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"Richard III" pour clore la saga shakespearienne de Thomas Jolly

Le jeune metteur en scène Thomas Jolly, qui avait créé l'événement au festival d'Avignon 2014 avec l'épopée d'un "Henry VI" en 18 heures, clôt sa saga shakespearienne avec "Richard III" à Rennes avant une imposante tournée qui passera par le théâtre de l'Odéon en janvier.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Thomas Jolly, lors d'une répétion de la pièce "Richard III" au Théâtre National de Bretagne à Rennes
 (Jean-François Monier / AFP)

"Richard III", c'est "l'épilogue crépusculaire" de la tétralogie : une génération née dans la guerre, "dévastée", dit Thomas Jolly, se laisse gangrener par les machinations d'un monstre, Richard le bossu, le boiteux, le mal aimé qui prend sa revanche par la conquête du pouvoir.
 
La pièce s'ouvre dans la pénombre. Cette noirceur, trouvée de lumières glaçantes, dominera pendant les 4H30 de la pièce. On est loin de l'épopée flamboyante de "Henry VI", où le rire le disputait aux batailles échevelées. "On est à l'ère du chaos, donc forcément, la splendeur, la ferveur, le sourire, le solaire du début d'Henry VI n'est plus présent", a expliqué le metteur en scène.

  (Jean-François Monier / AFP)

 "Une pièce très pertinente aujourd'hui, en Europe"

On retrouve dans la pièce les clins d'oeil aux séries télévisées dont Thomas  Jolly  (33 ans) est friand, mais si "Henry VI" évoquait "Games of thrones", là ce seraient plutôt "Les Revenants": visages blêmes, brouillard fantomatique contribuent à une ambiance spectrale.
 
Des faisceaux lumineux façon "Star Wars" balayent la scène et un "souffle  de la mort", sorte de long chuintement, vient parfois ponctuer un meurtre. Lorsque Richard, après avoir assassiné frère, neveux, amis et courtisans, accède enfin au trône, il se déchaîne sur une chanson rock, micro en main, et appelle le public à reprendre le refrain, dans une manipulation digne d'un jeu télévisé ou d'un meeting électoral.
 
Pour Thomas Jolly, "Richard III ne réussit que parce qu'il se sert d'un climat délétère, où tout le monde voit ce qui se passe, mais personne n'est assez hardi pour le dire". "La pièce est très pertinente aujourd'hui en
Europe", souligne-t-il.
 
Le jeune homme interprète lui-même Richard, une forme de "schizophrénie", avoue-t-il: "le metteur en scène que je suis le condamne, mais l'acteur le  défend. C'est vraiment délicieux de se plonger dans un personnage dont on comprend les rouages de la méchanceté, de la violence, du mal".

Tout traiter, sans rien couper

 Avouons-le: on regrette la dramaturgie flamboyante, l'allégresse du travail de troupe, les trouvailles cocasses qui créaient le suspense tout au long du marathon de "Henry VI". L'accueil du public n'en a pas moins été enthousiaste vendredi soir à Rennes pour la première de la pièce, un des événements les plus attendus de la rentrée. La pièce pâtit d'un démarrage plutôt laborieux : Thomas Jolly, conscient d'avoir amassé "un trésor" avec l'aventure de son Henry VI, a voulu en donner une sorte de "résumé des épisodes précédents" au début de "Richard III", auquel on ne comprend rien.

Si ce "Richard III" est pesant, c'est non seulement parce que le sujet en est tragique, mais surtout en raison du pari de tout traiter, sans rien couper. Le metteur en scène allemand Thomas Ostermeier avait donné en juillet dernier au festival d'Avignon une version raccourcie en deux heures, entièrement centrée autour de Richard, interprété par le formidable Lars Eidinger.
 
Thomas  Jolly, en amoureux du texte de Shakespeare, n'a quasiment rien coupé, au risque d'alourdir considérablement le rythme de sa pièce.

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