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Budget : comment la Commission européenne pourrait sanctionner la France

Le budget 2015 de la France sera envoyé à Bruxelles dans dix jours. Mais la Commission européenne l'a d'ores et déjà qualifié "d'inacceptable". Elle veut demander à Paris de revoir sa copie. Mais en a-t-elle le droit ?

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le ministère des Finances prévoit un déficit à 4,3% du PIB pour 2015, au-delà des 3% autorisés par l'UE. (JOEL SAGET / AFP)

"Il est inacceptable", tonne Bruxelles. Le projet de loi de finances pour 2015, présenté par le ministre des Finances, Michel Sapin, ne plaît pas à la Commission européenne, selon les informations de France 2, qui confirment celles du Figaro, mises en ligne lundi 6 octobre. Bruxelles l'a fait savoir, alors que les discussions avec le gouvernement ont commencé de manière informelle.

Ces informations sont "erronées", a répliqué le ministre des Finances mardi sur RTL. "Ça n'est pas dans [s]es pouvoirs" de censurer le budget d'un Etat membre de l'Union européenne. Qu'en est-il réellement ?

La Commission pourrait saisir la Cour de justice de l'UE 

Organe exécutif de l'Union européenne, la Commission européenne veille à l'application correcte des traités. Elle peut saisir la Cour de justice de l'Union européenne, afin que celle-ci prononce des sanctions à l'encontre des Etats membres irrespectueux des traités.

Dans le cadre du traité de Maastricht ratifié par la France en septembre 1992, le déficit des administrations publiques de chaque pays signataire ne doit pas dépasser 3% du produit intérieur brut (PIB). Or, le projet de loi de finances dévoilé par Paris le 1er octobre renonce à ramener le déficit à cette limite en 2015. Pourtant, la France avait fait cette promesse après l'obtention d'un premier délai de deux ans. Le retour à 3% est désormais prévu pour la fin 2017.

Le ministère des Finances prévoit seulement une baisse du déficit de 0,2 point pour 2015, soit un déficit à 4,3% du PIB. Or, dans tout pays ayant un déficit dépassant les 3%, la réduction des dépenses doit atteindre 0,5%, chaque année. C'est pourquoi, selon Le Figaro, la Commission demande à la France un effort budgétaire supplémentaire de 8 milliards d'euros, sous forme d'économies ou d'impôts.

La Commission pourrait donner une amende à la France

Bruxelles pourrait prendre des sanctions financières, comme le prévoit le traité de Maastricht. Ce type d'amende européenne peut atteindre 0,2% du produit intérieur brut (PIB) de l'Etat sanctionné. Pour la France, cela correspondrait à 4,2 milliards d'euros. "Les derniers textes autorisent la Commission à engager ces sanctions dès que le dérapage est effectivement constaté, sans plus attendre la fin de l'exercice budgétaire", précise Le Figaro. C'est un droit acquis depuis la crise, pour éviter que le problème des dettes souveraines ne dégénère.

"Seule l'Autriche a jusqu'ici subi une telle humiliation", indiquait le quotidien dès vendredi 3 octobre. Vienne n'a pas été sanctionnée, mais sous la menace d'une telle amende, elle a dû modifier en 2013 sa loi de finances après le vote au Parlement, au nom de la discipline budgétaire collective.

Pour éviter les sanctions, la France va devoir négocier

Si la France veut suivre le même chemin, le déficit 2014 ne devra pas être supérieur à celui de 2013, pour montrer que même si elle ne respecte pas ses promesses, la France est au moins "dans la bonne direction", analyse le correspondant de France 2 à Bruxelles, François Beaudonnet. Selon lui, le déficit structurel devra baisser de 0,5% et des réformes devront être annoncées ou précisées rapidement. "Chacun sent bien qu'il ne pourra pas s'en tirer sans dégâts. Il va falloir négocier le prix à payer, des deux côtés", dit-on à la Commission, selon Le Figaro.

Si ces trois conditions sont respectées, Bruxelles émettra simplement un avis "très critique" vis-à-vis de la France. Et, ajoute François Beaudonnet, les négociations futures auront lieu entre Michel Sapin à Paris et Pierre Moscovici, son prédécesseur, bientôt commissaire européen aux Affaires économiques, à Bruxelles.

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