"Je ne suis pas médecin, mais…" Vous avez sans doute déjà été confronté à cette situation : se retrouver face à une personne parlant avec assurance d'un sujet qu'il ne connaît pas ou peu. Cela a un nom : l'ultracrépidarianisme. Pour Étienne Klein, philosophe et physicien, on a tous un avis sur certains sujets comme le nucléaire, les OGM, les nanosciences mais sommes-nous réellement capables de dire comment cela fonctionne ?Une tendance à la hausse en période de crise ?Depuis le début de l'épidémie de Covid-19, Étienne Klein a constaté l'exacerbation de cette tendance notamment du côté de certaines personnalités politiques. "Je voyais des Tweets écrits par des personnalités politiques, parfois de très haut rang, qui commençaient par : "Je ne suis pas médecin, mais je pense…" etc. Et, après cette déclaration honnête d'incompétence, s'ensuivaient des injonctions sur ce qu'il fallait faire ou penser à propos de tel ou tel traitement au tout début de l'épidémie", se souvient-il. Et pour le philosophe, nous pouvons tous être amenés à être victime de cet ultracrépidarianisme. "C'est tout à fait naturel dans la conversation, simplement il faut en avoir conscience et, quand on a une parole publique qui peut avoir des effets politiques importants, eh bien il faut être prudent", estime-t-il.Rassurer dans l'incertitude ?Dans "Le Goût du vrai", Étienne Klein analyse comment la crise du coronavirus a fait naître de nombreuses polémiques. Et le physicien a un avis sur la question : écouter ceux qui parlent avec certitude voire arrogance peut s'avérer rassurant dans une période d'incertitude. À l'inverse, les personnes modérées et prudentes sur les questions relatives à la vérité ont tendance à être davantage silencieuses. "Et moi je pense que notre démocratie, pour garder de sa vivacité, a besoin que les gens modérés s'engagent passionnément", dit Étienne Klein. En effet, il en est persuadé : la démocratie "a à voir avec le fait qu'on puisse argumenter et s'en donner le temps, sans simplement s'imposer, s'opposer, pardon, avec des arguments assez primaires."