que le terroir ou la notoriété des vins.
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