Montpellier Danse célèbre le centenaire de Merce Cunningham, "l'Einstein de la danse"
Cent ans après sa naissance et dix ans après sa mort, le danseur et chorégraphe américain est au cœur de célébrations organisées mercredi par le festival Montpellier Danse.
"Si je n'avais pas croisé l'œuvre de Cunningham, je n'aurais sans doute jamais travaillé dans la danse", a confié mercredi le directeur du festival Montpellier Danse Jean-Paul Montanari, en présentant Un Jour avec Merce C..
Cunningham avait multiplié les passages à Montpellier, ville avec laquelle il avait fini par créer un lien profond. Grâce à ce précurseur américain, qu'il côtoie à partir de 1985 au gré de ses visites à Montpellier, Jean-Paul Montanari comprend alors que cette discipline "peut être un art majeur et que l'on peut y consacrer sa vie".
Pour faire un "clin d'œil amical au plus grand chorégraphe du XXe siècle", dont danseurs et chorégraphes se rappellent la "présence lumineuse" et "l'œil pétillant", le festival a élaboré une riche programmation pour mercredi, incluant notamment une classe de la technique Cunningham en public, des projections, un spectacle du bras droit de Cunningham, Trevor Carlson.
Un spectacle et un livret spécial pour celui qui a libéré la danse de tout carcan
Les pièces Summerspace (1958) et Exchange (1978) seront également dansées mercredi soir par le ballet de l'Opéra de Lyon à l'Opéra Berlioz de Montpellier et l'anniversaire du maître donne aussi lieu, toujours mercredi, à la publication d'un livret spécial gratuit d'une quarantaine de pages intitulé Un Américain à Montpellier.
Né le 16 avril 1919 à Centralia, dans l'État de Washington (nord-ouest des États-Unis), celui qui a libéré la danse de sa soumission à la musique, du décor et de la narration, était fils d'avocat et avait étudié le théâtre et la danse de 1937 à 1939 à la Cornish School à Seattle (nord-ouest).
C'est dans cet établissement qu'il rencontre le compositeur de musique contemporaine expérimentale et philosophe John Cage, qui sera son compagnon à la ville comme à la scène, jusqu'au décès de ce dernier en 1992.
Des débuts avec Martha Graham, avant de s'inscrire à l'avant-garde de la danse
Engagé en 1939 comme soliste dans la compagnie de Martha Graham, pionnière de la "modern dance", Cunningham fonde sa compagnie en 1953 et renouvelle radicalement les codes de la danse. Il juge notamment que "le mouvement n'a pas à traduire l'émotion, il doit en être la source". Sous l'influence de Cage, il introduit également la notion de hasard dans la chorégraphie, n'hésitant pas à tirer aux dés les trajectoires des danseurs ou l'ordre des séquences.
Merce Cunningham est resté à la pointe de l'avant-garde toute sa vie, utilisant la vidéo dès les années 1970 et l'informatique dès le début des années 1990 pour composer des chorégraphies.
Incompris aux États-Unis, il connaît également des débuts difficiles lors de sa première venue à Montpellier Danse en 1985 : ses "Events", basés sur des systèmes aléatoires, désarçonnent une large partie du public. Incommodés par la musique subversive de John Cage, qui mêle bruits et musique électronique, et par la dissociation des mouvements des danseurs et de la musique, des spectateurs révoltés sortent en hurlant...
Des huées à la reconnaissance
Au fil du temps, à Montpellier comme sur d'autres scènes, Cunningham sera reconnu comme un grand créateur et lors de sa dernière venue en 2005, alors qu'il ne peut plus marcher, le patriarche de la danse contemporaine est acclamé lors d'une standing ovation de 15 minutes.
Parmi les temps forts des visites de Cunningham à Montpellier Danse, restent de multiples instants magiques, notamment lors d'un "Event" en 1995 : Merce reste seul en scène en plein air et danse de manière facétieuse avec une chaise pliante.
Ultime déclaration d'amour à Montpellier, il a demandé qu'une partie de ses cendres soit répandue au cœur de la Cité internationale de la Danse de Montpellier, au pied du studio qui porte son nom.
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