Une nécropole paléochrétienne mise au jour sur la colline de Fourvière à Lyon
Sur une vaste pente d'un hectare dominant la ville, autrefois propriété des "soeurs du Bon pasteur" et où une résidence doit être construite, une vingtaine d'archéologues de l'Institut de Recherche Archéologiques Préventives (Inrap) s'affairent depuis juin à creuser une terre argilo-sableuse.
Reportage: Syvie Adam, Julie Jacquard, Dominique Dumas
Plus de 600 tombeaux ou dépouilles
Tout le terrain ne sera pas défriché mais déjà, sur environ 2.500m2, plus de 600 tombeaux ou dépouilles sont sortis de terre. Encore aujourd'hui, on peut voir de nombreux squelettes intacts, petits ou grands, choyés sous les pinceaux et grattoirs des archéologues."On devine des coffrages en bois grâce à des galets de calage", montre Emmanuel Ferber, responsable du chantier pour l'Inrap. "On a aussi des amphores pour enterrer des enfants, des restes de l'époque romaine, quelques sarcophages et des ré-emplois de mausolées romains. Nous avons aussi trouvé des sépultures dans un tronc d'arbre évidé."
Le pouvoir attractif des saints
Si cette nécropole paléochrétienne datant du Ve au VIIe siècle est aussi dense, explique le chargé de recherche, c'est parce qu'"à l'époque chrétienne, les gens venaient se faire enterrer à côté des églises pour être protégés". Ici surtout, près de Sainte-Irénée et Trion, où "les premiers évêques ont été enterrés et ensuite canonisés". "Le fait qu'il y ait des saints enterrés dans cette église a eu un effet attractif".Ce qui n'enlève rien au caractère exceptionnel de la découverte : "avoir une si grande quantité de tombes à fouiller en un seul passage" permet de "travailler sur une masse de données plus importantes pour affiner et décrire comment les gens vivaient", répond le responsable. Plus les tombes sont proches des églises et plus elles se superposent, pour être proches des saints. Un peu plus bas, un autre secteur de fouille révèle des sépultures plus tardives, où les tombes s'étendent les unes à côté des autres, sans se recouper. Les anthropologues ont déjà commencé à découvrir des pathologies qui affectaient les habitants il y a environ 1.500 ans : "hier un anthropologue nous a montré un abcès dentaire qui avait fini par tuer un sujet", raconte Emmanuel Ferber.
Archéologie préventive
"En France, il n'y a pas beaucoup de fouilles concernant cette période paléo-chrétienne et ce qui est intéressant avec l'archéologie préventive, c'est qu'elle permet de fouiller de grandes surfaces", explique une porte-parole de l'Inrap. L'Institut a oeuvré en bonne entente avec le promoteur du site, le groupe LEM, qui va bâtir des logements de grand standing. "Cela n'allonge pas les délais. On a estimé neuf mois de fouilles dès la conception, on savait exactement ce qu'il en était. Tout est une question d'organisation, nous travaillons très étroitement avec l'Inrap et ça se passe très bien", se félicite Emilie Delloye, fondatrice du LEM.Selon Jean-Yves Rannou, directeur des opérations pour le groupe LEM, le chantier a nécessité un an de préparation parce qu'il a fallu consolider le terrain pour protéger les fouilles, notamment en injectant du béton sous le murs d'enceinte du site.
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