Dire adieu à votre banquier va être de plus en plus facile
Michel Sapin a dévoilé, lundi, un site internet permettant de comparer les tarifs auxquels les différentes banques facturent certains services.
Imaginez : vous changez d'opérateur téléphonique, et soudainement les appels que vous recevez se mettent à sonner dans le vide. Vous devez faire le tour de vos contacts pour leur donner votre nouveau numéro. Le tout alors que vous n'êtes même pas sûr que votre nouveau forfait est réellement plus avantageux. Aujourd'hui, la portabilité des numéros de téléphone, et la relative transparence des tarifs, sont entrées dans les mœurs. Mais, dans un autre domaine, ces craintes n'ont pas disparu : la banque.
Selon une étude de l'association de consommateurs UFC-Que choisir, la mobilité bancaire n'a concerné, en France, que 3,2% des comptes en 2012. C'est trois fois moins que la moyenne des grands pays européens. Pourtant, les Français ne sont pas tous satisfaits : 18% signeraient chez une autre banque "si c'était à refaire", un chiffre qui monte à 25% chez les clients de banques "classiques". C'est pour s'attaquer à ce paradoxe que Michel Sapin, le ministre des Finances, a annoncé, lundi 1er février, des mesures simplifiant le transfert d'un compte, et inauguré un site internet permettant de comparer certains tarifs. Francetv info fait le point sur les mesures, existantes ou en projet, qui pourraient vous aider à quitter votre banquier.
Déjà en place : des tarifs clairement annoncés sur les documents bancaires
Pour décider de changer de banque, encore faut-il savoir ce qu'elle vous facture. C'est pour cette raison que le Comité consultatif du secteur financier avait introduit une première mesure qui préfigurait le comparateur du ministère des Finances. Depuis le 1er janvier 2011, toutes les banques sont tenues d'afficher clairement les tarifs des dix mêmes opérations en tête des plaquettes tarifaires envoyées à leurs clients.
De plus, depuis le 30 juin 2011, vos relevés de comptes mensuels doivent indiquer le total des frais qui vous ont été facturés le mois précédent. En 2014, une autre simplification est adoptée : l'harmonisation des noms donnés aux opérations, cruciale quand il s'agit de comparer leur coût entre établissements.
Tout juste ouvert : un comparateur de tarifs sur internet
La comparaison est devenue plus simple depuis lundi, avec l'ouverture du comparateur en ligne du gouvernement. "C'est aussi mon rôle [de veiller] à ce que le consommateur soit bien informé" et qu'il puisse "facilement changer de banque si les prix ou les services ne lui conviennent pas", estime le ministre des Finances. Un service que d'autres sites proposaient déjà, mais parfois de façon payante. Dans un communiqué, en janvier, certains de ces acteurs privés avaient d'ailleurs qualifié le site du ministère de "projet inutile financé par le contribuable", rappelle Metronews.
Sur le site sont répertoriés "les principaux tarifs bancaires", soit le coût de quinze services de base dans la quasi-totalité des banques actives en France (98% du marché, selon le ministère). On peut y comparer le coût annuel des différents types de cartes bleues, ou les frais facturés lorsque vous retirez du liquide à un distributeur d'une autre banque. Mais la catégorie la plus scrutée sera sans doute celle des frais de tenue de compte : depuis le 1er janvier, de nombreuses banques les ont augmentés, ou ont commencé à faire payer ce service auparavant gratuit.
Le site du gouvernement a cependant ses limites. Contrairement à certains de ses concurrents, il ne prendra en compte qu'une poignée de tarifs, alors que les brochures des banques regroupent des centaines de frais différents. Il ne prend notamment pas en compte les offres regroupant plusieurs de ces services. "Il n’inclura même pas les formules tout compris, alors que 60% des Français en ont", s'étonne le responsable des études de l'UFC-Que choisir, interrogé par Le Monde. L'association propose de son côté un autre comparateur, qui prend en compte le profil de l'usager.
Dans un an : une mesure pour laisser votre banque s'occuper des démarches
C'est le deuxième volet des annonces de Michel Sapin : à partir du 7 février 2017 va s'appliquer une disposition de la loi Macron qui devrait faciliter les démarches pour le passage d'une banque à une autre.
Depuis 2009, les banques se sont déjà engagées à proposer une aide à la mobilité, pour s'assurer que les virements et prélèvements d'un client soient bien transférés à son nouveau compte, rappelle la Fédération bancaire française. Un guide de la mobilité a également été publié. Mais ce dispositif, méconnu, est très peu utilisé, y compris par les clients qui osent changer de banque.
A partir de février 2017, il suffira à l'usager de fournir un RIB et de signer un mandat à sa nouvelle banque pour que celle-ci effectue les démarches en son nom, et que le transfert des virements et prélèvements d'un compte à l'autre soit automatique. L'ancien établissement, qui était tenu d'informer l'usager "par tous les moyens" du refus de paiement d'un chèque ou d'un prélèvement sur le compte clos, devra maintenant le faire par SMS. Des services qui devront être gratuits.
"Nous agissons pour une mobilité bancaire facilitée", #MichelSapin. Les détails en image pic.twitter.com/s7V9KoOskq
— Ministère Finances (@Min_Finances) February 1, 2016
Au placard : un numéro de compte unique, à conserver de banque en banque
Si l'UFC-Que choisir se félicite de cette annonce du gouvernement, elle plaide toujours pour une mesure plus ambitieuse : la mise en place de la portabilité du numéro de compte, qui serait transférable d'un établissement à l'autre, à l'image de ce qui est devenu la norme dans la téléphonie.
En 2013, lors des débats sur la loi Consommation portée par l'ancien ministre Benoît Hamon, un amendement avait proposé sa mise en place. L'idée avait été écartée, mais le ministre avait promis une réflexion sur la question. Un rapport, finalement remis en décembre 2014, a cependant enterré le projet. La portabilité du numéro de compte "a un coût important pour un bénéfice limité en termes de mobilité bancaire", estime son auteure, Inès-Claire Mercereau… ancienne PDG de la banque en ligne Boursorama. De plus, selon elle, la mise en place d'une base de données pour centraliser ces numéros engendrerait des "risques opérationnels". L'idée a donc été mise de côté par le gouvernement, au profit des mesures annoncées lundi.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.