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Salaires : une augmentation de 1,6% "ne permet pas de compenser la hausse des prix", selon l'économiste Mathieu Plane

Selon l'économiste, au mois d'août, on constate une augmentation annuelle des prix de 1,9% en France.

Article rédigé par franceinfo
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Une salariée des services de nettoyage de la ville de Valence fait le ménage dans une classe d'une école primaire le 12 mai 2020. (NICOLAS GUYONNET / HANS LUCAS)

Les employés du secteur de la propreté vont bénéficier d'une augmentation de 1,6% du salaire de base au 1er janvier 2022, le taux horaire passant alors de 10,56 euros à 10,73 euros. "Cela ne permet pas de compenser la hausse des prix actuels", a déploré Mathieu Plane, économiste et directeur adjoint à l’OFCE, l'Observatoire français des conjonctures économiques, jeudi 9 septembre sur franceinfo. "On est plutôt dans une dynamique de perte de pouvoir d'achat", a-t-il analysé.

franceinfo : Une augmentation de 1,6% suffit-elle à augmenter le pouvoir d'achat des salariés ?

Mathieu Plane : 1,6% cela ne permet même pas de compenser la hausse des prix actuels. Au mois d'août, on constate une augmentation annuelle des prix de 1,9%, alors une revalorisation salariale de 1,6% ne compense pas la hausse des prix. En réalité, on est plutôt dans une dynamique de perte de pouvoir d'achat, en raison notamment de la remontée des prix de l'énergie. Il me semble que 1,6% est insuffisant. On s'attend à des augmentations de salaires un peu plus significatives que cela dans les mois à venir.

Actuellement, où en est le pouvoir d'achat des travailleurs de la deuxième ligne, métiers du commerce, des transports, des services ?

Le pouvoir d'achat des travailleurs de la deuxième ligne est difficile à identifier. On a différents types de métiers, un certain nombre d'entre eux sont proches du Smic qui a été peu revalorisé ces dernières années. Il a seulement été indexé automatiquement sur les prix, sur l'inflation. Il n'y a pas eu de coup de pouce depuis 2012 et la question qui devient cruciale c'est : faut-il ou pas une revalorisation spécifique du Smic, au-delà des revalorisations automatiques liées au prix ? Il faut toutefois souligner que le gouvernement a peu de marges de manœuvre sur les salaires puisqu'ils sont fixés dans les entreprises. En jouant sur le Smic, cela peut générer des difficultés en termes de coût du travail, d'embauche et de compétitivité. C'est une problématique complexe.

Est-ce le seul levier ?

C'est le principal levier si l'on veut jouer sur les bas salaires mais cela pose la question du coût du travail pour les entreprises. L'autre levier est la fiscalité. Faut-il des baisses spécifiques de cotisations sur les bas salaires ? Cela a déjà beaucoup été fait et le gouvernement avait aussi déjà revalorisé la prime d'activité après la crise des Gilets jaunes. Quoi qu'il en soit, le reste à vivre pour les bas salaires est de plus en plus faible, avec cette impression de ne plus avoir grand-chose à la fin du mois. Dans notre système, il y a déjà eu une précarisation du marché du travail avec l'augmentation très forte des contrats courts, de l'intérim, et une forme d'externalisation avec l'auto-entreprenariat.

Pour les secteurs qui peinent à recruter, l'hôtellerie-restauration par exemple, l'augmentation des salaires est-elle le bon levier ?

Dans ces métiers-là, assez durs, avec des amplitudes horaires importantes, la difficulté de recruter tient aussi au fait qu'il ne s'agit pas forcément de contrats longs, de CDI, mais de CDD, d'emplois saisonniers. Avec la crise, un certain nombre de personnes qui travaillent dans ces secteurs ont donc décidé d'aller voir ailleurs, dans d'autres secteurs qui recrutaient. Une des réponses est en effet l'augmentation des salaires, mais toute la difficulté est que pour un certain nombre de petites entreprises, il n'est pas toujours facile d'augmenter les salaires. Mais comme on dit en économie : ce qui est rare est cher, donc les difficultés à recruter pourraient générer un peu plus de salaire. La question est de savoir si la croissance va bénéficier à la classe moyenne. Autrement dit, enclenche-t-on une vraie dynamique de croissance qui permet de générer des emplois et de baisser durablement le chômage ?

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