La bataille est engagée entre Coca-Cola et Royal de Luxe
Jacques Leroy, le président de la compagnie de théâtre, a un peu le sentiment de mener "un combat de David contre Goliath", mais "la taille de l'adversaire" ne lui "fait pas peur". "C'est une question de morale", assure-t-il à l'AFP.
Une plainte déposée en juin
L'association a attaqué en juin le numéro un mondial des boissons non alcoolisées pour "parasitisme" : Coca-Cola n'a pas seulement "pillé ses créations" et "capté sa notoriété", la firme a aussi adopté "un comportement gravement contraire à l'éthique des affaires", martèle l'avocat de Royal de Luxe, Me Frédéric Boucly.
Jeudi, les parties avaient un premier rendez-vous devant le tribunal de commerce de Nanterre.
Au coeur des hostilités, un père Noël qui n'a pas fait plaisir à tout le monde, en cette fin 2012.
A l'approche des festivités, Coca-Cola lance une campagne de communication sous la forme de spots à la télévision, au cinéma et sur le web, diffusés dans 61 pays, selon l'avocat.
Dans un clip de Coca-Cola, un Père Noël qui a tout de celui de Royal de Luxe
Dans ce clip visible sur internet, un camion rouge dépose, un 24 décembre, un gros paquet blanc au beau milieu d'une ville triste. Surprise : un gigantesque Père Noël en sort, et se met à défiler dans la rue, telle une marionnette manipulée par des habitants qui tirent des fils.
Même "regard bienveillant", même "clignement d'oeil", "même scénographie" : pour Jacques Leroy, le Santa-Claus de Coca-Cola a tout du célèbre "géant" de Royal de Luxe, personnage poétique rendu vivant par une armée de "lilliputiens" et une ingénieuse machinerie, "marques de fabrique" de la troupe.
S'estimant victime d'un détournement de notoriété, l'association, fondée en 1979 par son metteur en scène emblématique Jean-Luc Courcoult, demande des dommages et intérêts importants, sans en préciser le montant.
Coca-Cola avait sollicité la troupe
Quelques mois avant la diffusion de la campagne, Royal de Luxe reçoit de nombreux courriels de Coca-Cola et d'agences de communication. Ils lui proposent une offre de partenariat, elle décline. Pas par anticapitalisme, mais par refus "d'être au service d'une marque". "Nous n'acceptons que le mécénat privé", qui assure 80% des finances de l'association, souligne Jacques Leroy.
Selon l'assignation consultée par l'AFP, des huissiers ont saisi le 24 janvier 2013 dans les ordinateurs de Coca-Cola France à Issy-les-Moulineaux, des courriels mettant en évidence l'intérêt du groupe pour les "géants". Contacté par l'AFP, Coca-Cola, qui a engagé un recours contre la saisie de ces pièces, n'a pas souhaité s'exprimer.
Dans un de ces courriels saisis, un collaborateur de Coca-Cola Services France évoque la possibilité de réaliser un Père Noël géant, avant de proposer à Royal de Luxe d'être citée comme "l'inspiratrice de cette belle idée".
La multinationale nie tout plagiat
Mais dès mars 2012, une juriste du groupe avait mis en garde dans un courriel contre un risque de procès pour parasitisme si la multinationale reproduisait "les mêmes mécanismes" pour son Père Noël.
Malgré le refus de Royal de Luxe, "Coca-Cola a continué son projet, en toute connaissance des risques juridiques", attaque Me Boucly, fustigeant "le sentiment d'impunité" et "le cynisme" du mastodonte américain.
Face aux accusations, Coca-Cola s'était défendu dans le journal Presse-Océan, fin décembre 2012, affirmant que "Royal de Luxe ne peut pas réclamer le copyright sur l'idée d'utiliser une marionnette géante". Le groupe avait aussi diffusé un QNA (questions et réponses) en interne dans lequel il réfutait tout plagiat : "Nous ne produisons pas de théâtre de rue avec la marionnette de Père Noël (...), notre personnage est unique sous cette forme."
Certes, Royal de Luxe ne revendique pas la paternité des géants, stars séculaires des carnavals. Mais pour son président, la "saga des géants" est unique par "sa liturgie" qui a fait rêver depuis 1993 80 millions de personnes, de Nantes à Santiago, en passant par Liverpool.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.