"La Cenerentola" au théâtre des Champs-Élysées : d'amours, de mensonges et de fantaisie
La magie opère même dans des lieux les plus inattendus, comme cette cafétéria, froide de blancheur et d’acier chromé. C’est dans ce self-service que trime jour et nuit la Cenerentola (Cendrillon en italien) sous le regard sévère de son beau-père, le très intéressé baron Don Magnifico. Et c’est là aussi que ses demi-sœurs, deux petites pestes, piquent dans la caisse, mollement surveillée par leur père, assommé par l’alcool et l’ennui. Le théâtre des Champs-Élysées ouvre sa saison avec La Cenerentola de Rossini dans une mise en scène pétillante et fantaisiste de Damiano Michieletto et avec la baguette inspirée de Thomas Hengelbrock. Cette version contemporaine, avec une scénographie éblouissante, pleine de trouvailles, de Paolo Fantin, est un cadeau avant les fêtes de fin d’année, un enchantement. Oui, la magie plane sur cet opéra du début à la fin. Un spectacle à plusieurs niveaux de lecture, pour les grands et les petits.
Composée en vingt-quatre jours par le très prolifique Gioacchino Rossini en 1817, dont le livret de Jacopo Ferretti s’inspire du conte de Charles Perrault, Cenerentola ressemble effectivement beaucoup à Cendrillon. Avec des nuances. Au jeu des différences, la bonne fée est un mendiant philosophe au pouvoir ensorcelant qui se nomme Alidoro , la marâtre porte un bouc, le soulier de vair devient bracelet et le carrosse… Et pour l’ouverture de l’opéra, Alidoro descend littéralement des nuages, une prouesse visuelle. Dans le rôle-titre, la mezzo-soprano franco-suisse de 37 ans, Marina Viotti, est lumineuse de candeur, de gentillesse. Elle a une belle présence vocale et scénique, chante ses peines et ses espoirs d’une voix émouvante. Son espoir est son nouvel amour, le faux valet et vrai prince incarné par le Sud-Africain Levy Sekgapane, tout en subtilité.
Que retenir de ce dramma giocoso, opéra burlesque, né en Italie vers le XVIIIe siècle ? De la fraîcheur, de la tendresse, de l’ingéniosité et du talent des artistes… L’orchestre, dirigé d’une baguette magique par Thomas Hengelbrock, accompagne, et parfois devance, le chant avec une rare complicité. Le public, sensible à la fois à la musique, à la scénographie et à la prestation des artistes ne s’est pas beaucoup retenu pour exprimer son enthousiasme, comme ce long Ooooooh lorsque le carrosse, pas n’importe lequel, fonce sur le plateau… Et que devient Cenerentola ? Et ses amours ? Et ses chipies de sœurs ? Le pardon est beau, noble. Surtout quand il n’est pas sollicité. Le pardon, donc, cette générosité d’âme. Attention aux faux-semblants et aux promesses de mansuétude. Cenerentola n’est pas un personnage de dessin animé, même si elle sait être facétieuse. La Cenerentola version Damiano Michieletto et Thomas Hengelbrock est à ne pas rater.
Fiche
Titre : La Cenerentola
Musique : Gioacchino Rossini
Livret : Jacopo Ferretti, inspiré du conte de Charles Perrault
Direction : Thomas Hengelbrock
Mise en scène : Damiano Michieletto
Scénographie : Paolo Fantin
Distribution : Marina Viotti | Angelina, Levy Sekgapane | Don Ramiro, Edward Nelson | Dandini, Peter Kálmán | Don Magnifico, Alice Rossi | Clorinda, Justyna Ołów | Tisbe, Alexandros Stavrakakis | Alidoro, Orchestre Balthasar Neumann, Chœur Balthasar Neumann.
Durée : 1h30 - Entracte 30 min - 1h
Lieu : théâtre des Champs-Elysées
Dates : jusqu'au 19 octobre
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