"Fort Boyard" : cinq choses à savoir sur Yann Le Gac, le comédien derrière le masque du Père Fouras depuis plus de trente ans
Sous le maquillage et le costume, le comédien incarne depuis plus de trois décennies le personnage culte du célèbre jeu télévisé de France 2.
Au sommet des 370 marches de la vigie de "Fort Boyard", il attend, impassible, prêt à coller le candidat qui vient se frotter à ses énigmes. Si certaines choses ont changé au Fort cette saison, notamment le retrait des tigres pour respecter le bien-être animal, le vieil homme mystérieux, lui, est indéboulonnable.
Cela fait 33 saisons que le Père Fouras interroge les candidats de l'émission culte de France 2 – dont un nouvel épisode est diffusé samedi 30 juillet – et presque autant que Yann Le Gac incarne ce personnage emblématique. Le comédien originaire du Morbihan, qui fêtera ses 68 ans en août, ne pensait pas que ce costume lui collerait toujours à la peau trois décennies plus tard. Voici cinq choses que vous ignorez peut-être sur celui qui interprète le Père Fouras.
1Danseur émérite avant de devenir comédien
Avant d'établir ses quartiers d'été au large de La Rochelle (Charente-Maritime), Yann Le Gac s'est d'abord rêvé danseur. Adolescent, on lui conseille de faire des claquettes, de la danse moderne, puis de la danse classique. Il parvient à intégrer "le meilleur cours de danse classique de Paris, celui de Serge Golovine, avenue George V, où venaient les danseurs de l'Opéra", raconte-t-il en 2021 à L'Equipe Magazine (article abonnés). Direction ensuite Bruxelles, où il rejoint l'école du danseur Maurice Béjart. En 1973, son nom apparaît au casting de plusieurs spectacles du chorégraphe.
"C'était gonflé à mon époque, un garçon qui fait de la danse. J'en ai fait pendant huit heures par jour, plus de quinze ans. Vous imaginez le corps que ça m'a façonné... Je le paie : j'ai de l'arthrose partout !"
Yann Le Gacà "L'Equipe Magazine"
Il se produit partout dans le monde : le Bolchoï de Moscou, la Scala de Milan, la Fenice de Venise ou le Teatro Colón de Buenos Aires. Mais au milieu des années 1980, son corps dit stop. "La danse, ça n'arrête jamais, c'est une dinguerie physique", concède-t-il au Journal du Dimanche. Il se rêve désormais acteur et sa rencontre avec le célèbre agent Dominique Besnehard précipite cette réorientation. Il passe même les essais pour le rôle finalement tenu par Jean-Hugues Anglade dans 37º2 le matin, comme il l'explique dans Gala.
Yann Le Gac intègre au début des années 1990 la troupe de comédiens dirigée par le metteur en scène Alexis Tikovoï. Il cotoie notamment Marie Trintignant, Anne Parillaud ou Tina Sportolaro. Cette dernière se souvient d'un homme "très ouvert, sympathique et jovial". "Son parcours atypique me bluffait, il avait déjà eu une vie professionnelle en tant que danseur chez Maurice Béjart."
2Le premier Père Fouras, ce n'était pas lui
Yann Le Gac intègre "Fort Boyard" lors de la deuxième saison, en 1991. Il remplace le comédien belge Michel Scourneau, évincé pour des raisons qui diffèrent, selon les principaux concernés. Dans le documentaire Les maîtres des jeux télé, diffusé en 2019 sur France 5, l'ancien animateur de "Fort Boyard" Patrice Laffont avance que le succès de l'émission a poussé Michel Scourneau à revoir à la hausse ses exigences. "Il a fait un petit peu de chantage à la production en disant : 'Oh les mecs, maintenant, il faudrait peut-être raquer un petit peu'", raconte Patrice Laffont.
Une version démentie par le comédien. "Quand mon agent m'a proposé de faire le Père Fouras, je n'étais pas extrêmement chaud et j'avais donc négocié un cachet assez élevé. J'avais obtenu 250 000 francs pour tourner l'ensemble de la saison, pour la France et l'Allemagne", se défend-il dans Le Figaro. Il ajoute qu'il a refusé le contrat de sept ans qui lui avait été proposé au départ, préférant ne pas s'engager sur le long terme.
Lorsque le moment de la renégociation pour la deuxième saison arrive, Pierre Sportolaro, le directeur de la production, veut le reconduire, mais avec un cachet moins important. "Je lui avais répondu que je n'étais pas d'accord. Je voulais le même contrat, affirme Michel Scourneau. La discussion s'était arrêtée là et je n'avais plus eu de nouvelles par la suite. Mais je n'ai jamais réclamé plus parce que je savais que j'étais déjà très bien payé."
Quelles que soient les raisons, la production a alors dû relancer un casting. "Mon frère Pierre m'avait demandé si je ne connaissais pas des acteurs qui pourraient être intéressés", se raconte à franceinfo l'actrice Tina Sportolaro. "J'ai pensé à Yann parce qu'il avait ce parcours. Les autres jeunes comédiens ne collaient pas. Il était le candidat le plus cohérent."
3Il ne pensait pas faire de vieux os au Fort
Lorsqu'il entre au Fort, Yann Le Gac ne se dit pas qu'il en prend pour trente ans. "Je pensais que j'allais juste prendre un cachet, une fois. Mais le jeu a cartonné, on m'a demandé l'année suivante de continuer, et ainsi de suite...", explique-t-il en 2019 au Télégramme. A cette époque, Yann Le Gac poursuit sa carrière de comédien et ce passage par la case télé n'est pas forcément vu d'un bon œil.
"Marie Trintignant était très réservée : 'T'es fou, faut pas. En plus un jeu...' Faire de la télé, c'était très mal vu. Je lui avais répondu : 'J'aurai un masque, je vais déguiser ma voix, il n'y a pas de souci.'"
Yann Le Gacau "Télégramme"
"Quand Yann a signé, la durée n'était pas du tout le sujet, confirme Tina Sportolaro. On ne se projetait pas dans le temps." Il finit par se prendre au jeu et n'a plus quitté le costume, même quand il veut se concentrer sur la production artistique de l'émission. En 2002, il est brièvement remplacé par Didier Hervé, un autre comédien. Mais ce remplacement ne dure pas. "Il y a eu une demande de la chaîne et de la production pour que je revienne : les téléspectateurs s'étaient rendu compte que ce n'était plus moi, à cause de la voix et des yeux, notamment", avance-t-il dans Le Télégramme.
4 Devenir le Père Fouras, une exigence physique
Porter le costume du Père Fouras n'est pas de tout repos. Cela nécessite au minimum 45 minutes de maquillage et trente minutes pour s'habiller. Au début de son aventure, "le masque était très lourd et épais, comme une cagoule qui me faisait mal aux cervicales", raconte Yann Le Gac au Télégramme. Le costume, qui ressemble selon lui à "un sac de pommes de terre déchiré", est composé de soie et reste lourd. Avec les années, l'attirail s'est allégé, mais ce qui réclame le plus d'énergie au comédien, c'est la voix si particulière, chantonnante, du Père Fouras.
"Cela me coûte dix fois plus d'efforts de dire une phrase en 'Père Fouras' qu'avec ma voix normale. Ce personnage est très vampirisant en termes d'énergie."
Yann Le Gacà "L'Equipe Magazine"
Et quand tout s'accumule, avec les prises à réaliser, parfois dans des conditions en inadéquation avec son costume (chaleur, exiguïté), il peut transpirer à grosses gouttes. "J'ai toujours peur quand je dois bouger, car je sais que je vais le payer. Quand j'enlève ma toge, je suis trempé à en tordre mon tee-shirt", admet-il dans le magazine du quotidien sportif.
5L'homme qui conçoit les épreuves de... "Koh Lanta"
Dans "Fort Boyard", Yann Le Gac ne se contente pas de poser les énigmes concoctées par une équipe d'auteurs, il conçoit également les épreuves. Et, depuis 2003, il occupe la même fonction pour l'émission de TF1 "Koh-Lanta". "J'invente les jeux et je les mets en place", révèle-t-il sur Europe 1 en 2019. Un rôle qui lui vaut d'ailleurs le sobriquet du "bourreau" auprès des candidats. "La clé, c'est de donner l'illusion que les épreuves paraissent simples et évidentes pour tout le monde dès le premier coup d'œil. Au départ, c'est souvent moi qui lance l'idée et le travail de réflexion commence avec l'équipe", décrit-il au Huffington Post.
"C'est une tâche titanesque. Vous devriez voir l'intensité dans les ateliers de création (...) On se brûle la cervelle."
Yann Le Gacau Huffington Post
L'homme derrière la course d'orientation qui permet de se qualifier pour la finale ? C'est lui. Il ne dissumule pas une certaine fierté de l'avoir imaginée. "C'est une épreuve extrêmement compliquée dans l'élaboration, mais finalement très simple à voir et à suivre pour les téléspectateurs. C'est une épreuve qui offre toujours des rebondissements inattendus et j'adore ça !", glisse-t-il.
S'il n'a pas inventé l'épreuve des poteaux, il l'a réadaptée en voyant des pélicans perchés. "Je me suis dis : 'Tiens, qu'est-ce qu'il y a de plus pur que ça ?', décrit-il à Europe 1. Parce que le problème est de toujours trouver des jeux qui soient équitables, qu'on soit grand ou petit, fort ou pas. Surtout quand on arrive à la finale."
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