Mort de Michel Piccoli : "Il était l'homme et l'acteur que j'aurais rêvé d'être et que je ne serai jamais", raconte l'acteur Pierre Arditi
"C'est un homme exceptionnel, un grand bonhomme", décrit sur franceinfo l'acteur Pierre Arditi, qui a eu "la chance de tourner deux fois" avec Michel Piccoli dans sa carrière. Il se souvient d'un homme "extraordinaire et incroyablement facétieux".
"Il était l'homme et l'acteur que j'aurais rêvé d'être et que je ne serai jamais", confesse l'acteur Pierre Arditi, lundi 18 mai sur franceinfo, alors qu'on apprend la mort de Michel Piccoli. Acteur, réalisateur, producteur, metteur en scène, ce monument du cinéma français est décédé à l'âge de 94 ans.
franceinfo : Comment décririez-vous Michel Piccoli ?
Pierre Arditi : C'est difficile de le décrire, parce qu'il a pris cent mille visages, Michel Piccoli. C'est d'ailleurs sa plus grande vertu et sa grande qualité. Il ne s'est jamais enfermé dans un personnage, dans une manière de jouer, c'est un caméléon. Il n'y a pas un film de Piccoli qui ressemble à un autre film de Piccoli. C'est quelqu'un qui a pris tous les risques et qui a eu comme plan de carrière, comme seul plan de carrière, son désir. Ce qu'il avait envie de faire, il le faisait. Même si on lui disait qu'il valait mieux faire autre chose, il n'en a jamais rien à foutre et c'est ce qui fait sa grandeur. Il a vécu, il a choisi. Et quand il a choisi, il a renoncé à tout le reste. C'est ça, Michel Piccoli. C'est un homme exceptionnel, un grand bonhomme.
Son autobiographie écrite avec Gilles Jacob s'intitule "J'ai vécu dans mes rêves". Il a vraiment vécu ses rêves ?
C'est ça. Michel Piccoli je l'ai admiré depuis mon adolescence, c'est quelqu'un qui m'a subjugué tout de suite et ça ne m'a jamais quitté. Je me suis toujours dit : il faut que j'arrive à être Michel Piccoli. Mais personne n'arrive à être Michel Piccoli. Tous les autres, on court derrière une image comme celle-la, mais on ne l'aura jamais parce qu'elle est unique, absolument unique. Et moi, j'ai eu la chance de tourner deux fois avec lui dans ma carrière. Une fois dans le remake des Grandes familles réalisé par Edouard Molinaro et une autre fois dans l'un des derniers films d'Alain Resnais qui s'appelle "Vous n'avez encore rien vu" et où il jouait le rôle de mon père.
J'ai rencontré, j'allais dire mon idole, mais j'ai rencontré mon Dieu. C'est-à-dire qu'il était l'homme et l'acteur que j'aurais rêvé d'être et que je ne serai jamais.
Pierre Arditià franceinfo
Il était tout à fait extraordinaire et incroyablement facétieux. Il avait l'air très sérieux par moments, mais Piccoli en réalité était très iconoclaste. Il se moquait des travers de la société dans laquelle il vivait, de ce que nous sommes. Il était absolument délicieux. Je me souviens quand on tournait les Grandes familles, il passait son temps à ricaner sur les autres, mais en ricaner adorablement, c'était merveilleux. On rêvait d'être caricaturé par lui. Et puis, évidemment, j'ai suivi aussi son engagement personnel dans la vie du pays, son engagement politique qui était pour moi totalement exemplaire. Donc si on me demandait : qu'est-ce que vous voulez faire dans la vie ? Je répondais : Je voudrais être Michel Piccoli. Il était à la fois totalement cohérent avec son engagement artistique et son engagement politique et citoyen. Pour moi, c'est l'idéal. Je cours tout le temps derrière cette image que je voudrais être, mais que je n'arrive jamais à atteindre.
Il dénonçait les travers de la société dans laquelle on vivait, mais il n'était pas nostalgique ?
Non. C'est quelqu'un qui a toujours avancé et qui est allé en avant tout le temps. D'une certaine manière, Piccoli, c'est un incorruptible. C'est quelqu'un qui avait décidé d'être l'homme qu'il est devenu. Même si, peut-être, lui-même ne se rendait pas compte à quel point il était précieux pour les autres. Et il n'en a jamais dévié. C'est d'ailleurs pour ça que nous tous, on l'admire comme acteur et comme homme. C'est une espèce de phare qui a traversé son époque et qui continuera de la traverser parce que des gens comme ça, ça meurt jamais. Heureusement, il reste des traces importantes. C'est un enfant insouciant, grave et iconoclaste qui est allé faire un tour dans les nuages.
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