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Loi Travail : dialogue de sourds entre les députés et Myriam El Khomri pour l'arrivée du texte à l'Assemblée

La ministre du Travail était auditionnée par les membres de la commission des affaires sociales de l'Assemblée, mardi.

Article rédigé par Louis Boy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La ministre du Travail, Myriam El Khomri, arrive à son audition par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, le 29 mars 2016 à Paris. (MAXPPP)

La loi Travail a commencé son parcours à l'Assemblée nationale dans la cohue. Il n'y avait plus une seule place libre à la commission des affaires sociales, mardi 29 mars, pour assister à l'audition de la ministre en charge de ce texte contesté, Myriam El Khomri.

L'examen concret du projet, et la valse des amendements qui l'accompagne, ne débuteront que le 4 avril, d'abord dans la commission des affaires économiques puis dans celle des affaires sociales, avant l'arrivée du texte dans l'hémicycle le 3 mai. L'audition de mardi n'était donc qu'un début, l'occasion de prendre la température des débats.

Mais trois heures et demie plus tard, ils n'étaient plus qu'une vingtaine dans la salle pour écouter Myriam El Khomri, cette dernière évacuant sans y répondre les (nombreuses) questions dont les auteurs avaient quitté la salle. Le tout ponctué par les "chut" agacés lancés par Catherine Lemorton, présidente de la commission, dépitée du manque d'attention "sur un texte aussi important". Le signe qu'un dialogue de sourds s'engage entre les parlementaires et le gouvernement ?

Sarcasmes à droite, avertissements à gauche

Dans l'assistance, pas un point du texte ne semble faire l'unanimité. La garantie jeunes, par exemple, qui semblait être le point le plus consensuel de la réforme, est toute la soirée la cible de la droite, qui juge trop coûteux de la promettre à tous les jeunes précaires et veut introduire un critère de motivation. Le ton des députés LR est le plus ironique. En leur nom, Gérard Cherpion, élu des Vosges, savoure "les circonvolutions auxquelles [la ministre se] prêt[e] pour remettre en cause les 35 heures". A droite, nombreux sont ceux qui assurent avoir beaucoup aimé la première version de la loi El Khomri, au point qu'un député demande tout simplement à la ministre si elle ne peut pas rétablir la totalité des dispositions supprimées.

A l'UDI, où l'exécutif espérait peut-être plus de soutiens, le député Arnaud Richard est plus virulent, accusant de façon à peine voilée la ministre d'incompétence en assénant qu'elle n'a sans doute pas lu l'article L1 du Code du travail qui impose une concertation préalable à toute réforme. "Votre désaccord ne vous empêche pas d'être courtois !" réplique la présidente. 

Moins bruyants, les frondeurs socialistes ne sont pas en reste. "Avez-vous des éléments à fournir sur les supposées créations d'emploi ?" demande Gérard Sebaoun. Le texte est accusé de remettre en cause la durée du temps de travail ou de signer la fin de la hiérarchie des normes, alors que la ministre vient de tenter de les convaincre du contraire. Même Catherine Lemorton tacle la définition du licenciement économique, jugée très approximative. Il y a bien quelques socialistes qui soutiennent la réforme, mais ils se font peu entendre.

"Ne vous étonnez pas de trouver la jeunesse devant vous"

L'écologiste Isabelle Attard tente la veine comique en invitant Myriam El Khomri à une séance du film Merci patron. La communiste Jacqueline Fraysse, très critique sur la définition du licenciement économique, lance un avertissement : "Il ne faut pas s’étonner de trouver la jeunesse devant vous pour dénoncer ce texte. Vous les sous-estimez sans doute, permettez-moi de vous dire que vous avez tort."

En face, Myriam El Khomri semble plus à l'aise dans l'adversité, apparaissant plus combative lors de ses réponses aux députés que dans son discours inaugural. "Vous ne pouvez pas dire, madame Fraysse, que le texte vise à faciliter le licenciement économique, lance-t-elle avec une pointe d'exaspération dans la voix. On peut avoir un débat sur les détails, les critères retenus, mais ce que vous dites est faux."

C'est, depuis le début, la ligne du gouvernement : assurer que son texte est mal compris par ses détracteurs, tout en restant ouvert à des ajustements. En commission, la ministre du Travail a proposé, notamment, de définir différemment les critères du licenciement économique dans les PME et dans les grandes entreprises. Mais elle n'est pas toujours prête à transiger avec ses opposants. En fin de séance, un échange avec un député LR sur les accords de branche n'en finit pas, et la présidente Catherine Lemorton finit par s'interposer : "On tourne en rond. Vous reposerez la question dans l'hémicycle." Avant de faire adopter sa loi, Myriam El Khomri a encore de longs débats devant elle.

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