L'Angle éco. Reprise ou "re-crise", que disent les chiffres ?
La reprise est-elle là ou bien vivons-nous une nouvelle crise ? "L'Angle éco" se pose la question le 5 octobre. Que disent les chiffres ? Ils sont les baromètres de l’activité économique. Leur évolution est souvent vue comme un signe avant-coureur du redémarrage de l’activité. Que disent-ils aujourd’hui de la reprise française, promise et confirmée par le gouvernement ?
Reprise ou "re-crise", "L'Angle éco" se pose la question lundi 5 octobre. François Lenglet atterrit à Issoire, ville qui a inversé la courbe du chômage, et rencontre, entre autres, Jacques Attali, qui prépare un programme présidentiel pour 2017.
François Hollande ne cesse de le répéter, “la reprise est là”. “Fragile”, certes, mais bien engagée. Avec une croissance de 1% prévue en 2015 – le gouvernement le promet –, la France a passé le cap de la sortie de crise. Peut-on pour autant parler de reprise, et d’une relance de l’activité durable et créatrice d’emplois ? La France affichait encore récemment le taux de croissance le plus faible de l’Union européenne, après un début d’année pourtant plus positif.
Comment, alors, prévoir et confirmer le redémarrage de l’activité économique ? Certains signes sont connus pour indiquer plus tôt que d’autres une période de reprise. Les premiers viennent souvent de l’extérieur. Dans le cas actuel, il s’agit d’un “triptyque inédit” comme l’explique Le Monde : un euro déprécié, un prix du pétrole et des taux d’intérêts qui ont baissé.
Grâce à ces facteurs favorables, les exportations repartent fortement : elles augmenteraient de 5,2% cette année selon l’Insee, après une hausse déjà engagée de 2,4% en 2014. Mais au niveau national, que disent les indicateurs de la situation économique française ? Tour d’horizon.
L’intérim en hausse, premier indicateur de reprise
En France, l’intérim est souvent connu comme étant le premier indicateur d’un redémarrage économique. C’est un signe avancé de la reprise de l’emploi. Si le recours à l’intérim varie d’un trimestre à l’autre – il a reculé au premier trimestre, puis a rebondi au deuxième –, son évolution sur une année semble confirmer une légère relance de l’activité. En un an, le nombre d’intérimaires a augmenté de près de 1%.
C’est dans le tertiaire qu’il a le plus rebondi. Entre début 2014 et début 2015, le nombre d’intérimaires dans ce secteur a augmenté de 5,6%, selon la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques). Les indicateurs sont également au vert dans l’industrie : le nombre d’emplois en intérim y a crû de 3,6%. Signe d’une activité qui repart, l’intérim est aussi l’indicateur d’une crise qui persiste dans certains secteurs. Dans la construction, un domaine encore fortement touché par la crise, le recours à l’intérim a reculé de 13,1% en un an.
La reprise française est également à chercher du côté de la confiance des ménages et des entreprises, un moteur essentiel au dynamisme économique. Cette confiance est souvent l’indicateur clé d’une relance de la consommation et de l’investissement, et ainsi de la croissance dans un pays.
La confiance s’améliore, l’investissement reste faible
La confiance des ménages, fortement entamée par la crise, s’améliore depuis 2013. Elle a même atteint en septembre son plus haut niveau depuis l’automne 2007. Et pour cause, le pouvoir d’achat des Français devrait augmenter de 1,9% cette année selon l’Insee, soit sa plus forte hausse depuis le début de la crise. Il avait déjà connu une augmentation de 1,1% en 2014.
Pourtant, l’évolution de la consommation des ménages reste modérée. Elle est relativement à la hausse depuis 2014, mais a récemment ralenti. Après une hausse de 0,9% au premier trimestre 2015, les dépenses de consommation des ménages n’ont pas augmenté entre avril et juin. L’investissement en logements continue quant à lui de reculer, de 1,5% au deuxième trimestre après un repli de 1,2% en début d’année, selon l’Insee.
Du côté des entreprises, le climat des affaires est plutôt favorable, il s'améliore même depuis 2013. En septembre, il a particulièrement progressé dans les secteurs du commerce de détail et de l’industrie. Mais dans le bâtiment ou le commerce de gros, la situation continue de se dégrader. Difficile de dire que la confiance des chefs d’entreprise est revenue.
Résultat : l’investissement des entreprises, condition essentielle à une reprise durable, connaît un "redémarrage encore modeste" cette année, de l’ordre de 1%. Mais il devrait s’accélérer au cours des prochains mois. Meilleures perspectives de demandes, remontée du taux de marge... “De nombreuses conditions sont désormais favorables” à ce redémarrage, affirme l’Insee dans sa dernière note de conjoncture.
Des secteurs baromètres
En France, ce sont aussi certains secteurs d’activité qui servent d’indicateurs de reprise. Tels des baromètres de l’économie, ils annoncent un redémarrage plus tôt que d’autres. S’ils vont mieux, d’autres secteurs suivront et, à terme, l’ensemble de l’activité économique se relèvera.
Le secteur des transports est l’un d’entre eux. Des commandes de pneus aux embouteillages, les transports sont un signe fiable d’embellie économique. C’était le baromètre de Pierre Bérégovoy quand il était ministre de l'Economie et des Finances, puis Premier ministre : plus les poids lourds étaient nombreux à circuler sur la nationale 7, entre Nevers et Paris, plus la situation économique lui semblait favorable.
Au printemps, le marché des poids lourds a ainsi affiché des premiers signes de reprise. Le secteur a bénéficié de facteurs extérieurs favorables, comme un euro plus faible et des prix du gazole en baisse. Les immatriculations de poids lourds ont ainsi augmenté de 19% en avril 2015.
L’emballage est l’un des autres grands secteurs indicateurs de reprise. Comme l’expliquait aux Echos Danièle Kapel-Marcovici, PDG du n°1 européen de l’emballage Raja, “l’emballage est un baromètre de l’activité économique”. Et en effet, le secteur repart : la production de papier et carton pour la fabrication d’emballages a ainsi augmenté de près de 9% en 2014. Et 58% des fabricants d’emballages français prévoient une hausse de leur production, selon l’Observatoire de l’emballage.
Des massages aux couleurs des cravates, des indicateurs insolites
La reprise, certains la repèrent ailleurs que dans des indicateurs ou secteurs d’activité classiques. Aux débuts de la crise, en 2009, le magazine économique Forbes recensait ainsi quelques indicateurs parmi les plus insolites. On y apprenait que la couleur des cravates, par exemple, peut être un signe avant-coureur de reprise ! L’idée est simple : plus vous portez une couleur de cravate vive, plus vous avez confiance en la situation économique. Un signe, donc, de redémarrage de l’activité.
Les ventes de jeans en seraient un autre. En France, un nouveau baromètre est né il y a quelques années : le Baromètre Body Minute, créé par l’entreprise d’instituts de beauté du même nom. L'hypothèse est très sérieuse : quand le nombre de massages est en baisse, il traduit une certaine morosité économique. Quand la demande de massages augmente, la perspective économique est à l’embellie. Le dernier baromètre de la chaîne le confirme : avec un nombre de massages en hausse, la confiance est là, la France est bien sur la voie de la reprise.
Cette reprise va-t-elle se pérenniser, et se traduire par des créations d’emplois ? L’emploi salarié n’a que très légèrement augmenté au deuxième trimestre, de 0,2% seulement dans les secteurs marchands. Pour l’instant, seul l’intérim repart véritablement. Reste à savoir s’il se transformera, comme prévu, en emplois nouveaux et durables.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.