Quand les anciens colonisateurs européens décident de restituer des œuvres pillées en Afrique
Si la France s'apprête à rendre au Bénin une partie du "Trésor de Béhanzin", d'autres pays se sont engagés à rejoindre le processus de restitution d'œuvres pillées. Parmi eux, l'Allemagne, le Royaume-Uni ou encore la Belgique.
A l'image de la France, qui rend mardi 26 oeuvres au Bénin, d'autres anciennes puissances coloniales européennes ont entamé des procédures de restitution du patrimoine africain pillé pendant la colonisation.
En France, une loi sur la restitution culturelle votée en 2020
Outre les 26 pièces du "Trésor de Béhanzin" provenant du pillage du palais d'Abomey en 1892 et restituées au Bénin, la France s'est engagée à poursuivre le processus.
Le Sénégal doit ainsi prochainement récupérer la pleine propriété d'un sabre et de son fourreau attribués à El Hadj Omar Tall, grande figure militaire et religieuse ouest-africaine du XIXe siècle. Ce sabre est déjà exposé à Dakar dans le cadre d'un prêt de longue durée, mais il est détenu par le Musée de l'Armée à Paris.
Une loi votée fin 2020 a rendu possible ces restitutions au Bénin et au Sénégal en permettant des dérogations au principe d'"inaliénabilité" des oeuvres dans les collections publiques, dans le cas de pillages caractérisés.
Madagascar et le Sénégal dans les starting blocks
Fin 2020, la France a par ailleurs remis en "dépôt" à Madagascar une couronne en métal doré et velours qui surmontait jadis le dôme du dais royal de la Reine Ranavalona III, souveraine malgache qui avait résisté pendant son règne (1883-1897) au colonialisme français.
De son côté, la Côte d'Ivoire, qui a officiellement demandé fin 2018 à la France la restitution de 148 oeuvres, se verra bientôt remettre le Djidji Ayokwe, le tambour parleur du peuple Ebrié, réclamé de longue date. Objet symbolique, cet outil de communication avait été confisqué par les colons en 1916 et est actuellement conservé au musée du Quai Branly à Paris.
Le Royaume-Uni encore réticent
L'université de Cambridge a remis le 27 octobre au Nigeria une sculpture de coq en bronze pillée il y a un siècle, devenant ainsi la première institution britannique à restituer un objet volé pendant la colonisation. La procédure de restitution avait débuté après une campagne d'étudiants contre les symboles rappelant le passé colonial.
Cette fine sculpture faisait partie des centaines de sculptures, gravures et bronzes pillés par les forces britanniques en 1897 lors de la destruction de Benin City, alors capitale du Royaume du Bénin située dans l'actuel Nigeria.
Dans la foulée, l'université d'Aberdeen, en Ecosse, a aussi restitué au Nigeria un bronze représentant un Oba (roi) du Bénin, acquis aux enchères en 1957.
Le British Museum de Londres, qui possède la plus grande collection de ces bronzes également dispersés en Allemagne ou aux Etats-Unis, s'est jusqu'ici refusé à toute restitution, plaidant pour des retours sous la forme de prêt.
L'Allemagne identifie 1000 oeuvres
Le Nigeria a conclu mi-septembre un accord avec l'Allemagne pour la restitution à partir de l'été 2022 d'objets d'art pillés pendant l'ère coloniale. L'Allemagne a identifié dans les collections de ses musées environ mille pièces, mais le nombre final d'oeuvres restituées dépendra de leur état.
Le Musée ethnologique de Berlin possède 530 objets historiques provenant de l'ancien royaume béninois, dont 440 bronzes.
Auparavant, l'Allemagne avait restitué en 2019 à la Namibie la croix en pierre de Cape Cross, monument de plus de trois mètres. Erigée en 1486 par des navigateurs portugais, la croix fut expédiée dans les années 1890 à Berlin, pendant la colonisation allemande.
La Belgique débute le processus
Le gouvernement belge a présenté début juillet une feuille de route pour restituer à la République démocratique du Congo (RDC), son ancienne colonie, des milliers d'objets culturels acquis abusivement, particulièrement lors des violences commises sous le règne de Léopold II entre 1885 et 1908. Le processus pourrait durer plusieurs années.
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