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Réforme de l'audiovisuel public : "On trouvera assez aisément" les économies, "j'ai du mal à pleurer", assure l'ancien président de Radio France

Les contours de la réforme de l'audiovisuel public doivent être dévoilés lundi par la ministre de la Culture. D'importantes économies devraient être annoncées. "Il faut que les choses soient équitables", a prévenu Jean-Marie Cavada sur franceinfo.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le siège de France Télévisions, le 4 septembre 2017, dans le 15e arrondissement de Paris. (LUDOVIC MARIN / AFP)

Quel avenir pour l'audiovisuel public ? La ministre de la Culture Françoise Nyssen annonce dans la matinée du lundi 4 juin ses premières propositions de réforme. L'Élysée souhaiterait faire voter la loi avant la fin de l'année 2018. 500 millions d'euros d'économie pourraient être demandés d'ici 2022, pour un budget 2018 de 3,9 milliards d'euros. Des économies qui n'inquiètent pas Jean-Marie Cavada, ancien président de Radio France. "On les trouvera assez aisément", a-t-il affirmé sur franceinfo.

Est-il nécessaire d'économiser jusqu'à 500 millions d'euros ?

Les chiffres sont relatifs. Mais de mon point de vue, on ne fait pas une réforme uniquement pour faire des économies. Avant d'avoir la prétention d'obtenir de l'argent économisé, il faut savoir ce que l'on veut faire, donc il est nécessaire, et c'est ce que j'attends de Françoise Nyssen, de préciser ce que doit être l'audiovisuel public. Il faut réécrire ses missions de façon encore une fois à distinguer l'offre publique de l'offre privée qu'on trouve un peu partout, c'est très important ça.

500 millions d'économies sur pratiquement 4 milliards d'euros dépensés dans l'audiovisuel public, même moi qui suis pourtant vigilant j'ai du mal à pleurer

Jean-Marie Cavada

franceinfo

Naturellement, il faut que les choses soient équitables, Radio France ne peut pas participer à 50 % à cette réforme. Mais je ne crois pas non plus que ce soit le propos qui est en train d'être étudié.

Dans les pistes évoquées, il pourrait y avoir des fermetures de chaînes. Là aussi, c'est nécessaire ?

Fermer pour fermer serait une idiotie. Mais il se trouve que dans le périmètre de l'audiovisuel public, il y a des chaînes qui ne s'imposent pas et surtout qui n'ont pas réussi à s'imposer. Je pense notamment à France 4, c'est un vide-poche. On a un peu de jeunesse, un peu de foot, un peu de Paris-Dakar, un peu de rugby. Il y a tout et son contraire. Ça a été dispersé par une mauvaise programmation et surtout personne ne savait vraiment ce qu'on voulait en faire, c'est dommage. Et puis surtout, le but de la réforme, c'est de réorganiser les entreprises de manière à ce qu'elles répondent et qu'elles mettent un terme à trois instabilités. D'abord, l'instabilité du mode de nomination des dirigeants et du contrôle de ces dirigeants. On ne peut pas faire l'un et l'autre. Deuxièmement, l'instabilité financière. Nous sommes le seul pays des trois grands audiovisuels publics en Europe dont les budgets ne sont qu'annuels. Si vous êtes demain PDG de France Télévisions et de Radio France, vous apprenez vers le 10-12 décembre la somme exacte du budget dont vous disposerez trois semaines plus tard. Ça ne tient pas debout. En Allemagne c'est un budget prévisionnel de quatre ans, en Grande-Bretagne, c'est cinq ans. Il faut arriver à cela. Et l'autre instabilité, c'est de réorganiser les entreprises pour gagner des synergies quand elles ne déforment pas ou ne contraignent pas ou ne ralentissent pas l'expression des métiers, parce que la radio, ce n'est pas la télé.

Faut-il vraiment fusionner France 3 et France Bleu ?

Je ne suis pas contre sur le principe bien que je ne sois pas un acharné des synergies technocratiques, mais il y a certainement des possibilités. La synergie doit-elle être une synergie d'antenne à marche forcée ? Certainement pas, parce que dans ce cas-là France Bleu - dont je rappelle que, lorsque nous l'avons créé en 2001, elle était à 5-6 %, elle est aujourd'hui à la hauteur d'Europe 1 et elle talonne RMC, ce qui est quand même un énorme succès. Et d'autre part, les économies on les trouvera surtout dans les structures, c'est-à-dire dans les locaux communs, les choses comme ça. Mais moi j'ai un très vilain souvenir de l'époque avant la réforme Giscard de l'audiovisuel en 1975 : la radio et la télévision régionale étaient ensemble, et bien, qu'est-ce qui arriva ? C'est qu'on a bouffé les budgets de la radio pour combler les trous de la télé. Il faudra donc sanctuariser les budgets de la radio pour que tout le monde soit à l'aise dans son métier.

Comprenez-vous les inquiétudes des salariés ?

C'est la France. Dès qu'on touche à une réforme, évidemment ça crée des craintes, d'autant plus que cela traîne depuis un moment. Mais moi je dis franchement non, il n'y a pas matière à s'emballer.

Il y a près de 4 milliards d'euros et 13 000 personnes dans l'audiovisuel. On ne va pas sabrer de telle manière à ce qu'on ne puisse plus avoir de programmes.

Jean-Marie Cavada

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Personne ne fera cette idiotie, par conséquent non. Il faut plutôt prendre en main cette réforme. J'ai eu l'occasion dans des rencontres informelles que les syndicats de la maison m'avaient demandées de dire que c'est leur tour de prendre en main cette réforme dans deux sens : les missions publiques et l'économie financière. Je sais que l'économie financière pour des syndicats c'est toujours un peu difficile. Et bien quand même, il faut y aller.

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