Festival d'Avignon : notre bilan théâtral
Et pour commencer, les très émouvantes "Sœurs Malacuso" d’Emma Dante. Une histoire de famille du petit peuple de Palerme contée avec une force, une crudité et une poésie qui touchent au cœur. On gardera longtemps en mémoire ces sept femmes, si peu actrices, et, au milieu de cette misère, d’une humanité folle.
"Fountainhead", d'Ivo Van Hove, nous a fait l'effet d'un coup de poing. Avec son adaptation du roman de la philosophe et romancière américaine Ayn Rand, le Flamand pose la question de la création, et des choix possibles de l’artiste. Sa mise en scène éblouissante mêle spectaculaire et simplicité : quatre heures qui passent en un éclair.
Bien sûr, Culturebox était à la première du "Henry VI" monté par Thomas Jolly, dans une version de 18 heures inoubliable, un long voyage comme Avignon en a le secret. La mise en scène de Thomas Jolly, 32 ans, regorge d'inventivité, tient en haleine comme une bonne série télé, un théâtre de partage, un vrai théâtre populaire. Jusqu'au bout de la nuit, le public n'a pas lâché. Désormais il y aura ceux qui en étaient, du Henry VI de 18 h, et les autres !
Si côté In, Thomas Jolly nous a subjugué par sa maturité, sa ténacité et sa passion du théâtre, côté Off, le metteur en scène Laurent Hatat nous a impressionné par sa très belle et poignante adaptation de "Retour à Reims", l'essai autobiographique de Didier Eribon. Hatat transforme l'introspection de l'écrivain en un face-à-face entre un fils d'ouvrier qui a rompu avec son milieu et sa mère, qui trente ans après son départ, tente de comprendre.
Très belle adaptation également des "Cavalier" de Joseph Kessel par Eric Bouvron, comédien globe-trotter d’origine sud-africaine. Avec son "Théâtre à l'africaine où l'on fait des spectacles avec trois fois rien", on est d’emblée totalement transporté en Afghanistan.
Autre belle surprise, "30/40 Livingston", écrit et joué par Sergi Lopez et son comparse Jorge Pico. Sergi nous offre une prestation dramatique, humoristique et physique époustouflante dans ce spectacle entre fable et thriller.
On aimerait citer aussi (parmi les 1300 spectacles du Off !), dans des registres extrêmement variés, "Jeanne et Marguerite", "Les coquelicots des tranchées", "Luchini et moi", ou encore "Rester vivant", de Yves-Noël Genod. Sa promenade avec Baudelaire qui se fait dans le noir total est l'un de ces instants magiques qu'affectionnent tant les festivaliers.
Ces belles découvertes ont largement compensé les déceptions : en ouverture, un "Prince de Hombourg", intéressant mais sans plus. "I Am", de Lemi Ponifasio, originaire des Îles Samoa, est une oraison funèbre non sous-titrée, à laquelle nous n'avons pas compris grand-chose. Sans compter un "Vitrioli" mis en scène par Olivier Py qui ne nous a pas convaincu du charme et du talent des jeunes auteurs grecs. Enfin, "Hypérion" de Hölderlin, que nous n'avons pas vu, mais de l'avis général une énorme déception mise en scène par Marie-José Malis, qui remplace Didier Bezace au théâtre d'Aubervilliers.
Au total les moments heureux n'ont pas été forcément là où on les attendait et les déceptions heureusement pas trop nombreuses...
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