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A l'occasion du G20, petit lexique de termes économiques liés à la question des monnaies

Système monétaire international, changes flottants, politique monétaire...Les chefs d'état et de gouvernement vont tenter lors du G20 de définir une ligne commune destinée à éviter les embardées liées aux politiques nationales.Voici quelques rappels et définitions pour mieux comprendre les débats et les enjeux du sommet de Séoul.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
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Obama au G20 de Toronto en 2010. Le dollar pourrait être au centre des discussions du sommet de Séoul (AFP/Saul LOEB)

Système monétaire international, changes flottants, politique monétaire...Les chefs d'état et de gouvernement vont tenter lors du G20 de définir une ligne commune destinée à éviter les embardées liées aux politiques nationales.

Voici quelques rappels et définitions pour mieux comprendre les débats et les enjeux du sommet de Séoul.

Le système monétaire

Le Gold Exchange Standard (étalon de change or) d"avant guerre (déjà mis à mal après la guerre de 14) n"a pas résisté à la crise de 29. En 1931, l'Allemagne a établi un contrôle total des changes, le Royaume-Uni a suspendu la convertibilité de la livre en or. En 1933, les États-Unis ont levé la convertibilité de leur monnaie La France a abandonné la convertibilité du franc en or en 1936. C'est la mort du système de l'étalon change-or né des accords de Gênes (1922). Se sont ajoutés à ce changement de système monétaire, des politiques utilisant les dévaluations monétaires pour améliorer la compétitivité de leurs exportations en vue de réduire le déficit de leurs balances commerciales, accélérant les spirales déflationnistes qui eurent pour conséquence une plongée des revenus nationaux, un rétrécissement de la consommation, un chômage de masse et un déclin global du commerce international.

Après la deuxième guerre mondiale, cette politique du chacun pour soi a cédé la place lors des accords de Bretton Woods en 1944 à un système basé sur le dollar dont la valeur est assise sur une certaine quantité d"or. Cet accord conclu au lendemain de la guerre consacre la puissance américaine et fait du dollar la monnaie de réserve internationale ("as good as gold"). Ce système est destiné à favoriser les échanges internationaux grâce à une stabilité des monnaies.

Ce système a relativement bien fonctionné pendant plus de 20 ans. La guerre du Vietnam et les déficits records enregistrés par les Etats-Unis entraînèrent le 15 août 1971 la fin de la convertibilité du dollar par Richard Nixon et une très importante dévaluation de la monnaie américaine. Les grandes puissances économiques tentèrent de limiter les variations des monnaies dans ce système de changes flottants. C"est de cette période que date la célèbre phrase : « The dollar is our currency and your problem » (« Le dollar est notre devise et votre problème »).

Le 19 mars 1973, le « Groupe des Dix » (en gros les grandes puissances économiques) officialisait l"abandon de la fixité des taux de change des diverses monnaies par rapport au dollar, ce qui permettait aux banques centrales des autres pays de cesser d"acheter du dollar pour maintenir sa parité, selon les règles du jeu du système en vigueur. Le nouveau système monétaire international dit de « changes flottants » était officialisé. Il est toujours en vigueur aujourd"hui.

Accords de Bretton Woods

Les accords de Bretton Woods ont dessiné les grandes lignes du système financier international après la Seconde guerre mondiale. Ils furent signés le 22 juillet 1944 à Bretton Woods aux États-Unis après trois semaines de débats entre 730 délégués représentant l"ensemble des 44 nations alliées. Les deux principaux protagonistes de cette conférence ont été John Maynard Keynes, qui dirigeait la délégation britannique, et Harry Dexter White, assistant au secrétaire au Trésor des Etats-Unis. La France était représentée par Pierre Mendès France.

Au sortir de la guerre, les États-Unis disposent de la plus grande partie des capitaux mondiaux et dominent l"économie mondiale. Ils produisent la moitié du charbon, les deux tiers du pétrole et plus de la moitié de l"électricité au niveau mondial. Ils sont en mesure de produire de grandes quantités de navires, d"avions, de voitures, de produits chimiques, d"armes et d"autres produits manufacturiers. De plus, 2/3 des réserves mondiales d"or sont détenues par les Américains.

La conférence dont le but est de créer un système monétaire capable de fournir un cadre solide à la reconstruction et à l'expansion économique du monde libre, fait des États-Unis et du dollar les piliers de la nouvelle architecture économique. Ils vont jouer respectivement les rôles que jouaient le Royaume-Uni et la livre avant la guerre de 1914.

Principaux résultats de cette conférence : le dollar devient la monnaie de référence du système monétaire international. Sa valeur est attachée à une certaine quantité d"or (35 dollars l"once d"or). Les autres monnaies se définissent ainsi par rapport au dollar, ce qui n"empêche pas les pays d"ajuster leurs monnaies par rapport à cette référence (c"est ainsi que le mark allemand a pu grimper et le franc français baisser par rapport au dollar). A côté de la définition de ce Gold-Exchange Standard, la conférence met sur pied le FMI (fonds monétaire international) sorte de banque (principal actionnaire, les Etats-Unis) dont le rôle est d"aider les pays à assurer une certaine stabilité économique.

Le déséquilibre des échanges internationaux, la transformation du dollar en monnaie de réserve, la guerre du Viêt Nam qui voit les déficits américains exploser mettent fin au système de Bretton Woods le 15 aôut 1971 avec la décision annoncée par Richard Nixon de suspendre la convertibilité du dollar. Le système des taux de change fixes s'écroule définitivement en mars 1973 avec l'adoption du régime de changes flottants. Le 8 janvier 1976, les Accords de la Jamaïque confirment officiellement l'abandon du rôle légal international de l'or. Il n'y a plus de système monétaire international organisé.

Certains analystes estimaient que le système de Bretton Woods n"était structurellement pas viable en raison de la contradiction entre le nécessaire déficit de la balance des paiements des États-Unis pour alimenter le monde en moyens de paiement internationaux et l"affaiblissement progressif de la confiance envers la monnaie de référence due à ce déficit. Cette contradiction a pris le nom de « paradoxe de Triffin » du nom d"un économiste belge, qui fit carrière aux Etats-Unis. Contre cette contradiction, l'économiste français Jacques Rueff, soutenu par de Gaulle en 1965, prônait un retour à l'étalon or, ce qui ne s'est bien sûr pas fait. Aujourd'hui certains économistes évoquent de nouveau la possibilité d'un retour à cet étalon metallique pour stabiliser le système. Les grandes puissances économiques devraient envisager de renouer avec une forme d'étalon-or pour guider l'évolution des taux de change, a ainsi déclaré le président de la Banque mondiale Robert Zoellick. Le nouveau système à mettre en place «devrait inclure le dollar, l'euro, le yen, la livre Sterling et le renminbi (yuan chinois). Le système devrait aussi envisager d'employer l'or comme un point de référence international lié aux prévisions du marché pour l'inflation, la déflation et la valeur future des monnaies», précise-t-il dans le Financial times du 8 novembre.

Les changes flottants

Le système des changes flottants est en fait une absence de système. Il rend la valeur des monnaies dépendant des marchés comme n"importe quelle matière première. Les Etats ont tenté pendant un moment d"imposer une certaine valeur à leur monnaie, mais rapidement les marchés ont montré leur puissance en empêchant les Etats de défendre ces valeurs. Ces derniers mois, le Japon ou la Suisse ont échoué à empêcher leur monnaie de monter en intervenant sur les marchés.

L"absence de parités fixes oblige exportateurs et importateurs à prendre en compte d"éventuelles variations des monnaies dans leurs contrats. De très nombreux instruments financiers ont été créés dans ce but.

L"Europe, dans le but de faciliter les échanges entre ses membres, a toujours tenté de contrôler la variation des monnaies au sein de sa zone, en tentant de limiter l"ampleur des variations monétaires avec les créations successives du serpent monétaire, de l"écu puis de l"euro…avec les problèmes que l"on connaît aujourd"hui.

La valeur de la monnaie est devenue l"un des moyens privilégiés des Etats pour aider leurs économies. Pour cela, les pays (les plus puissants en tout cas) peuvent définir une politique monétaire plus ou moins rigoureuse pour faire monter ou baisser sa monnaie afin de faciliter ses exportations. Les Etats-Unis en annonçant une politique monétaire extrêmement laxiste ont fait baisser leur monnaie relançant les discours sur la «guerre des monnaies ».

Trappe à liquidités

Dans le débat entre monétaristes (ceux qui pensent pouvoir agir sur l"économie via la politique monétaire –taux notamment) et budgétaristes (plans de relance, fiscalité…), l"idéologie dominante des dernières décennies met surtout en avant les premiers. Dernier exemple en date de cette vision monétariste avec le nouveau plan de plus de 600 milliards de dollars annoncé par les Etats-Unis. Un plan qui consiste à injecter cette somme dans les circuits financiers en espérant qu"ils s"investissent utilement.

Pour John Maynard Keynes, les agents arbitrent, dans la répartition de leur portefeuille, entre la détention d'obligations -un actif risqué dont le cours varie de manière inverse au taux d'intérêt- et la détention de monnaie -un actif non risqué. Lorsque le taux d'intérêt est faible, ces agents (en gros les investisseurs) pensent que le taux va augmenter, et leur préférence pour la liquidité est alors absolue. Une politique monétaire de baisse du taux d'intérêt est alors totalement inefficace dans le cadre d'une relance.

Cette théorie n'est pas admise par tous les économistes. Mais, pour certains économistes néo-keynésiens, dont Paul Krugman (prix nobel 2008), la « décennie perdue » au Japon, au cours des années 1990, est un exemple concret de trappe à liquidité.

G20

Le Groupe des 20 (pays) a été créé en marge d'un sommet du G7 en 1999. Le but de ce nouveau groupe était déjà de favoriser la stabilité financière internationale et de créer des possibilités de dialogues entre pays industrialisés et pays émergents, ce que les réunions des ministres des finances du G7 ne permettaient pas.

Le fait que l'on ne parle plus aujourd'hui que de G20 et non plus de G7, G8 ou G10 traduit l'accession de pays longtemps considérés comme émergents en puissances économiques à part entière. Le G20 est cependant plus politique qu'économique puisqu'il ne regroupe cependant pas quelques uns des 20 pays les plus puissants économiquement (Suisse, Espagne) alors qu'il compte dans ses membres des économies plus faibles (Arabie Saoudite, Afrique du Sud).

L'idée de ces sommets informels internationaux remonte à 1975 avec la création du G6, à l'initiative du président Giscard d'Estaing, lors d'un sommet à Rambouillet.

D"abord G6 (« Groupe des six ») à sa création en 1975, puis rapidement G7 (« Groupe des sept ») avec l'intégration du Canada en 1976, le groupe s"est élargi à la Russie en 1998 pour devenir le G8. Aujourd'hui, la notion de G20 semble s'être imposée.

Ces rencontres sont contestées par des mouvements altermondialistes qui remettent en cause la légitimité de cette réunion à vouloir « diriger le monde », au mépris des autres pays, pour imposer une politique libérale.

Si les communiqués finaux de ces sommets sont en général peu clairs et rarement porteurs de vraies décisions concrètes, ils permettent des échanges entre les pays et peuvent avaliser certaines évolutions techniques, comme l'ont montré les récentes décisions dites de Bâle III.

Voir aussi Géopolis

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