Interview "Histoires de Paris" au Bon Marché : "C'est un spectacle conté, en musique" pour raviver la mémoire d'un monument de la capitale
Mercredi 18 septembre, 21h15, au cœur du Bon Marché, un air gai d'un standard de jazz est joué au piano : le spectacle conté, consacré au fascinant projet architectural du Louvre et de sa pyramide, des années 1981 à 1989, est lancé. C'est l'une des sept Histoires de Paris animées par Fabrice Drouelle dans l'enceinte du grand magasin historique de la capitale jusqu'au 30 octobre 2024.
Debout devant son pupitre, le journaliste raconte le pari de la création de ce projet : du choix de l'architecte Ieoh Ming Pei voulu par le président François Mitterrand en passant par les enjeux politiques, les protagonistes, mais aussi les détracteurs qui s'opposèrent au défi insensé de modifier la conception structurelle de ce joyau historique où repose la mémoire de notre humanité.
Une heure et vingt minutes pour narrer cette aventure avec un déluge d'informations sur les coulisses du projet grâce à des extraits sonores et la présence de Claude Mollard, chargé de mission de Jack Lang en 1981, venu raconter des anecdotes. Des intermèdes musicaux s'immiscent dans le récit avec la soprano Chantal Santon, qui dépoussière des chansons des années 1950 comme I love Paris de Cole Porter ou Gare de Lyon de Barbara, accompagnée par un pianiste. Une respiration à laquelle on ne s'attend pas et qui illumine cette parenthèse narrative bienvenue dans le chaos de nos vies trépidantes.
Après sa fermeture, le Bon Marché plonge dans l'histoire de Paris et de ses monuments : les Grands Boulevards (25/09), la tour Eiffel (2/10), les deux plateaux/colonnes de Buren (9/10), la tour Montparnasse (16/10), Notre-Dame de Paris (23/10) et Saint-Germain des Prés (30/10). Chaque mercredi soir, accompagné d'un pianiste et d'une chanteuse lyrique, le journaliste Fabrice Drouelle reçoit un invité en lien avec la thématique pour une interview, qu'il s'agisse d'experts ou de personnalités publiques, comme Daniel Buren pour les Colonnes qui portent son nom au Palais-Royal.
Rencontre et explications sur la genèse de cet événement avec Frédéric Bodenes, directeur artistique et image du Bon Marché.
Franceinfo culture : En 2022, vous avez proposé du théâtre immersif avec "Au Bonheur des dames" puis, en 2023, un spectacle avec le cirque Le Roux. Cette rentrée, ce sont des représentations contées en musique.
Frédéric Bodenes : C'est un spectacle en musique qui ne prend pas forcément la place des représentations comme Au Bonheur des dames d'après la pièce d'Émile Zola ou Entre Chiens et louves. Il est lié à l'événement des mois de septembre/octobre – l'exposition Paris Paris ! – et se tient en parallèle du spectacle du cirque Le Roux.
Notre objectif est de faire vivre le magasin la nuit autrement que par notre raison d'être de commerçants. J'ai proposé à Fabrice Drouelle – avec qui j'avais travaillé en utilisant sa voix pour Au Bonheur des dames – de faire des histoires de Paris. C'est un spectacle conté où il narre une histoire d'un monument parisien tous les mercredis soir pendant la durée de l'exposition. Pour moi, c'est le Pierre Bellemare d'aujourd'hui avec son côté enquête.
Il y a des intermèdes musicaux ?
Ce spectacle est associé à Pierre-Yves Plat, un pianiste que je connais depuis longtemps. Il a retravaillé des chansons françaises très connues comme du Barbara, du Josephine Baker, Les Grands Boulevards d'Yves Montand et du classique aussi, comme La Traviata. Ces chansons autour de Paris sont jouées en live au piano et chantées par un binôme de chanteuses – Chantal Santon et Marine Lafdal-Franc – qui se positionnent dans le discours de Fabrice.
Le choix des monuments n'est pas anodin ?
Il y a le récit, des interludes musicaux et, après dans la dernière partie, un débat avec un invité à chaque fois en relation avec le monument évoqué : pour le Louvre, c'est Claude Mollard, chargé de mission de Jack Lang en 1981, pour les colonnes de Buren, c'est Daniel Buren... puis la soirée se termine avec un échange avec le public.
Nous avons choisi des monuments parisiens avec des histoires intéressantes à raconter et vraies : comme celle dans les années 1920 de cet Américain qui a vendu la tour Eiffel. Fabrice les raconte avec sa façon de jouer avec les textes. Je l'avais vu à Avignon sur scène, il y a un an, et j'avais trouvé sa présence scénique superbe. Je l'adore déjà à la radio, il a un talent d'orateur exceptionnel. Il a écrit sept textes sur les sept monuments. Même si on connaît l'histoire, on apprend plein de choses. Dans le magasin, on utilise l'espace du dispositif du cirque Le Roux pour accueillir les 450 personnes par soir pendant 1h20.
Ce spectacle est en rapport avec l'exposition actuelle ?
Paris Paris ! est une exposition – qui a commencé fin août et dure jusqu'à fin octobre – à l'origine commerciale autour de Paris qui se situe sur quatre espaces dans le magasin. L'exposition n'est pas incarnée comme on peut le faire d'habitude, c'est la tour Eiffel qui est à l'honneur, elle est partout. On avait envie de prolonger cet amour de Paris, peut être créé par les Jeux olympiques !
Tout au long de l'année, le magasin propose des événements ?
On a six grandes prises de paroles par an. La première, en janvier, c'est quelque chose que j'ai lancé il y a dix ans, c'est une carte blanche à un artiste d'art contemporain. J'avais débuté avec Ai Weiwei, il y a eu, par exemple, aussi, Subodh Gupta. C'est un hommage au blanc inventé par Aristide Boucicaut mais traduit par de l'art contemporain. La seule contrainte que je demande aux artistes, c'est qu'il y ait du blanc dans l'œuvre. Par exemple, Chiharu Shiota – qui travaille essentiellement avec des fils noirs et rouges – a pour la première fois utilisé le fil blanc. Ce n'est pas une exposition mercantile puisqu'on ne vend rien à part un catalogue et un tote bag. En 2025, la dixième carte blanche sera consacrée à Ernesto Neto, un artiste brésilien qui travaille beaucoup le textile et le tissage.
Nous proposons, ensuite, des thématiques liées à la tendance comme Philippe Katerine et le bonheur. Cette année, on a travaillé avec Sarah Andelman (ex Colette) avec sa proposition Mise en page qui mettait le livre en avant. Après cette exposition liée à l'air du temps, on donne à nos clients des envies d'évasion et de voyage comme avec la thématique Tous fadas, autour de Marseille et du sud. En septembre, on propose un événement autour d'un quartier ou d'une ville comme Paris Paris !. Puis, ce sera la thématique Noël.
Le dernier événement annuel, c'est le spectacle que l'on a initié pour la première fois en septembre 2022 avec l'expérience théâtre et qui se poursuit depuis septembre 2023 avec la compagnie circassienne Le Roux : Entre chiens et louves où huit virtuoses défient les lois de la gravité. Suite à son succès, le spectacle a repris pour quatre mois tous les jeudis, vendredis et samedis, jusqu'à fin décembre 2024.
Vous proposez à vos clients de venir rêver, flâner, rencontrer des artistes qu'ils connaissent ou pas.
J'ai besoin de proposer quelque chose qui m'émeut, que je trouve waouh ! C'est un grand investissement de la part du grand magasin, c'est quelque chose qui coûte cher. Il ne faut pas se tromper même si le but n'est pas de faire de l'argent. C'est un investissement d'image pour donner du plaisir et faire vivre le magasin autrement en se différenciant de la concurrence. Ainsi, on filme ce spectacle Histoires de Paris que l'on proposera dans le catalogue de Noël : des QR codes permettront à nos clients de l'écouter.
"Histoires de Paris". Chaque mercredi à 21h15 jusqu'au 30 octobre 2024. 40 euros. Durée : 1h20. Spectacle assis avec placement libre au RDC et au 1er étage. Le Bon Marché Rive Gauche, 24 rue de Sèvres, 75007 Paris. Réservation en ligne.
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