Danone et l'agriculture durable : "C'est plutôt au niveau des pouvoirs publics de faire avancer l'ensemble de l'agriculture"
Olivier Andrault, chargé de mission alimentation à l'UFC-Que Choisir ?, était invité sur franceinfo vendredi 21 septembre, alors que Danone reverse son chiffre d'affaires du jour à un fonds pour une agriculture plus durable.
Danone va reverser le chiffre d'affaires de vendredi 21 septembre à un fonds pour une agriculture plus durable, en s'inscrivant dans la vague de ces groupes agroalimentaires qui s'engagent. Mais Olivier Andrault, chargé de mission alimentation à l'UFC-Que Choisir ?, estime sur franceinfo que "c'est plutôt au niveau des pouvoirs publics de faire avancer l'ensemble de l'agriculture".
franceinfo : Ces initiatives ont-elles un réel impact sur les consommateurs ?
Olivier Andrault : C'est clair qu'il y a une demande extrêmement forte de la part des consommateurs de changer les paradigmes de notre alimentation. On voit bien qu'en volume la consommation baisse légèrement, elle s'érode, en revanche, ce qu'on a négligé de dire, c'est qu'en valeur, ça augmente. Les consommateurs sont prêts à payer un peu plus cher pour une alimentation de qualité. Alors qualité, ça veut dire quoi ? C'est aussi bien la qualité environnementale, plus de bio, ça c'est clair, les chiffres explosent. Mais aussi les qualités nutritionnelles par exemple, avec moins d'additifs.
N'y a-t-il pas un fossé entre les mots et la pratique dans l'agroalimentaire ?
C'est quelque chose de fondamental, à quoi les consommateurs peuvent-ils se fier ? Des initiatives telles qu'elles sont présentées sont, sur le principe, tout à fait louables. On a vu Carrefour, on parle également de Danone qui s'est engagé à mettre le nutri-score, cet étiquetage nutritionnel enfin compréhensible, sur l'ensemble de ses produits alimentaires. C'est clair qu'il faut l'encourager, c'est intéressant, mais pourquoi ? Parce que le nutri-score c'est un signe officiel, qui officiellement a été défini comme l'étiquetage simplifié qui doit être mis sur tous les produits agroalimentaires. En ce qui concerne en revanche tous les aspects d'amélioration de la qualité environnementale, satisfecit pour les filières, les distributeurs ou les industriels qui vont encourager la conversion au bio. En revanche on voit apparaître d'autres labels dont on n'a jamais entendu parler. Qu'est-ce que c'est qu'une agriculture "régénératrice" ? C'est le mot qui est évoqué par Danone. Il est important d'avoir un référentiel officiel avec un cahier des charges qui s'applique à l'ensemble des exploitations. Il existe en France, en Europe : c'est l'agriculture biologique. Il est clair que ça, c'est le mode d'agriculture dont on sait qu'il est le plus protecteur au niveau environnemental mais aussi au niveau de la santé pour les consommateurs.
Est-ce du 'greenwaching', une économie verte d'apparence ?
Effectivement, c'est le risque. Et donc, sans vouloir refuser les avancées qu'il doit y avoir dans toutes ces annonces, nous, ce que nous disons, c'est plutôt au niveau des pouvoirs publics de faire avancer l'ensemble de l'agriculture au-delà de ces initiatives ponctuelles. Et il faut bien observer quand même qu'il y a eu une occasion manquée, une occasion magnifique avec la loi Agriculture et Alimentation sur laquelle les parties prenantes, les ONG, l'Etat, toutes les filières, nous avons travaillé pendant plus d'un an. Pour obtenir quoi ? Quasiment rien ou des choses absolument anecdotiques. Rien comme engagement formel sur le glyphosate, rien sur les perturbateurs endocriniens, rien sur la transition écologique, rien sur la qualité nutritionnelle ou sur le marketing en direction des enfants. Donc, ce sont les pouvoirs publics qui doivent être à l'origine pour impulser un véritable mouvement.
Le bio est-il encore trop cher ?
Deux choses en ce qui concerne le prix du bio. Il y a deux parties qui sont fondamentalement différentes. C'est tout d'abord le prix qui revient à l'agriculteur bio. Et là, il est normal que ce prix soit plus élevé qu'en conventionnel, tout simplement parce que les rendements sont plus faibles. Il faut rappeler que le bio s'interdit l'utilisation de pesticides et d'engrais de synthèse donc, forcément, ça réduit les rendements. Il y a beaucoup moins de mécanisation en bio qu'en conventionnel [agriculture conventionnelle, qui utilise des produits chimiques], donc tout ça explique au final, au sortir du champ ou de l'étable, eh bien, les produits bio sont plus chers, et c'est normal. En revanche, là où ce n'est pas normal, c'est la marge brute qui est réalisée par la grande distribution. Et nous avons calculé, il y a maintenant un peu plus d'un an dans une étude réalisée sur des chiffres officiels, que la marge brute de la grande distribution est double sur les fruits et légumes bio par rapport aux produits conventionnels. Et ça, ce n'est pas admissible puisque ça renchérit le panier bio pour le consommateur.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.