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Pourquoi les syndicats boycottent la conférence sociale

La CGT, FO et la FSU ont décidé de ne pas participer au deuxième jour des discussions. 

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le secrétaire général de la CGT Thierry Lepaon (à gauche) et celui de FO Jean-Claude Mailly (à droite) lors d'une manifestation contre le pacte de responsabilité, le 18 mars 2014. (CITIZENSIDE/PATRICE PIERROT / CITIZENSIDE.COM)

"Contre-productif", selon la CFTC. "Syndicalisme inutile", selon la CFDT. Le boycott de la seconde journée de la conférence sociale, décidé lundi 7 juillet par les syndicats CGT et FO, mardi par la FSU (première fédération de l'enseignement), et la semaine dernière par Solidaires, ne fait pas l'unanimité chez les partenaires sociaux. Malgré les critiques des autres participants à cette "grand-messe" du dialogue social, francetv info vous explique pourquoi ces quatre syndicats avaient tout à gagner à adopter une politique de la "chaise vide".

Parce qu'ils souhaitent peser face au patronat

"Le discours du Premier ministre, qui s'exprimait (...) en faveur du patronat avant même que la conférence sociale ne s'ouvre, ne mérite pas notre présence à ses côtés", argue le leader de la CGT, Thierry Lepaon. "Le gouvernement pratique le dialogue social avec le Medef", ajoute le secrétaire général de Force ouvrière Jean-Claude Mailly. Les responsables syndicaux protestent contre la décision de Manuel Valls de reporter partiellement la mise en place du compte pénibilité, sous la pression du Medef qui menaçait lui aussi de boycotter la conférence sociale.
 
Les syndicats dénoncent un non-respect du dialogue social de la part du Premier ministre, puisque la mesure figurait dans la réforme des retraites issue de la concertation de l’automne 2013. Du coup, pour reprendre la main et peser contre le patronat, la politique de la "chaise vide" apparaît comme la meilleure solution. "Il n'est pas question pour la CGT de cantonner le syndicalisme tout entier dans un rôle de figuration", explique Thierry Lepaon.

Parce qu'ils ne savent plus comment faire pression sur le gouvernement

Après l'échec de la grève à la SNCF contre la réforme ferroviaire, après l'échec du mouvement des intermittents soutenu par la CGT et qui demandait une renégociation de la convention chômage, les syndicats ont l'impression de ne plus réussir à infléchir la politique du gouvernement. "Nous ne sommes pas entendus, pas écoutés", souligne Thierry Lepaon.

Les syndicats FO et la CGT ont donc décidé de changer de méthode. Ils savent qu'ils ont recueilli à eux deux les voix de près de 50% des salariés lors des précédentes élections dans les entreprises, souligne Le Figaro. En décidant de ne pas participer à cette conférence, un fait inédit dans l'histoire de la République, les deux organisations mettent à mal le dialogue social du gouvernement érigé en méthode par François Hollande, comme le rappelle Le Monde

Le président en a conscience et montre des signes d'inquiétude. Lundi, dans son discours d'ouverture de la conférence, il a critiqué le boycott des organisations, en mettant en garde les syndicats contre "une perpétuelle surenchère" ou un "discours incantatoire". Mais dans le même temps, il a tenu à réaffirmer sa ligne réformiste et sa méthode du dialogue. Un dialogue pour l'instant interrompu, et qui pour être repris nécessitera sans doute un geste envers les syndicats.

Parce qu'ils veulent un changement de politique économique

"On a voulu marquer le coup, en disant 'attention, vous prenez un drôle de chemin, (...) qui est dangereux pour l'économie, (...) pour le social, (...) pour la démocratie, ça s'appelle l'austérité'", a lâché Jean-Claude Mailly sur France 2. La stratégie des syndicats pourrait donc forcer le gouvernement à faire des concessions sur les dossiers sensibles à venir dans les négociations sociales, que ce soit au sujet du compte pénibilité ou de la simplification du Code du travail.

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Dans le viseur des syndicats, une renégociation du Pacte de responsabilité. Cet accord qui doit permettre une baisse de plus de 40 milliards de prélèvements sur les entreprises a été rebapbtisé "pacte d'austérité" par les organisations qui jugent excessives les coupes dans les dépenses publiques.

Parce qu'ils ont besoin de donner des gages à leur base

Les bases syndicales de la CFT comme de FO sont très remontées contre le gouvernement et les centrales syndicales ne veulent pas être accusées de participer à sa politique sans réagir. C'est d'ailleurs l'angle d'attaque de Marine Le Pen, qui reproche aux syndicats d'être "complices" des choix politiques des gouvernements successifs et "discrédités" pour avoir "accepté le modèle" économique de l'UE.

La CGT doit, de plus, affronter des divisions internes. Selon Les Echos, le climat au sein de la centrale syndicale est devenu détestable. La politique de la "chaise vide" pourrait permettre à Thierry Lepaon de donner des gages à ses adhérents et de s'offrir un peu d'air. Reste désormais à savoir si le boycott permettra aux syndicats d'obtenir des concessions gouvernementales.

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