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"Sous un soleil énorme" : dans l'intimité de l'éternel voyageur Bernard Lavilliers

Souvenirs d'Argentine et morceau sur la boxe avec Eric Cantona : on est bien chez Bernard Lavilliers, bourlingueur au nouvel album touchant, qui chante aussi le frisson de l'au-delà.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Bernard Lavilliers au Festival Les Escales, à Saint-Nazaire en 2019.  (ROMAIN BOULANGER / MAXPPP)

Comme d'habitude, il a commencé par poser son sac et sa guitare à l'autre bout du monde pour composer ce nouvel opus, Sous un soleil énorme qui sort vendredi. A 11 000 kilomètres de Paris, pas au Brésil qu'il connaît bien (et dont il avait ramené le magnifique Fortaleza, 1979), mais à Buenos Aires. "Je me suis installé en février 2019, je suis resté trois mois, j'ai vu tous les concerts possibles. C'est une ville qui vit tard, la nuit, pas comme ici à Paris où à 22H00 les gens râlent quand il y a de la musique", raconte-t-il à l'AFP dans les locaux de son manager, entre un crocodile synthétique sur le parquet et un buste-statue de panthère, ça ne s'invente pas.

Entre carnet de voyage et journal intime 

"A Buenos Aires, il y a encore des quartiers d'artistes, mais en prenant des transversales, j'ai vu aussi des rues entières pleines de commerces de coffres-forts - je ne l'ai pas mis dans mes chansons - comme à Bangkok où un quartier ne vend que des batteries de voitures", développe-t-il, intarissable. L'oeil est toujours observateur et la plume du chroniqueur inspirée derrière les notes cumbia ou de tango ici et là. Que ce soit pour chanter l'inflation rampante en Argentine (Les Porteños sont fatigués) ou les conseillers de l'ombre au sommet de l'Etat, de ce côté de l'Atlantique, ces "petits marquis", "jamais élus, toujours choisis" (Beautiful days). La Corruption raccrochent les wagons là où il les avait laissés avec Les aventures extraordinaires d'un billet de banque, titre de 1975.

Lavilliers reprend même un autre conteur de son époque, Bob Dylan, avec son titre de 1963 Who killed Davey Moore? (adapté plus tard en français par Graeme Allwright). La belle idée est d'y faire entendre aussi les voix d'Eric Cantona, Gaëtan Roussel, Izïa et Hervé incarnant les protagonistes de cette tragique tranche de boxe.

Un album pour fendre l'armure 

Autre titre choral, Je tiens d'elle évoque sa ville natale, Saint-Etienne, avec le duo électro-pop Terrenoire, qui doit son nom de scène à un quartier populaire de cette ville dont ces deux frères sont aussi originaires. "J'ai un demi-siècle d'écart avec eux, c'était assez marrant de confronter nos visions", se délecte l'auteur-compositeur-interprète qui vient de fêter ses 75 ans. Avec ce titre, il parle aussi de la mère-patrie et de la mère tout court, puisqu'on y apprend que c'est la sienne qui lui offert sa première guitare. Le disque s'ouvre sur Le coeur du monde, mais il est bien question du sien, qui a failli le lâcher en début d'année, dans le bouleversant dernier morceau L'ailleurs.

Aujourd'hui en pleine forme, il ne veut pas s'épancher sur cette alerte cardiaque et son séjour en clinique. Mais confie tout de même: "J'étais entre deux (entre vie et mort), mais j'étais calme, très calme, il y en a que ça panique, moi pas du tout, cette chanson c'est un hommage détourné aux gens qui m'ont sorti de là, ces infirmières, ces toubibs, ces sentinelles qui nous surveillent". Il avoue, amusé :  "Bon, ils m'ont dit d'essayer de me calmer (sur son rythme, entre voyages et musiques). C'est pas pour autant que je dors plus, mais je me repose".

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