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Rebondissement dans l'affaire Kirill Serebrennikov : le metteur en scène russe est assigné à résidence
Inculpé par la justice russe dans une affaire de "détournement de fonds publics" à hauteur d'un million d'euros, le metteur en scène Kirill Serebrennikov a été assigné à résidence mercredi 23 août, jusqu'au mois d'octobre.
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Soupçonné d'avoir détourné l'équivalent d'un peu plus d'un million d'euros, le réalisateur, qui avait demandé sa libération lors de l'audience, devra rester en assignation à résidence jusqu'au 19 octobre, a annoncé la juge Elena Lenskaïa, alors que des centaines de personnes réunies près du tribunal ont accueilli cette décision en scandant "Honte!".
Directeur artistique du Centre Gogol, un célèbre théâtre contemporain de Moscou, et réalisateur de films présentés aux festivals de Cannes ou de Venise, Kirill Serebrennikov a été interpellé dans la nuit du 21 au 22 aoûti sur un tournage à Saint-Pétersbourg et emmené dans la capitale pour être interrogé dans les locaux du Comité d'enquête. Il a été inculpé pour "fraude à grande échelle", un délit passible de dix ans d'emprisonnement.
Un préjudice de 68 millions de roubles
Selon les enquêteurs, le réalisateur est soupçonné d'avoir, par un système de devis et factures gonflés, détourné 68 millions de roubles (un peu plus d'un million d'euros au taux actuel) entre 2011 et 2014 sur des subventions de 214 millions de roubles (3 millions d'euros) accordées au projet "Plateforme" réalisé par son précédent théâtre, le Studio-7.
"Ces accusations sont impossibles et absurdes", a déclaré Kirill Serebrennikov devant le tribunal. "L'argent octroyé par l'Etat pour le projet Plateforme a été dépensé pour ce même projet", s'est-il défendu.
L'avocat du réalisateur, Dmitri Kharitonov, a proposé le paiement d'une caution record de 68 millions de roubles (équivalente à la somme évoquée par l'accusation de détournement). "Je suis convaincu que nous pourrons collecter rapidement la somme nécessaire à l'aide des gens qui ne sont pas indifférents à son sort", a expliqué l'avocat, évoquant l'aide possible d'Irina Prokhorova, la soeur du milliardaire Mikhaïl Prokhorov.
Je connais Kirill personnellement. Il est très respecté dans les milieux théâtraux et je vous promets qu'il viendra à toutes les audiences et ne tentera pas d'entraver le cours de la justice.
Natalia Soljenitsyne, veuve de l'écrivain dissident Alexandre Soljenitsyne et soutien de Kirill Serebrennikov
De nombreuses personnalités, parmi lesquelles le directeur du respecté théâtre du Bolchoï, Vladimir Ourine, le réalisateur Alexeï Guerman, l'écrivaine Lioudmila Oulitskaïa, ainsi que Natalia Soljenitsyne, la veuve de l'écrivain et dissident Alexandre Soljenitsyne, ont d'ores et déjà appelé à sa remise en liberté. "Je connais Kirill personnellement. Il est très respecté dans les milieux théâtraux et je vous promets qu'il viendra à toutes les audiences et ne tentera pas d'entraver le cours de la justice", a écrit Natalia Soljenitsyne, dans une lettre lue par Dmitri Kharitonov.Un acte de censure ?
Certains ont dénoncé un acte de censure directement ordonné par le Kremlin visant à intimider les artistes à l'approche de la présidentielle. Cette arrestation est "un signal des autorités à tous ceux qui font partie de la communauté des créateurs en Russie (...), un signal visant à les intimider", à moins de sept mois de la présidentielle, a estimé ainsi le journal économique Vedomosti.
En juin, le metteur en scène a affirmé s'être vu reprocher d'avoir bénéficié de fonds publics pour des oeuvres qui selon les enquêteurs n'auraient jamais vu le jour, ce qu'il réfute. Selon lui, le projet s'est poursuivi pendant trois ans et l'un des spectacles, "Le Songe d'une nuit d'été", a été montré de nombreuses fois.
Il s'est vu décerner en 2016 le prix François Chalais à Cannes pour son film "Le Disciple" et son dernier film, "Trahison", a été en compétition à la Mostra de Venise. Il est le directeur artistique du Centre Gogol, théâtre vieillissant qu'il a transformé en lieu incontournable de la scène théâtrale contemporaine à Moscou.Ses mises en scène audacieuses, comme d'autres spectacles ou expositions ces dernières années, ont été parfois dénoncées par des militants orthodoxes au nom des valeurs conservatrices prônées par le Kremlin et le conservateur ministre de la CultureVladimir Medinski. En juillet, le Bolchoï avait annulé quelques jours avant la première un ballet mis en scène par Kirill Serebrennikov consacré au danseur Rudolf Noureev, assurant que le spectacle n'était pas prêt.
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