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"Parlons d'autre chose" : 10 jeunes comédiens décryptent leur génération sur scène
En 2015, un groupe de jeunes comédiennes et comédiens créent sous la houlette de leur professeur de théâtre Léonore Confino le collectif Birdland. Réceptive à leurs préoccupations générationnelles, elle écrit "Parlons d'autre chose" où s'exprime leur rapport au monde. Un spectacle novateur, bourré d’énergie et très contemporain, au Théâtre Tristan Bernard à Paris jusqu’au 31 décembre.
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Energie irrépressible
Tous âgés de moins de 30 ans, ils sont dix acteurs à incarner les membres d’une bande de lycéens comme il en existe depuis toujours. Régulièrement, ils se retrouvent, échangent, s’aiment, rivalisent d’affinités, se jalousent… L’amour, le sexe, les réseaux sociaux, la musique, l’alcool, la fête les réunissent dans une fuite des réalités qui ne cesse de les rattraper. Jusqu’au jour où une de leurs réunions clandestines va faire tout chavirer…D’abord alignés en rang d’oignons, leur chevelure masquant leur visage, le seul garçon étant de dos, elles et il semblent figés dans leur refus de voir le monde, comme refermés sur eux-mêmes. Cette statique ne va pas durer. Bien attifés dans leurs costumes sages, certains faisant penser à des uniformes, tous partent en vrille dès qu’ils se lèvent de leur chaise d’école. Les paroles fusent, ils traversent la scène de long en large, puis, dès que la musique résonne, ils gesticulent en tous sens, se dégrafent... L’énergie est irrépressible.
Climax
L’occupation de la scène par les comédiens, vide de décor hormis l’alignement des chaises en fond de cour, est une des grandes qualités de "Parlons d’autre chose". Les déplacements, la gestuelle de chacun constituent une chorégraphie collective. Ils sont comme des électrons libres qui s’entrechoquent, s’attirent et se repoussent, à l’image des rapports qui les unissent et les désunissent au gré d’humeurs fugaces.Quand la musique donne, une frénésie s’empare du groupe pour aboutir à une brisure. Le choc n’est pas sans rappeler le film "Climax" de Gaspar Noé, alors que la pièce lui est antérieure. Le sens est le même, celui d’une limite atteinte dans les rapports sociaux avec pour seule échappatoire la dislocation du groupe. Cette occupation de l’espace est redevable à une mise en scène de Catherine Shaub et aux chorégraphies de Megali B. qui transmettent une dynamique folle au service du sens.
Les comédiens usent de leur voix avec une virtuosité étonnante, n’hésitant pas à chanter en chœur, où à lancer leur texte dans un surprenant canon. Un texte qui sonne juste, nourri des sujets de toujours de l’entrée dans l’âge adulte, mais loin d’être à l’unisson, et adapté au temps. Chaque personnage a une identité propre et est source de conflit, mais tous sont en quête d’amour, de reconnaissance. Passé la crise, le sort réservé à tous n’est pas certain. Cette mise en suspens n'est pas hésitante, c'est un vrai choix. Celui de poser des questions sans y répondre forcément. Culotté.
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