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Les "Estivants" de Gorki font palpiter la troupe de la Comédie-Française

Dans cette pièce finalisée en 1904, Maxime Gorki dépeint la nouvelle bourgeoisie russe qui chaque été se retrouve en villégiature dans une datcha, au bord de la mer. Des petits bourgeois désenchantés qui tournent un peu en rond, dans une société qui sombrera 10 ans plus tard.
Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
"Les Estivants" à la Comédie-Française
 (Cosimo Mirco Magliocca)

"Ils débarquent, ils s'ennuient", constate fataliste le gardien de la propriété. "Tous pareils les estivants, tous des patrons", ajoute son acolytes. Contrairement à Tchekhov, le théâtre de Gorki annonce l'imminence d'un bouleversement, il est l'emblème de la révolution à venir.

Elle s'annonce au travers de trois personnages qui vont troubler le ronron quotidien dans ce décor de bois de bouleaux, dont les troncs laissent apparaitre de multiples visages : la doctoresse pétrie d'idéaux révolutionnaire (Clotilde de Bayser impressionnante de présence) qui voudrait mettre en mouvement le jeune dilettante dont elle est amoureuse (Loic Corbery brulant et fougueux), mais aussi l'épouse clairvoyante et bravache de l'avocat véreux (excellente Sylvia Bergé). "Nous devons nous transformer complètement", s'exclame- t-elle à la fin de la pièce qui l'a montrée ouvrant enfin les yeux sur la petitesse de cette existence collective. 

Car les femmes se font entendre chez Gorki, elles ont le désir de liberté et la prémonition des bouleversements futurs.  

Clotilde de Bayser et Sylvia Bergé
 (Cosimo Mirco Magliocca)
Gérard Desarthe a choisi la version scénique mise au point par Peter Stein et Bo-tho Strauss, un dispositif où tous les protagonistes sont présents sur scène. Un choix qui permet au metteur en scène d'exercer ses talents de direction d'acteur.

Il fait des "Estivants" une pièce chorale au vrai sens du terme. Un exercice idéal pour une troupe du Français qui excelle à s'effacer ou à exister en une fraction de seconde. 

JN.Mirande, F.Bobin, T.Rousseau, R.Carles

Si au premier acte aucune personnalité ne se dégage vraiment, dès le deuxième, les incompréhensions et les désaccords s'installent, les personnalités s'affirment, les liens qui unissent ces hommes et ces femmes se dévoilent, les masques tombent. On se laisse prendre par les doutes, les interrogations et les petites lâchetés de cette belle galerie de portraits.

Tous les comédiens seraient à citer : Samuel Labarthe, le romancier cynique, Bruno Raffaelli, l'oncle Souslov qui cherche un sens à sa vie, Hervé Pierre l'avocat médiocre, Michel Favory et Martine Chevallier, délicieux couple fusionnel, Alexandre Pavloff , épatant dans le rôle de l'amoureux transi suicidaire… 
Samuel Labarthe, Hervé Pierre, Bruno Raffaelli
 (Cosimo Mirco Magliocca)
Les amateurs de théâtre pourront donc comparer avec intérêt l'univers de Tchekhov avec l'"Ivanov" joué à l'Odéon et celui de Gorki à la Comédie-Française. Nous avons opté pour Gorki, moins connu peut être, mais tout aussi passionnant sur la société russe et le basculement d'un monde. 
Mise en scène de Gérard Desarthe
 (Cosimo Mirco Magliocca)

"Les Estivants" à la Comédie-Française
De Maxime Gorki, mise en scène de Gérard Desarthe
Du 7 février au 25 mai 2015
3 heures avec entracte
Salle Richelieu
1 Place Colette, Paris1er
Réservation : 0825 10 16 80








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