Festival Off d'Avignon : avec "Reconstitution", Pascal Rambert passe du In au Off après "Architecture"
Il est rare qu’un auteur et metteur en scène ait une pièce dans le In et le Off du Festival d’Avignon, c’est le cas de Pascal Rambert.
Après avoir ouvert le 73e Festival d’Avignon dans la Cour d’honneur avec Architecture, Pascal Rambert présentait Reconstitution dans le cadre du festival Off, à La Manufacture jusqu’au 14 juillet, avant de faire la réouverture du Théâtre 14 à Paris les 21, 22 et 23 janvier 2020. Intéressant de voir la continuité de l’auteur dans deux conceptions théâtrales différentes. L’une prestigieuse, avec des stars de la scène, la seconde plus modeste mais non moins ambitieuse.
Reconstitution de l'instant et de l'être
Un homme et une femme séparés depuis des lustres après avoir eu un enfant, se sont donné rendez-vous dans un hangar pour reconstituer avec une pléiade d’accessoires le moment de leur première rencontre au bord de la mer. En quatre temps, ils déchiffrent cet instant fondateur et ses conséquences, à partir du passé, des souvenirs, pour décrypter leur présent.
Reconstitution est comme la suite de Clôture de l’amour, où un couple se déchirait avec une rancœur qui atteignait le tragique. Pascal Rambert assume et revendique cette filiation, déclarant qu’il aimerait enchaîner les deux pièces, l’une après l’autre dans un seul spectacle, comme un diptyque. Reconstitution ne signifie pas réconciliation. Il s’agirait plutôt de renouer avec le fil d’une histoire, celle de deux vies intimement imbriquées, séparées dans un trauma qu’il faut résoudre. Pour s’en sortir, il faut en reconstituer les origines, le plus exactement possible, comme dans une psychanalyse fondée sur du concret. Avec le paysage, les objets, les lieux, la pluie et le vent qui entouraient cette rencontre. De cette reproduction, recomposition la plus exacte de l'instant, naîtra la reconstitution de l’être, ou pas.
Une psychanalyse du temps
Présenté parallèlement à Architecture à Avignon, Reconstitution entretient des correspondances avec la pièce d’ouverture du In. Elles participent de continuités thématiques et d’une cohérence propre à Pascal Rambert, auteur et metteur en scène. Le dépouillement de la scène s’ouvre sur tous les possibles, les réminiscences du passé alimentent le présent, la temporalité se dilate dans la répétition de motifs ou la durée d’un long monologue. Le temps fait son travail sur les personnes/personnages et est au cœur de l’œuvre.
Ce qui pourrait sembler abstrait se révèle concret, voire ludique, sur scène. Les souvenirs sont des livres et des vêtements rangés dans des boîtes, l’on prépare en temps réel une soupe de légumes pimentée de pages d’ouvrages, le couple construit un cadre sur lequel il dresse une bâche bleue pour évoquer le ciel de leur rencontre. Dessus tombe goutte à goutte une pluie artificielle issue d’un tuyau d’arrosage…
Car la reconstitution de cette rencontre est aussi une reconstitution théâtrale. Celle d’un moment, d’un temps, d’un sentiment. Il faut utiliser les moyens du bord tout en s’en rapprochant au maximum, pour être au plus juste. Au spectateur de combler les vides. Cela se nomme poésie.
Reconstitution
De Pascal Rambert
Mise en scène : Pascale Rambert
Interprètes : Véro Dahuron et Guy Delamotte
Joué à La Manufacture jusqu’au 14 juillet, Reconstitution fera la réouverture du Théâtre 14 à Paris les 21, 22 et 23 janvier 2020.
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