"Montrer des récits de lesbiennes heureuses, c'est un message politique" : Iris Brey présente sa série "Split" au Festival Séries Mania
"Dès qu'elle est arrivée sur le tournage, on a tout de suite su qu'elle était à sa place de réalisatrice", lance Jenny Beth, l'une des deux actrices principales de Split, au sujet d'Iris Brey. Autrice de Sex and the Series (2018) et du Regard féminin (2020), l'universitaire franco-américaine a largement contribué à populariser la question du sexisme à l'écran et notamment la notion de male gaze (regard masculin).
Avec Split, bientôt diffusée sur France TV Slash, Iris Brey passe donc de la théorie à la pratique, faisant valoir le regard féminin, qui filmerait non pas les femmes comme des objets de désir mais qui se placerait au cœur de l'expérience féminine et de ce que les héroïnes ressentent.
Composée de 5 épisodes de 20 minutes, la série raconte l'histoire d'Anne, interprétée par Alma Jodorowsky, une cascadeuse d’une trentaine d’années, qui tombe amoureuse de la star qu’elle double durant le tournage d’un film. Tout l'enjeu sera de savoir si elle, qui se pensait heureuse dans son couple, aura le courage de sortir de l’hétérosexualité pour se confronter à ce désir bouleversant. Jehnny Beth, César du meilleur espoir féminin avec Un amour impossible (2019) lui donne la réplique et complète ce duo amoureux.
La fiction pour impacter le réel
La fiction, dans les séries ou les films, permet de créer de nouveaux imaginaires chez les téléspectateurs et éveiller à d'autres types de représentations. Pour Iris Brey, étant donné que les sexualités féminines sont peu représentées dans l'espace public, sa série est un moyen de réfléchir à d'autres modalités d'amour. "Montrer des récits de lesbiennes heureuses, c'est un message politique", affirme-t-elle.
Dans Split, elle a mis en pratique sa théorie du regard féminin dans sa façon de filmer, mais aussi d'autres théories féministes, notamment dans le récit, autour du schéma hétérosexuel. "Sortir de l'hétérosexualité, c'est renoncer à un certain nombre de privilèges. C'était important d'en parler, mais de montrer aussi la joie, le bonheur, la vie qui arrive avec", nous confie la réalisatrice.
Le "split screen" pour raconter le désir
Dans la série, très peu de nudité, mais des plans serrés, sur des lèvres, des poils qui se hérissent ou la chair de poule d'une jambe, pour nous faire ressentir de très près les sensations de désir qu'éprouvent les deux personnages, à l'aide du split screen (séparation de l’écran en plusieurs cases).
"Le split screen apporte un côté expérimental tout en restant dans les sensations. Dans les scènes de sexe, ça nous permet de montrer à la fois les corps et les visages. On a deux corps qui se répondent. Je voulais vraiment montrer que le sexe peut sortir de la domination et qu'il peut être un récit de l'échange et du partage", nous explique la réalisatrice.
Autre volonté d'Iris Brey avec le split screen, celle de créer une nouvelle grammaire visuelle et de mettre la poésie en images. Ainsi, elle superpose des moments de tendresse amoureuse avec des images de nature. L'universitaire souhaite continuer à porter sa casquette de réalisatrice : "Je pense que j'aimerais bien travailler sur un long-métrage. Ce sera aussi une histoire d'amour."
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