Avignon : "Meursaults", un texte fort, une mise en scène effacée
Un long mur blanchi à la chaux, deux portes en bois vert et un citronnier. Une cour dans un village algérien. Le décor est réussi. Sobre.
Pour son adaptation de "Meursault, contre-enquête" du journaliste-essayiste Kamel Daoud (Goncourt du premier roman), Philippe Berling a voulu donner chair à deux colères. Celle de Haroun, qui dit être le frère de la victime de Mersault, et celle de sa mère. Le premier est bavard, affabulateur. La seconde ne s'exprime que par des chants, tour à tour plaintifs ou joyeux.
Berling tente, en quelque sorte, le monologue à deux. Il parle. Elle gémit. Il ressasse. Elle chante. Le texte est puissant, aucun doute là dessus. Kamel Daoud a réussi un très grand roman que les jurés du Goncourt ne se seraient pas déshonorés de choisir l'an dernier, l'adaptation théâtrale garde sa qualité. Mais au-delà du texte, pas grand-chose. Ahmed Benaïssa fait le travail, et il n'est pas simple. Le texte est riche, parfois dur en bouche, et s'il lui arrive d'accrocher sur une phrase, son implication est totale. Les chants d'Anna Andreotti sont moins convaincants, leur permanence en banalise la portée.
On attend surtout que la mise en scène nous saisisse, s'émancipe de sa fidélité absolue aux mots. Mais jusqu'au bout, Haroun et sa mère vont continuer à réveiller leurs blessures sur le même rythme. Un grand texte, c'est indéniable. Mais on aurait aimé un peu plus de théâtre.
Lisez la critique de "Meursault, contre-enquête" par Laurence Houot
"Meursaults" du 21 au 25 juillet 2015
Théâtre Benoît XII 12 rue des Teinturiers à Avignon
La pièce sera ensuite donnée à Cavaillon, Toulon, Toulouse, Marseille ou Ajaccio.
Elle sera aussi jouée dans les Instituts Français d'Algérie du 9 au 18 février 2016.
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