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Roger Waters, entre nostalgie et révolte, offre à Lyon un show très politique

Un spectacle parfois dantesque, très engagé politiquement, qui fait revivre l'époque où Pink Floyd faisait progresser le rock comme personne : Roger Waters a livré un concert hors norme, sidérant pour les oreilles comme pour les yeux, mercredi soir à Lyon.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Roger Waters en concert à la halle Tony Garnier à Lyon, le 9 mai 2018

Depuis son retour avec "Is This the Life We Really Want ?" et plus que jamais, Roger Waters l'ancien bassiste des Floyd, est en mission dans cette tournée mondiale baptisée "Us + Them". Pour faire vivre sa musique, dénoncer les horreurs du monde, défendre les opprimés et railler les puissants, tel Donald Trump.
 
Paris, où il doit faire escale à l'U Arena les 8 et 9 juin, est prévenu : Waters est en mode "Combat Rock". "Que la police vienne m'arrêter ! Parce que je milite pour les Palestiniens qui sont tués comme des chiens. Personne n'élève la voix en Occident. Dites à M. Macron qu'il est temps que ça cesse ! Beaucoup ont oublié 1789, mais moi je m'en souviens. C'est dans votre grand pays qu'est née l'idée que tous les hommes sont égaux."

En colère

En colère, sa voix porte. Loin du silence qui a accompagné le début du spectacle deux heures plus tôt. Pendant vingt minutes, une femme de dos contemple la mer. Puis le bruit des mouettes et des chants arabes se font entendre, avant un grondement et le ciel qui rougeoie soudain.
 
"Breathe" lance les hostilités. Son auteur apparaît enfin, le regard frondeur, sa basse en mains, sec et musclé comme un Clint Eastwood. En suivant, l'exceptionnel instrumental "One of These Days" rappelle à quel point ce son de basse en a influencé plus d'un, Peter Hook de Joy Division en tête.
 
Les hits de la grande époque Pink Floyd s'enchaînent : "Time", "Great Gig in the Sky", "Welcome to the Machine". Mais Waters défend aussi son dernier album, avec trois chansons dont "The Last Refugee" où on retrouve la femme du début, qui se rêvait danseuse et semble avoir perdu ce qu'il y a de plus cher dans son odyssée.
 
La nostalgie prédomine sur "Wish You Were Here", mais c'est "Another Brick in the Wall" qui offre un premier grand moment, avec sur scène douze jeunes encagoulés, en tenue de prisonniers, qui se débarrassent de leurs oripeaux "guantanamesques", dévoilent un t-shirt "RESIST!", dansent et finissent poing levé.

Intensité maximale

Efficace, la première partie est passée vite. La suivante n'aura rien à voir. Intensité maximale.
 
Dans le noir on entend des coups de feu, des sirènes de police. Se dresse alors au milieu de la Halle Tony Garnier, par un assemblage d'immenses toiles-écrans, la Battersea Power Station, l'usine londonienne immortalisée sur la pochette d'"Animals" (1977). Point de départ d'une demi-heure épique.
 
Si "Dogs" stigmatise la soif de profits, "Pigs" fustige la bourgeoisie baignant dans l'oisiveté. Pour en faire la démonstration, Waters n'y va pas de main morte. Lui et ses musiciens portent des masques de cochon et trinquent au champagne. Défilent alors des slogans sur pancartes : "Pigs Rule the World" ("Les porcs gouvernent le monde"), "No! Resist the Pigs" ("Non! Résistez aux cochons").
 
Les visages de Staline, Mao, George W. Bush, Jean-Marie et Marine Le Pen, Theresa May, Bachar al-Assad, Recep Tayyip Erdogan ou encore Benjamin Netanyahu se succèdent à l'écran.

Trump en prend pour son grade

Mais c'est Donald Trump qui en prend pour son grade : son visage est barré du mot "Charade" ("farce"), il est grimé en prostituée et apparaît sur l'imposant cochon gonflable qui plane désormais dans l'air. "Trump est un porc" clôt en français cette séquence d'une véhémence assez rare.
 
Le bruit et la fureur, difficile d'en sortir indemne, sinon en invitant le public à communier sur "Us & Them", avant que des lasers tracent les contours de la pyramide de "Dark Side of the Moon" sur "Eclipse".
 
Le rappel offre un épilogue grandiose avec "Confortably Numb", sous une pluie de petits papiers "RESIST!". Waters peut s'en aller, victorieux de son combat. Pendant ce temps sur l'écran, la silhouette d'un enfant se devine derrière la réfugiée... Happy End.
 

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