"Il n'y a pas de débat ici" : au Canada, l'incompréhension autour du flou français sur le Ceta
Jour de vote crucial au Sénat jeudi 21 mars. Les Sénateurs vont se prononcer sur le Ceta, ("Comprehensive economic and trade agreement"), l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. Un accord qui s’applique provisoirement en France depuis six ans, mais que le Sénat n’a jamais ratifié, contrairement à l’Assemblée nationale en 2019.
Signé en 2016, adopté en 2017 à l'échelle européenne, le Ceta a été validé de justesse à l'Assemblée nationale en 2019, suscitant un nombre d'abstentions record pour l'époque dans les rangs macronistes. Mais le gouvernement n'avait alors jamais saisi le Sénat, une étape pourtant nécessaire dans le processus. Or, ce traité, qui supprime notamment les droits de douane sur 98% des produits échangés entre l'Union européenne et le Canada, est fortement critiqué, notamment par les éleveurs français qui épinglent des importations de viande à des coûts de revient bien inférieurs aux leurs et avec des méthodes moins strictes que celles auxquelles ils sont soumis.
"Une certaine crainte d'être écrasé"
De l’autre côté de l’Atlantique, au Canada, on ne comprend pas vraiment pourquoi le Ceta fait encore débat. Que ce soit du côté des gouvernements, fédéral et provinciaux, ou de la société civile, il n’y a jamais eu d’opposition canadienne à l’accord Ceta. Les lois pour légiférer sa mise en place provisoire sont passées sans problème.
"Il n'y a pas de débat public ici, assure Charles-Emmanuel Côté, professeur en droit international économique. Seul bémol peut-être du côté des producteurs agricoles, une ouverture du marché des produits laitiers, on pense aux importations de fromages français. Une certaine crainte d'être écrasé. Nous sommes évidemment un marché beaucoup plus petit."
La réticence de certains pays est plutôt incompréhensible côté canadien, car les gagnants de cet accord sont surtout européens, précise l’économiste Christian Deblock.
"La France exporte beaucoup plus qu’elle n’importe du Canada. Du côté français, c’est essentiellement du vin, des alcools et des spiritueux. Du côté canadien, les exportations, ce sont surtout des questions de graines."
Christian Deblockà franceinfo
La crainte canadienne, c’est que l’accord ne soit finalement pas ratifié. "Le Canada avait mis énormément d’eau dans son vin pour arriver un accord qui est pour lui important. Explicitement, on reconnaît quand on touche par exemple aux questions réglementaires, que les questions sociales, d’éducation, les questions environnementales, sont priorisées avant le commerce." Le Canada espère donc voir la France ratifier ce Ceta, déjà appliqué en grande partie depuis 2017.
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