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"Un démocrate" : la manipulation de masse explose sur scène à La Reine Blanche à Paris
Edward Bernays, vous connaissez ? Sans doute pas, ou alors vous travaillez dans la communication institutionnelle, la publicité, le marketing… Considéré comme le fondateur de la propagande politique dès les années 20, cet Américain, neveu de Freud, il est au coeur d’"Un démocrate" au Théâtre de La Reine Blanche à Paris, après un triomphe à Avignon l’an dernier.
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Un siècle de propagande
Un documentaire consacré à Edward Bernays, ce pionnier pas toujours rassurant, était diffusé mardi soir 29 mai sur Arte (disponible en replay) : passionnant. A l’écriture d’"Un démocrate", la metteure en scène et comédienne Julie Timmerman monte un spectacle à la fois édifiant, distrayant et spectaculaire sur un des phénomènes majeurs nés au début du XXe siècle, d’une actualité toujours brûlante : la manipulation de masse, à but commercial ou politique. Quatre comédiens et comédiennes, Julie Timmerman, Anne Cressent, Mathieu Desfemmes et Jean-Baptiste Verquin, interprètent une vingtaine de personnages dont, chacun à tour de rôle, devient Edward Bernays. C'est un enchaînement fluide de scènes où se succèdent, au cours d’un siècle, les différentes strates de son inventivité, sous forme parodique, de comédie, de music-hall...D’une salle de réunion en plein brainstorming, on passe au sommet du Rockfeller Center de New York, où les ouvriers bâtisseurs font la pause en haut de leur poutrelle ; puis c’est un studio de radio d’où sont diffusées des publicités, c’est ensuite une soirée mondaine, les officines d’un président guatémaltèque douteux, la pièce finissant dans un futur dystopique… Ca raille, ça chante, ça danse, ça bouge… En fond de scène, un panneau est progressivement recouvert de photos et de messages évocateurs d’Edward Bernays ; la piste sonore est riche et émaillée, tout comme les éclairages changeants, voire explosifs, jusqu’à un final ébouriffant.
Apprentis-sorciers
"Un démocrate" joue d’un texte lumineux sur le processus mis au point par "Eddy" dès 1923 dans "Crystallizing Public Opinion", puis en 1928 avec "Propaganda, comment manipuler l’opinion en démocratie" (Ed. Zone), qui influença grandement Joseph Goebbels, ministre de la Propagande d’Hitler. Nous sommes au cœur des alcôves secrètes des apprentis-sorciers forgeurs d’opinion qui, à coups de psychologie, de symboles, de messages, de manifestations diverses et variées visent à frapper l’inconscient pour provoquer un réflexe d’achat, ou l’adhésion à une idéologie.La grande réussite de Julie Tiemmerman est de ne nullement élaborer un texte théorique, didactique ou sentencieux. Une dynamique, une vivacité constante habite l’écrit propulsé par la mise en scène. Un parti pris ludique nourri d’humour participe d’une démonstration qui met à plat "l’horreur de la situation". Le dispositif scénique, tout en restant sobre, est d’une redoutable efficacité, avec des moments fulgurants pour aboutir à un final renversant. Un vrai coup de cœur dans le Off à Avignon 2017 qui a valu à la pièce de remporter le Prix Coups de Coeur du Club de la Presse et qui est jouée pour la première fois à Paris.
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