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Macha Makeïeff crée une "Fuite" de Boulgakov virevoltante et chantante

Montée une seule fois en France il y a près de 40 ans, "La Fuite" du Russe Boulgakov fait l'ouverture de la saison au théâtre de la Criée, à Marseille. Entre farce et tragédie, Macha Makeïeff signe une mise en scène chantante et virevoltante. La pièce est présentée jusqu'au 20 octobre à Marseille, puis en tournée en France jusqu'en janvier.
Article rédigé par franceinfo - Odile Morain avec AFP
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Temps de lecture : 6min
La comédienne vanessa Fonte dans "la Fuite !" de Mikhaïl Boulgakov monté par Macha Makeïeff au théâtre de la Criée Marseille
 (BORIS HORVAT / AFP)

Macha Makaïeff monte à La Criée de Marseille "La Fuite !" de Mikhaïl Boulgakov. L'histoire se déroule en Russie au moment de la révolution Bolchévique. Sur la guerre entre les "Russes Blancs" et les rouges, Boulgakov invente un récit sous forme de huit songes. Une tragi-comédie où les acteurs jouent plusieurs rôles. Un long travail pour la metteur en scène et ses comédiens qui ont dû trouver le ton juste de la pièce. 

Reportage : J. Hessas / G. Milliet-Bouquet / D. Terrade

Victime visionnaire de la censure stalinienne

De cette pièce, commencée en 1928 et quatre fois réécrite, qui raconte la révolution soviétique du côté des vaincus et l'exil des Russes blancs, Mikhaïl Boulgakov (1891-1940), victime de la censure stalinienne, n'a jamais vu la mise en scène. Elle sera montée pour la première fois en URSS en 1956. "Cette pièce est un manifeste de liberté artistique. Elle raconte a priori quelque chose de la grande Histoire russe, la guerre civile", résume Macha Makeïeff. "Là c'est l'année 20-21, l'armée blanche est défaite, les bolchéviques ont pris le pouvoir, il y a ces espèces de tribus de réfugiés appelés Russes blancs dans lequel il y a des rares monarchiste, des libéraux, des intellectuels ou des gens pris par l'histoire, qui vont s'exiler". 
  (BORIS HORVAT / AFP)

Huit petits songes

En huit tableaux, huit songes, le spectateur assiste à leur exil tragique, fait de trahisons, de veuleries, de lâcheté où, pour sauver leur peau, l'évêque abandonne les moines, l'intellectuel dénonce la femme qu'il aime, l'officier du contre-espionnage monnaye de faux aveux, le ministre renie sa femme et parvient, malgré la guerre civile, à faire fortune dans le commerce de fourrure. On les croise d'abord dans une église, puis dans une gare en Crimée d'où les civils s'échappent tandis qu'un général sanguinaire fait pendre des innocents.

  (BORIS HORVAT / AFP)

Peu après, seul dans son palais dévasté de Sébastopol, le haut commandeur de l'armée, est contraint lui aussi à l'exil. On les retrouve tous, l'année suivante à Constantinople, cherchant ça et là des moyens de tromper la faim et la misère. Tous sauf un : l'ex-ministre du commerce Korzoukhine, richement installé dans un hôtel particulier parisien et que le goût du jeu conduira à sa perte.    

La virtuosité des comédiens

Onze comédiens se partagent les nombreux rôles de la pièce, à la fois acteurs, chanteurs, danseurs mais aussi tous musiciens, ayant tous appris un air d'accordéon notamment pour accompagner le tango polonais qu'ils chantent en choeur en fin de spectacle. "Il fallait des acteurs qui jouent le jeu et qui aient cette virtuosité de passer d'un registre à l'autre", raconte Macha Makeïeff qui a fait les costumes et les décors. Le chorégraphe Angelin Preljocaj en a réglé les pas de danse. Les comédiens jouent plusieurs rôles : il leur faut à peine trente secondes pour se transformer. Ils changent tout le temps de registres : certains sont valet, puis évêque, pour finir policier."Musicalement c'est rapide, il faut que ça soit très précis sinon on n'entend pas les notes, c'est un travail assez laborieux qui nécessité à la fois de l'esprit et du corps", souligne le comédien Alain Fromager.
Sylvain Levitte  et Samuel Glaume dans "La Fuite !"
 (BORIS HORVAT / AFP)

Pour Macha Makeïeff, "le génie de cette pièce, ce sont huit petits vaudevilles qui se succèdent, partagés par la grandeur et la médiocrité. On passe sans arrêt d'un registre à l'autre, entre drame et comédie". Jusqu'à la farce avec certains personnages rendus ridicules à force de chuter, tels des clowns de spectacles pour enfants.

  (BORIS HORVAT / AFP)

Une histoire personnelle 

La pièce rejoint l'histoire familiale de la metteur en scène dont les grands-parents ont fui la Russie rouge en 1920 pour prendre eux aussi le chemin de l'exil, jusqu'en Corse. Et c'est sous le regard d'une petite fille, Macha enfant, présente sur scène, qu'est contée la fuite d'anciens dignitaires tsaristes: un évêque caché dans un monastère où il croise la femme d'un ministre malade du typhus, à la recherche de son mari, un intellectuel, des généraux de l'armée impériale rattrapée par la défaite...

 
"La fuite" de Mikhaïl Boulgakov, théâtre de la Criée, jusqu'au 20 octobre. En tournée en France jusqu'en janvier.

7 > 9 novembre Théâtre National de Nice
14 > 15 novembre Le Parvis-Scène Nationale Tarbes-Pyrénnées
21 novembre Théâtre Grand Paris Sud, Seine Essonne-Sénart
29 novembre > 17 décembre Théâtre Gérard Philipe - CDN de Saint-Denis
21 > 22 décembre Théâtre Liberté - Scène Nationale de Toulon
9 > 13 janvier Théâtre Les Célestins à Lyon
19 > 20 janvier Le Quai à Angers 
  

La Fuite ! Propos du texte

Crimée, 1920 : ceux que l'on appelle les "Russes blancs" sont aux abois, la guerre civile qui a suivi le coup d'état bolchévique est perdue. Il ne reste d’autre issue que la fuite vers la Crimée, Sébastopol, Constantinople, puis Paris... En huit songes fantastiques, entre cauchemars et illuminations, Boulgakov transfigure le chaos d’une déroute

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