INTERVIEW : Quand Olivier Bourdeaut, l'auteur de "En attendant Bojangles", découvre son best-seller sur scène à Avignon
La pièce "En attendant Bojangles", adaptée et mise en scène par Victoire Berger-Perrin, est l’un de nos coups de cœur du Off d’Avignon. Lire notre critique ici. Le roman a reçu le prix France Télévisions.
Comment vous sentez-vous ?
Olivier Bourdeaut : Je suis bouleversé. J’aimerais bien dissimuler, j’aimerais bien être plus digne, je ne le suis pas, j’ai encore la voix tremblante. C’est particulier la vie quand même. Vous êtes tout seul dans une chambre, vous écrivez des bêtises, et quelques années plus tard il y a des gens qui reprennent vos âneries avec une mise en scène magnifique et des comédiens splendides. Je manque de vocabulaire, ce qui est un comble pour quelqu’un qui doit écrire !
Votre texte prend une autre dimension sur scène ?
J’ai la chance d’écrire de manière très visuelle et aujourd’hui j’ai constaté que ça se rapprochait beaucoup de ce que j’avais en tête à l’époque de l’écriture. Ça se rapproche complètement de ce que j’avais imaginé.
Je connaissais Victoire Berger-Perrin, elle est en couple avec un de mes amis. Il y a trois personnes qui s’intéressaient à adapter cette pièce. Lorsque Victoire m’a transmis son dossier, j’ai été largement convaincu. J’ai accepté son dossier par correction et c’est elle qui a été la plus convaincante (elle signe ici sa première mise en scène).
Pour l’adaptation au cinéma, il y a du monde sur les rangs ?
Oui, je suis devenu une grande personne, tenu par des engagements désormais et je ne peux pas dévoiler le nom du réalisateur. Tous les projets étaient très intéressants, s’il n’avait tenu qu’à moi, j’aurais choisi tout le monde, je ne suis pas un coupeur de têtes. Ça a été assez délicat et triste de dire non à des gens et une grande joie de dire oui.
C’est un projet français ?
Oui. Vous essayez de creuser, hélas je ne vais pas pouvoir vous satisfaire (rires).
Pour le théâtre, vous avez été tenu au courant de la distribution ?
Oui, Gallimard pour la sortie du livre de poche a eu la gentillesse d’organiser une grande fête dans son hôtel particulier, c’était absolument délirant car ils avaient recréé l’appartement du roman dans un des salons et les comédiens étaient là. Je les ai vus à cette occasion. On a fait une fête dantesque et Anne Charrier était déjà dans son rôle a priori, elle s’est promenée pieds nus toute la soirée, c’était très sympa !
En ce qui concerne l’adaptation, vous êtes en accord avec les choix de Victoire Berger-Perrin ?
Oui, oui, oui, oui… forcément comme je connais ce texte par cœur, pour les raisons que vous connaissez, non seulement je l’ai écrit mais j’ai dû le relire et j’en parle depuis un an et demi, je n’ai pas pu m’empêcher de voir des choses qui ont été transformées… Mais c’est très bien. Parfois je récitais dans ma tête, en anticipant ce qui allait venir et ça ne venait pas. Mais il s’agit d’une adaptation et il faut faire des choix. Les choix ont été faits et ils sont bons.
Avez-vous demandé à lire le texte ?
Je dois être très honnête, je suis un mauvais élève, je le serai toujours. Elle m’a envoyé le texte et je ne l’ai pas lu, je n’avais pas le temps. Je travaillais à l’écriture de mon prochain roman et je faisais la tournée de promotion à l’étranger et en France de "En attendant Bojangles". Je suis un paresseux, chaque mission semble me noyer. Donc je l’ai reçu, j’ai commencé à le lire et je me suis dit qu’il valait mieux que j’attende, j’ai bien fait d’ailleurs.
Vous êtes un incorrigible (ou faux) modeste. Malgré le succès vous continuez à nous jouer le loser ?!
Il vous arrive sûrement de lire des beaux livres qui ne sont lus par personne. C’est une chance, j’ai de la chance. Je suis pourri gâté, qu’est-ce que vous voulez que je vous dise (rires). Les trente-cinq premières années de ma vie ont été un long déclin, anonyme, puisque personne n’attendait quoi que ce soit de moi. Vraisemblablement je viens de connaître l’acmé de mon existence et les trente-cinq prochaines seront une longue chute, en public. C’est un luxe de chuter en public…
Un mot sur ce que vous êtes en train d’écrire ?
Ce sera beaucoup plus rugueux. C’est la rencontre de deux hommes que tout oppose, leurs origines et leurs objectifs. Ils se rencontrent dans les marais salants. Ce sont les quelques jours de leur rencontre. Ils s’envient, se détestent, se jalousent. J’espère avoir retranscrit avec mes mots la poésie des marais salants dans lesquels j’ai travaillé pendant quatre mois, dans lesquels j’ai été très mauvais. Il n’en reste pas moins que j’ai beaucoup aimé ce métier. On peut aimer faire quelque chose et le faire mal. C’est le cas pour le sexe par exemple (rires), tout le monde aime ça mais il y en a qui le font mal !
Sur votre talent d’écriture, vous êtes rassuré aujourd’hui ?
Je n’en sais rien, je ne suis jamais fier de ce que je fais. Je suis content lorsque je termine ma page et le lendemain je suis accablé par les horreurs que j’ai écrites. Non, non, je suis rarement fier de ce que je fais, mais mes éditeurs sont confiants pour moi !
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